Déconfinement : dans le BTP, les difficultés arriveront "quand il faudra commencer à rembourser les prêts"

En Paca, sept chantiers de construction sur dix ont pu reprendre depuis le déconfinement, d'après la Fédération régionale du bâtiment, parfois à l'aide de prêts. Les entreprises du secteur, qui emploie 90 000 personnes craignent un effet retardé de la crise "quand il faudra commencer à rembourser".

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"Nos équipes ont accepté de travailler de nuit". Maximilien Piteau dirige une entreprise de construction bois à Salon-de-Provence.

Pour lui, le déconfinement a d'abord été un grand soulagement pour tous. "D'un point de vue humain, on était tous très contents de reprendre, de se retrouver. Tout le monde a pris la valeur de ce que représente le travail", explique-t-il.

Le Covid-19 a aussi engendré une série de restrictions nécessaires à la santé de tous, ouvriers, maîtres d'ouvrages et clients.

Côté pratique donc, c'est moins euphorique. "Les procédures sont compliquées à mettre en place, personne n'assume le risque et nous sommes en première ligne".

"L'entreprise a mis en place des horaires décalés, avec certaines fois du travail de nuit"
, afin de limiter les délais tout en respectant les mesures sanitaires.

Complexité de la remise en route

Même constat chez Provence Aluminium. L'entreprise basée à Aubagne a mis à l'arrêt "100% des chantiers" pendant la crise, indique Alain Dousse.

"L'activité a repris, mais sur 60% des chantiers seulement," explique le chef d'entreprise. Dans certains cas, la distanciation d'un mètre n'est pas possible.
La coactivité inhérente au secteur du bâtiment, en particulier dans les chantiers de second oeuvre, est un frein important à la reprise totale l'activité.

"Plus de dix entreprises peuvent être amenées à travailler ensemble sur certains chantiers, avec des superpositions de tâches", explique Philippe Piantoni, président de la Fédération du bâtiment Provence-Alpes-Côte d'Azur. 

"Nous devons dans ces cas créer plus de surface afin de respecter les distanciations, ou modifier les plannings d'interventions, lorsque cela est possible", précise-t-il.

Le télétravail maintenu chez les maîtres d'ouvrages et les délais de livraison augmentés pour certaines fournitures ont aussi renforcé cette inertie, selon le président de la Fédération régionale du bâtiment

Les mesures sanitaires, frein à la rentabilité

Dans le secteur du bâtiment, "le taux de rentabilité est structurellement plutôt bas, de 2 et 3 %", explique le président de la Fédération régionale. La marge est donc faible, et le ralentissement dû à l'application des mesures sanitaires aura forcément un impact sur les bilans financiers. 

L'élaboration du guide de prévention du BTP permet la mise en oeuvre concrète des consignes et procédures sur les chantiers. Un protocole rassurant pour tous. Mais avec une conséquence directe : la hausse des surcoûts. 

"Ralentir notre vitesse de travail a un effet futur sur la rentabilité qui va être dévastateur", prédit Alain Dousse.

D'après le chef d'entreprise aubagnais, les difficultés vont arriver dans six mois, un an, "quand il faudra aussi commencer à rembourser les prêts". 

Baisse de rentabilité, augmentation des coûts

C'est ce que le président de la Fédération régionale du bâtiment nomme "l'effet ciseau". "Baisse de rentabilité, augmentation des coûts, l'effet mécanique pourrait être "catastrophique pour les entreprises du bâtiment", annonce Philippe Piantoni.

D'autant qu'il faudra aussi régler les factures dans les chantiers où, par exemple, "du matériel loué a été immobilisé, des abonnements courrent toujours, ou encore si il a fallu faire appel à du gardiennage", sans pouvoir avancer les travaux, précise-t-il.

"Ce cas de force majeure n'est pas reconnu par les assureurs" "Heureusement, les mesures et aux aides de l'Etat et la Région ont évité une très grosse casse", assure Philippe Piantoni.

Etre vigilant au maintien de l'activité

Mais pour l'avenir, le secteur lance un appel aux collectivités : "Attention au trou d'air, il faut être vigilant au maintien de l'activité", avertit le président de la Fédération régionale. 

En clair, les collectivités sont priées de relancer leurs appels d'offres publiques, et les services d'urbanisme de continuer à délivrer les permis de construire nécessaires au maintien du secteur privé.

"Le retard, nous ne le rattraperons pas, le bilan ce sera plus tard, conclut Maximilien Piteau, l'objectif majeur pour le moment c'est, déjà, sauver les emplois"
 

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