Un tremblement de terre aussi violent que celui qui a touché la Turquie ce lundi 6 février pourrait-il se produire en région Paca ? Bien que très peu probable, le risque n'est pas exclu. On vous explique pourquoi.
Le tremblement de terre le plus meurtrier depuis 1999. Deux séismes de magnitude 7,5 et 7,8 sur l’échelle de Richter ont secoué le sud-est de la Turquie et le nord de la Syrie ce lundi 6 février au matin. Le bilan provisoire est d’au moins 8 364 morts et plus de 20 000 blessés. Un phénomène sismique semblable pourrait-il frapper la région Paca ? "C'est très, très peu probable selon les connaissances actuelles, répond le géologue Christophe Larroque, chercheur au laboratoire Géoazur. Mais rien n'exclut qu'il s'en produise un demain."
La région a déjà connu plusieurs catastrophes sismiques. Comme le séisme du 23 février 1887 de magnitude 6,8 qui frappa la Ligurie et les Alpes-Maritimes. Il fit 600 morts. Ou encore le tremblement de terre de Lambesc (Bouches-du-Rhône), le 11 juin 1909, de magnitude estimée à 6,3. La secousse causa la mort de 46 personnes.
La région Paca, à la rencontre des plaques tectoniques africaines et eurasiennes, est la région de France métropolitaine la plus exposée au risque sismique. Un quart de la région est classé en zone de sismicité "moyenne", en rouge sur la carte du gouvernement ci-dessous. Cela concerne notamment une grande partie des Alpes-Maritimes, des Alpes-de-Haute-Provence, la moitié du territoire des Hautes-Alpes, une partie du Vaucluse et des Bouches-du-Rhône.
Si l'on s'appuie sur les données historiques, l'un des territoires les plus exposés aux séismes constitue la zone au large de la côte ligure, entre Nice et Savonne. "C'est un grand système de failles en mer qui a notamment produit le séisme de 1887", détaille le géologue Christophe Larroque. Plusieurs équipes de géologues sont d'ailleurs toujours à pied d' œuvre pour analyser cette zone à risques.
La vallée de la Vésubie et le domaine alpin sont également particulièrement exposés au risque sismique. Un fort tremblement de terre a notamment touché Castellane, petite commune à l'entrée des Gorges du Verdon dans les Alpes-de-Haute-Provence, en 1855. Plus récemment, le 7 avril 2014, un tremblement de terre de magnitude 5,2 a lézardé les murs de Barcelonnette, dans l'Ubaye.
"Les zones actives se situent dans la partie comprise entre Briançon et la côte ligure", résume le chercheur. Tous les jours, les capteurs sismiques du laboratoire Géoazur enregistrent des séismes, trop faibles pour être ressentis, de magnitude 2 ou 3. Comme celui survenu au large de Monaco, ce lundi 6 février. Certains dépassent la magnitude 4, "tous les 4 à 5 ans". Et la probabilité qu'un séisme dépasse la magnitude 6 reste "très faible".
"La magnitude des tremblements de terre est proportionnelle aux longueurs des failles, explique Christophe Larroque. Or, on ne connait pas dans la région, pour le moment, de faille qui soit aussi longue que la faille est-anatolienne qui a causé le tremblement de terre meurtrier de lundi."
De plus, la période "de retour" entre deux séismes puissants, c'est-à-dire la durée moyenne au cours de laquelle, statistiquement, un tel événement se reproduit, est "plusieurs milliers d'années" en région Paca. Mais une fois encore, cela n'en exclut pas la possibilité, répète le spécialiste.
En Turquie, les deux séismes qui se sont produits lundi ne venaient pas de la même faille. Deux événements sismiques distincts, et pourtant, ils n'ont été séparés que de quelques heures.
La région Paca est-elle préparée aux tremblements de terre ?
A la différence des orages, les séismes ne peuvent pas être prévus en amont. "Il n'y a aucune méthode, aucune voie de prévisions des tremblements de terre, rappelle Christophe Laroque. On sait observer, on sait détecter, y compris les tout petits séismes qui ne sont pas ressentis par la population".
"On n'a pas suffisamment compris la physique des processus des tremblements de terre ", poursuit-il. "On peut observer le ciel, mais observer l'intérieur de la terre est plus complexe. Aucune méthode n'a été trouvée, nulle part dans le monde".
Des chercheurs continuent de travailler sur le sujet. En attendant, si la prévision est impossible, la prévention et l'anticipation peuvent être décisives, rappelle le scientifique qui prend l'exemple du Japon. Les règles à suivre en cas de secousses sont listées sur le site du gouvernement.
Quant aux bâtiments, il existe des normes de constructions parasismiques pour les édifices récents. Des normes adaptées aux types de bâtiments et à la localisation, " qui ont largement fait leurs preuves", atteste Christophe Larroque.
Or, souvent, dans les zones à risque dans notre région, se trouvent des petits villages ou centres villes historiques constitués de bâtiments anciens. "A l'heure actuelle, il n'y a pas de réflexion engagée sur le renforcement de ces bâtiments".
"Sur la Côte d'Azur, on peut tenir aux vibrations, mais un gros séisme pourrait provoquer de vrais dégâts dans des zones à forte densité de population où les constructions sont fragiles comme dans les vieilles villes", ajoute Françoise Courboulex, directrice de recherche au CNRS-Université Côte d'Azur-Observatoire Côte d'Azur.
Dernier point "fondamental" en cas de catastrophe sismique : la capacité des secours à intervenir rapidement. "La sécurité civile, les hôpitaux, les secouristes sur le terrain... La question du secours aux populations est un problème majeur".
Enfin, si un tel séisme survenait en Paca et déjouait les statistiques, se poserait alors la question d'un potentiel tsunami, comme cela est survenu suite au tremblement de terre de 1887. Un tsunami d'une ampleur certes bien moindre que ce que l'Indonésie a connu en 2004. A Menton, l'eau était montée de deux mètres. "On ne veut pas être alarmiste, mais ces questions doivent être considérées."