Coronavirus : les sapeurs-pompiers émettent de vives critiques sur la gestion de crise par le ministère de la santé

Dans un rapport au vitriol, la fédération des pompiers a étrillé la gestion de l'épidémie de coronavirus par le ministère de la Santé et ses agences

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Dans un rapport interne destiné au ministère de l’intérieur dont elle dépend, la fédération nationale des pompiers étrille la gestion de l'épidémie de coronavirus par le ministère de la Santé et ses agences.

Ce document "n'est pas finalisé et ne devait pas fuiter dans la presse", a précisé Hugues Deregnaucourt, vice-président de la Fédération Nationale des Sapeurs-Pompiers de France (FNSPF), tout en assumant ces critiques cinglantes vis-à-vis du ministère de la Santé et de ses Agences régionales de santé (ARS).

Un manque de "directeur des opérations de secours"


Même attitude de la part des cadres des Services d’Intervention et de Secours (SDIS) de la région Paca.

"Qu’il s’agisse de crises d’ampleur comme celles de la H1N1, ses inondations, ou de feux de forêts, on le sait ici, il y a des services interministériels sous le pilotage du préfet qui fonctionnent très bien", raconte le Commandant Michel Santamaria du SDIS Vaucluse. "Avec un seul et unique directeur des opérations de secours qui est le préfet. Et ça n’a pas été le cas dans cette crise du coronavirus ».

Dans le Parisien, qui révèle l’affaire, les responsables nationaux de la fédération des Sapeurs pompiers, qui représentent quelques 250000 hommes dressent un constat cinglant de la gestion de la crise par le gouvernement, accusé d'en avoir confié le pilotage au seul ministère de la Santé.

On a vu notre activité vraiment ralentir, alors que les sapeurs pompiers couvrent l’ensemble du territoire national

Cdt Michel Santamaria, SDIS 84



Ce rapport vient alimenter des tensions de longue date entre les pompiers, qui dépendent de l'Intérieur, et les services de santé sur la façon de gérer les appels d'urgence, le secours et le transport des malades.

"On a vu notre activité vraiment ralentir, alors que les sapeurs pompiers couvrent l’ensemble du territoire national", poursuit le commandant Santamaria.
Avec ses 7000 casernes, la fédération des sapeurs-pompiers estime n'avoir pas été utilisée "comme elle l'aurait pu l'être".

Le commandant Santamaria estime que dans le Vaucluse, "il y a 51 casernes pour 7 Smur".

"On nous appelle les soldats du feu, mais on est plutôt des soldats de la santé. Plus de 84 % de nos activités sont habituellement consacrées au secours à la personne".

Les ARS "ont semblé accaparées par la gestion du nombre de places en réanimation hospitalière et par les remontées statistiques", affirme le rapport.

Un travail rendu "plus compliqué"


Pleins pouvoirs donnés au ministère de la santé en début de crise, puis  "organisation bicéphale entre les ministères de la Santé et de l'Intérieur" ont empêché une seule gouvernance

Tout cela a largement compliqué le travail et l'organisation des services de secours
sur le terrain.

"On a manqué de pragmatisme, de réalisme, de proximité et de confiance en ceux
qui sont confrontés aux problématiques des gens au quotidien"
, a abondé le président de la FNSPF, Grégory Allione, l'un des responsables également du SDIS 13.

En cas d'étouffement ou de forme grave, les Français devaient appeler le 15, c'est-à-dire le Samu ou le Smur.

Avec leur numéro 18, les pompiers se sont sentis écartés de la gestion.

"Cela fait des années que l’on réclame un seul numéro d’urgence, le 112 comme le font déjà plusieurs pays européens", déplore le commandant Santamaria. "Il faut arrêter la multiplication des numéros d'urgence. Aujourd’hui vous avez le 15, vous avez le 18, vous avez le 17, vous avez aussi le 114, le 115. La population s’y perd".

Le préfet au coeur de la crise dans le Vaucluse

Dans une vingtaine de départements, les préfets ont toutefois pris les rênes. Et ont conduit des réunions interservices pour organiser la gestion de crise. C'est le cas du Vaucluse.

"Le préfet a crée une cellule interservices, où se retrouvaient les sapeurs pompiers, la correspondante de l’Ars et les gendarmes et policiers. Ils faisaient un point et décidaient des actions qui étaient réparties dans les services", précise le commandant vauclusien."

Des prélèvements au centre pénitentiaire du Pontet, en début de crise, à la gestion des clusters parmi les travailleurs agricoles étrangers le mois dernier, les équipes de la santé et du ministère de l'intérieur ont travaillé en collaboration dans le Vaucluse.

Mais cela n'a pas été le cas dans la plupart des départements.

Le rapport épingle également les centaines d'évacuations de patients en TGV ou
en hélicoptère visant à désengorger les hôpitaux, une "véritable esbroufe" selon
la fédération, "car souvent il y avait de la place dans la clinique d'en face".

Un rapport clairement pas étayé

Ministère de la santé



Interrogé par l'AFP, le ministère de la Santé a regretté la publication "en pleine
crise"
d'un "rapport clairement pas étayé" qui "ne reflète pas les actions" des
professionnels mobilisés.

Il a récusé toute absence de communication entre ARS et préfectures et justifié
les évacuations en train depuis l'Ile-de-France où, "fin mars, il ne restait plus
qu'un lit de réanimation disponible".

Président de Samu-Urgences de France, François Braun a, lui, dénoncé auprès de
l'AFP un "pamphlet" compilant de "fausses informations" qui témoignent de "la grande frustration" de la fédération.
       
Depuis le début de l'épidémie de coronavirus qui a fait près de 30.000 morts en
France, l'exécutif a été visé par de nombreuses plaintes  pour "mise en danger
de la vie d'autrui" ou "homicide involontaire".

 
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