VIDEO. Plus inclusive, plus responsable, plus solidaire... Comment fait-on la fête en 2024 à Marseille ?

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Extrait du documentaire "Que vive la nuit !" réalisé par Nicolas Debru et Florent Mangeot ©Les Films du Tambour de Soie / France Télévisions / Association Lasko

Qui sont les fêtards aujourd’hui à Marseille ? Qu'est-ce qui a changé avec le covid, les confinements et l'évolution de la société ? Artistes, responsables de festival, de night-club ou de salle de spectacle témoignent dans un documentaire inédit, "Que vive la nuit !". Alors, finie la bamboche ? Non, elle se réinvente.

Sur les ondes d’une radio, une voix dans la nuit s’élève. Celle de Squaaly Baba, chroniqueur trublion de la vie nocturne marseillaise. C’est lui qui va nous guider à la rencontre des gardiens - des anges, diront certains - de cette nouvelle nuit post-covid. 

Amalia, Benoît, Francine, Sara, DJ Faze, Anthony, Miss Martini, Eric... nous offrent leur vision de la fête, de la fiesta, de la teuf, de la bamboche. Et pour cause, ils font partie de celles et ceux qui l’ont fait renaître à Marseille. 

Ces artisans de la fête racontent les mutations qu’elle a subies depuis son extinction durant la pandémie. Ils témoignent d’une nuit plus solidaire, plus tolérante, plus écolo, sans oublier toutefois que rien n’est gagné, rien n’est acquis.

Être jeune à Marseille, c’est déjà être marginal. La jeunesse marseillaise, c’est une jeunesse qui est assez solidaire, une jeunesse populaire, qui n’a pas énormément d’argent.

Amalia

Amalia est une jeune artiste, elle se prépare à sa première grande scène au Delta festival qui officie chaque été sur les plages du Prado. Sa notoriété est récente, elle la doit à ses freestyles en facecam durant le covid, qui ont peu à peu enflammé les réseaux sociaux.

Un rap français personnel, engagé et sensible, avec une présence et une douceur en contradiction avec ses textes. Elle est devenue l’une des porte-voix de cette génération sacrifiée. 

Sur la scène du Delta, Amalia accueille Eric Akopian, président de l’association Clean my Calanques qui vient sensibiliser les festivaliers à l'environnement. Lui aussi aime faire la fête mais il souhaite inciter les jeunes à se comporter autrement, car le monde de la nuit est, selon lui, extrêmement polluant. 

Moins de déchets, plus de sobriété énergétique

Une fête plus responsable. Cette préoccupation anime l’équipe du festival Le Bon Air, qui élit domicile à la Friche de la Belle-de-Mai chaque week-end de Pentecôte. Ici, les scènes sont alimentées par le solaire, elles sont à taille humaine et tiennent compte des festivaliers comme des habitants.

Le covid m’a vraiment mis une claque dans la gueule… Là c’est vital de réfléchir différemment et de prendre de vrais risques avec les prod, avec les artistes pour leur dire : écoutez, on arrête de surconsommer.

Benoît Rousseau, directeur technique du festival Le Bon Air

L’accueil des publics est aussi une préoccupation du festival, avec des dispositifs inclusifs pour que chacun puisse faire la fête de manière safe.

Respect et mixité

On retrouve ce même esprit au Makeda, une nouvelle salle de concert près du "Cours Ju" et de la Plaine. Chose inédite dans le monde de la nuit, ce sont deux femmes, Francine et Aude, qui règnent sur les lieux. Ici, inclusion, respect, protection des femmes sont les maîtres mots.

La salle accueille de nombreux collectifs, comme Dance Hall Nation. Sara Ahamada est membre de ce collectif, au croisement des musiques africaines et caribéennes. La performeuse enseigne la booty therapy, une danse pour se libérer, lâcher prise à travers des mouvements du bassin et des fesses. Elle le revendique : pour une femme, se réapproprier son corps ainsi est un acte politique. 

On peut danser très librement à Marseille mais il y a des endroits pour le faire.

Sara Ahamada

Sara sait qu’elle peut performer, twerker sans crainte au Makeda. L'établissement accueille tous types de publics, c’est un des lieux où la mixité sociale, culturelle, religieuse se réalise. Mais ce n’est pas le cas partout dans une ville qui vit une fracture sociale de plus en plus marquée, une gentrification accélérée par la crise du covid.

C’est ce que constate DJ Faze. Figure du hip-hop à Marseille, il s’interroge sur la popularité de la cité phocéenne et le risque que certains soient laissés sur le banc de touche. "La proposition culturelle, même s’il y a des progrès, ce n’est pas la même entre le nord et le centre", observe-t-il. "Le repli, il est de plus en plus visible ici : il y a des petits du 8e qui ont jamais croisé un petit du 15e jusqu’à ce que, peut-être, peut-être, ils arrivent à rentrer dans la même boîte de nuit".


Heureusement, la ville a aussi vu naître la première maison Drag créée durant le confinement par Martin, alias Miss Martini. Pour elle comme pour ses consœurs, il est temps de sortir le Drag de son ghetto et d’offrir aux Marseillais une vision décomplexée et tolérante de cet art.

Les Drag Queen amènent une orientation nouvelle et différente. C’est agréable d’avoir des lieux LGBTQIA+ pour faire la fête, mais maintenant qu’on fait du Drag, on peut aller aussi dans des lieux qui ne sont pas LGBTQIA+, comme le cabaret où tous types de personnes vont venir.

Miss Martini

C’est au Cabaret de l’étoile bleue qu’elle performe désormais le plus souvent, face à un public éclectique, en première partie de soirée. Marseille change de visage et se fait plus queer désormais. 

Un glissement de la fête

Pour autant, la tolérance demeure une valeur à défendre et des combats restent à mener. Anthony Pappalardo dirige le Trolleybus sur le Vieux-Port, une institution depuis plus de 30 ans parmi les boîtes de nuit marseillaises. Il se sent dépassé par la jeunesse et ses nouveaux codes. Il doit aussi faire face à une compétition de plus en plus agressive de la part de concurrents qui ne sont plus les night-clubs mais les bars ou les lieux éphémères. 

Car la fête désormais glisse et se déroule aussi le jour, devenant plus protéiforme, évanescente comme les événements que l’on scrolle sur les réseaux. Les cartes du monde de la nuit semblent se rebattre perpétuellement jusqu’au petit jour. 

Tous ces acteurs se côtoient sans se croiser, officiant à des heures différentes, sur des lieux multiples, abritant sous leurs ailes un public bigarré. Ils forment une cohorte, un bataillon en lutte pour retrouver ce qu’ils ont perdu il y a quatre ans, lorsque la nuit est devenue silencieuse et confinée. 

Ils créent aussi de nouveaux espaces, de nouvelles synergies, faisant face à de nouveaux défis liés à une ville qui a payé le prix fort de cet arrêt momentané.

Le temps d’un film, ils racontent comment ils n’ont cessé de se réinventer.

>> "Que vive la nuit !" un film de Nicolas Debru et Florent Mangeot à voir sur france.tv dans le cadre de la collection documentaire "Finie la bamboche ?"

Une coproduction Les Films du Tambour de Soie / France Télévisions / Association Lasko.

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