Antoine Mignemi est l’un des derniers témoins directs de la rafle et de la destruction du quartier Saint-Jean, il y a 80 ans. Président du Collectif 24 janvier 1943, il œuvre pour que ce pan tragique de l’Histoire ne soit pas oublié.
Sur les quais du port, rien n'évoque les jours terribles de 1943. Mais Antoine Mignemi, lui, n’a pas oublié. "Plus le temps passe et plus la mémoire remonte" glisse l’octogénaire, aujourd'hui président du Collectif Saint-Jean 24 janvier 1943.
Antoine a 5 ans lorsque, en ce dimanche de janvier, les gendarmes frappent à la porte de l’appartement familial. Comme les 20 000 habitants du quartier, le petit garçon et ses parents sont évacués brusquement et emmenés dans un camp de rétention à Fréjus.
Un quartier entièrement rasé
Des milliers de personnes déplacées, 800 déportées vers les camps de Sobibor, Mauthausen, Aurigny et Sachsenhausen… Quelques jours plus tard, Saint-Jean est dynamité, entièrement rasé par les Allemands. Toute l’opération, ordonnée par Hitler en personne, a été menée en concertation avec les autorités françaises. L’objectif était d’éradiquer purement et simplement un quartier qui avait pour seul défaut d’être pauvre, populaire et habité de migrants.
Effacée de la mémoire collective
En 2019, cette tragédie a été reconnue officiellement comme un crime contre l’humanité. Elle reste pourtant mal connue, même des Marseillais. Comme effacée de la mémoire collective. "Comment se fait-il qu’un quartier où ont été raflées 20 000 personnes, où 12 000 personnes ont été transitées de force, où ont été dynamités 1500 immeubles, ce soit passé comme ça, sans qu’on en parle ?" s’interroge encore Antoine.
En déambulant dans les rues du port, il croise des écoliers à peine plus âgés qu’il ne l’était alors. Les souvenirs affluent, ceux de l’enfant alors insouciant. "La rue Saint-Laurent où je suis né, elle était comme ça, sans ces barrières, mais beaucoup plus étroite. Au milieu, il y avait une petite rigole où coulait l’eau d’évacuation des eaux usées et pour nous, les enfants, la rue c’était notre terrain de jeu (…) Mais ils ont considéré que le Vieux-Port c’était un lieu qu’il fallait éliminer par le feu et par le sang".
Retrouvez l’intégralité de ce témoignage dans "La rafle oubliée", un documentaire de Fabio Lucchini et une web série en ligne sur france.tv