Le très attendu procès des prothèses mammaires frauduleuses PIP doit s'ouvrir mercredi pour un mois à Marseille, premier jour de face-à-face entre des plaignantes nombreuses et Jean-Claude Mas, le fondateur de la société varoise au coeur d'une supercherie aux répercussions mondiales.
Avant l'ouverture de l'audience, la Cour de cassation examinera à 8h30 le recours de deux ex-cadres de PIP, également prévenus, qui mettent en cause l'impartialité du tribunal et réclament le dépaysement du procès. Leur défense estime notamment que le TGI a apporté "un soutien logistique aux victimes" en facilitant la procédure de constitution de partie civile. La Cour devrait se prononcer dans la foulée. Selon un des avocats des requérants, l'avocat général devrait s'opposer au dépaysement.
Des recours
A 11h00, si le procès s'engage comme prévu, Jean-Claude Mas, 73 ans, se retrouvera pour la première fois face aux victimes de la fraude, des femmes qu'il avait accusées, lors de son audition par les gendarmes, de porter plainte "pour le fric".Dans ce procès pour "tromperie aggravée" et "escroquerie", elles sont quelque 5.250 plaignantes, françaises pour l'essentiel -- sur environ 30.000 porteuses de la marque Poly Implant Prothèse en France et bien plus encore à l'étranger. Un nombre tel qu'il a généré un déploiement inédit à Marseille, où un centre de congrès a été mobilisé pour installer, sur 4.800 m2 et pour 800.000 euros, le prétoire et ses salles attenantes.
Jusqu'au 17 mai
Jusqu'au 17 mai, le tribunal correctionnel étudiera comment PIP a pu remplir pendant dix ans ses prothèses d'un gel de silicone industriel non autorisé, déjouant les contrôles de TUV, son certificateur, et ce jusqu'à sa liquidation judiciaire en mars 2010 après une alerte de l'Agence des produits médicaux (ANSM).Il se penchera sur les responsabilités de chacun de cinq prévenus: M. Mas, qui pendant l'enquête a assumé voire revendiqué la manipulation, mais aussi son ancien bras droit Claude Couty, la directrice de la qualité Hannelore Font, le directeur technique Loïc Gossart et le directeur produits Thierry Brinon. Tous encourent cinq ans de prison. Pas d'indemnisations majeures en vue en revanche pour les victimes, sur fond d'insolvabilité des prévenus - M. Mas et son ex-DG sont mis en examen dans une enquête en cours sur le sort des fonds générés par la fraude.En garde à vue, Mas, qui exerça divers métiers avant d'en venir aux prothèses en 1991, a de suite reconnu avoir fraudé sur le gel pour des raisons financières (un million d'euros de gain annuel, selon l'enquête), tout en niant nuire à la
santé.
M. Couty plaidera coupable, relevant l'influence de Mas, indique son avocat Christophe Bass. Mme Font, "très éprouvée" selon son conseil Jean Boudot, reconnaît aussi les faits, mais sa défense devrait disputer la notion de dangerosité. Selon l'ANSM, sur l'ensemble des prothèses retirées depuis le début du scandale, un quart étaient défectueuses (enveloppe rompue, écoulement de gel), provoquant notamment des réactions inflammatoires - sans que les autorités relèvent un risque accru de cancer.
La douleur
Les cinq co-prévenus sont mis en examen pour "blessures involontaires" dans un autre volet judiciaire toujours à l'instruction à Marseille. Parmi les victimes, beaucoup racontent la douleur, les conséquences financières. Ainsi Joelle Manighetti, arrivée de région parisienne mardi à Marseille. "De Mas je n'attends rien, il a été si méprisant," dit cette femme, opérée cinq fois depuis la rupture de la prothèse qui lui avait été implantée après un cancer du sein. "Mais j'ai l'intention de lui dire ce que j'ai sur le coeur, que nous sommes prisonnières jusqu'à la fin de notre vie de notre souffrance, et j'aimerais qu'il le porte sur sa conscience".Ces femmes pour autant devront attendre encore un peu.
Mercredi en effet, le tribunal devrait commencer par examiner plusieurs requêtes en nullité de procédure et questions prioritaires de constitutionnalité (QPC) présentées par les avocats de la défense. Parmi les griefs invoqués, le fait que les différents volets judiciaires aient été disjoints, impliquant trois procès pour de mêmes faits. Ou encore le fait que ce volet pour "tromperie" n'ait pas fait l'objet d'une information judiciaire, impliquant des droits moindres pour la défense.
Il n'est pas à exclure non plus que des parties civiles puissent faire valoir des nullités, tant certaines ont critiqué aussi la procédure, regrettant également de ne pas voir parmi les prévenus d'autres protagonistes (chirurgiens, pouvoirs publics, TUV...).
L'examen de tous ces recours pourrait bien prendre deux jours, selon une source au TGI, avant que le tribunal, s'il décide de maintenir le procès, n'entre finalement dans le vif des débats.
Le procès PIP va pouvoir s'ouvrir comme prévu
Le procès PIP va pouvoir s'ouvrir comme prévu mercredi à Marseille, la Cour de cassation s'étant déclarée incompétente pour statuer surune demande de dépaysement réclamée par une prévenue.
Juste avant cette annonce, Jean-Claude Mas, le fondateur de la société varoise PIP, au coeur du procès des prothèses mammaires frauduleuses, est arrivé vers 10H30 au tribunal, installé pour l'occasion au parc des expositions de Marseille.