L'ancien entraîneur du Pôle France de gymnastique de Marseille, Pierre Ettel comparaissait mardi pour harcèlement moral d'une jeune gymnaste qu'il avait entraîné entre 2012 et 2015. Six mois de prison avec sursis ont été requis à son encontre.
Des humiliations, des brimades, des coups de colère... Pierre Ettel, l'ancien entraîneur du Pôle France de gymnastique de Marseille comparaissait mardi devant le tribunal correctionnel pour harcèlement moral. Six mois de prison avec sursis ont été requis, et le délibéré sera rendu le 21 décembre.
La plaignante, Iness Ben Rhouma, aujourd'hui étudiante à Science Po, avait intégré le Pôle en 2012, alors qu'elle n'était qu'une enfant, des rêves de médailles olympiques plein la tête.
"Il y a une emprise qui reste, même des années après être partie"
Elle dénonce des années de "souffrance" mais aussi des séquelles psychologiques, notamment des troubles alimentaires, attestées par une expertise en 2021, a rapporté son avocate Anne-Laure Rousset.
"On était pesées trois fois par jour, humiliées toute la journée", déclare la jeune fille à la sortie de l'audience. "C'est mentir que de dire qu'il y avait une bonne ambiance dans le gymnase, on pleurait toutes dans les vestiaires, on voulait partir", ajoute Iness, à propos de "l'omerta" qui régnait au Pôle.
Quand on est toute petite, on voue allégeance à l’entraîneur car on veut réussir, on veut qu’il nous aime, qu'il nous estime. Il y a une emprise qui se crée, et on entre dans un engrenage. Et c’est dur d’en sortir.
Iness Ben Rhouma, ancienne gymnaste du Pôle France de gymnastique de Marseille
En effet, peu de témoignages ont corroboré ses propos, seule une jeune gymnaste a déclaré avoir arrêté à cause de la pression.
Et pourtant, les propos que la plaignante rapporte sont édifiants : "Tu es hautaine ; bouge ton cul ; bouge tes graisses ; ta gueule ; casse-toi...", rythmaient ses entraînements, selon ses déclarations.
De son côté l'entraîneur Pierre Ettel se souvient de n'avoir proféré que certains de ces propos, en une occasion particulière. Il évoque une "gymnaste avec un gros potentiel mais qui avait du mal à gérer" et prenait des risques.
"Vous parlez de mise en danger sur les agrès, ce qui m'intéresse c'est votre comportement. Avez-vous eu des propos injurieux ou humiliants ?", demande la présidente. Non, répond-il. Et son envoi régulièrement dans les vestiaires, une sanction ? "Non je l'envoyais se calmer (...) quand il y avait trop de stress".
L'avocat de Pierre Ettel, Julien Berenger, a plaidé la relaxe : "rien ne permet de considérer qu'il serait coupable". "La justice c'est aussi retenir qu'il était un bon entraîneur. Un homme bien finalement".
Des difficultés financières, des procès, le Pôle France est dissout
Déjà en mai 2023, le directeur technique du Pôle France de gymnastique était condamné à six mois de prison et 10.000 euros d'amende, pour le harcèlement de trois jeunes gymnastes mineures, évoluant dans la structure.
Des scandales, auxquels s'ajoutent des difficultés de trésorerie, le Pôle France a été dissout en juin dernier, laissant des gymnastes, des entraîneurs et des salariés à la porte, le tout, à un an des jeux olympiques.
En attendant le délibéré, Iness se dit soulagée d'avoir pu se faire entendre : "je ne porte pas plainte par vengeance, je fais ça pour les prochaines, pour que le sport de haut niveau change. Ce n'est pas normal de vivre ça quand on est enfant".