Antoine Cossu dit "Tony l'Anguille", reconverti dans l'écriture de polars, a été mis en examen.
Antoine Cossu dit "Tony l'Anguille", reconverti dans l'écriture de polars, a été mis en examen jeudi à 71 ans pour "association de malfaiteurs", dans le cadre d'une enquête sur un trafic de drogue ayant déjà fait tomber quelques membres du gotha du grand banditisme.
La police judiciaire de Nice, qui enquête depuis 2009, estime avoir pratiquement bouclé le démantèlement d'un tentaculaire réseau, avec
désormais 20 mises en examen, dont beaucoup de "beaux noms" du milieu.
"Dans ce dossier, on est en train de faire le who's who du banditisme du sud-est de la France", résume Philippe Frizon, chef de l'antenne de police judiciaire de Nice.
"C'est une des plus grosses affaires de trafic de stupéfiants des deux dernières années, au regard de l'importance de ses membres", estime le commissaire. La toute dernière prise, "Tony l'Anguille", constituait la cerise sur le gâteau : c'est l'ex-beau-frère et homme de confiance du légendaire parrain marseillais Francis Vanverberghe, dit "le Belge", assassiné en 2000 à Paris.
L'homme, surnommé ainsi pour son talent à échapper à la police, compte à son actif attaques à main armée, trafics internationaux de stupéfiants et évasions multiples. Il a déjà passé une vingtaine d'années en prison.
Le Marseillais semblait assagi avec la rédaction en prison d'un polar sorti en 2009, année de sa libération. "Ecrire cela a été pour moi ma façon de m'évader", dira-t-il alors. "J'ai été un voyou avec passion, je serai écrivain avec la même passion !"
Il remporte le prix "Intramuros" en 2010 du festival de Cognac du polar, attribué par des détenus. L'homme vit chez son frère près de Montpellier et un deuxième polar paraît début 2011.
Reste que les ex-bandits "aiment flamber", avance un enquêteur. Eric Jourdan, rencontré en prison, l'aurait sollicité pour financer une partie d'une importation de cocaïne et la police suspecte Cossu d'avoir accepté.
"Les voyous n'ont généralement pas la totalité de la somme demandée par les fournisseurs et ils font la tournée des popotes", explique l'enquêteur.
Le juge marseillais Philippe Dorcet, chargé de la criminalité organisée, a décidé jeudi de mettre en examen Cossu pour simple "association de malfaiteurs" et l'a laissé en liberté sous contrôle judiciaire, selon son avocat.
Jourdan (un restaurateur de Menton condamné pour trafic de stupéfiants) s'était allié avec Krisna Léger (arraisonné sur un voilier convoyant de la cocaïne vénézuélienne) et Francis Castola (dit "le petit Corse" soupçonné de liens avec le grand banditisme corse).
Les trois hommes seront cueillis par la police en septembre 2010 sur une aire d'autoroute, alors qu'ils rapportaient 4,8 kilos de cocaïne d'Espagne, ignorants que les policiers enquêtaient et attendaient le moment pour frapper.
L'enquête de la police démarre avec la surveillance de Thierry Derlan, un caïd niçois (tué en mai 2010). Sorti de prison, il rencontre deux compatriotes de la
Côte d'Azur installés à Marbella (l'un d'eux assassiné en Espagne en 2009).
Ils montent leur réseau "go-fast" pour acheminer d'Espagne cocaïne et cannabis, avec des véhicules dotés de caches sophistiquées, et se doteront d'un hélicoptère faisant des voyages nocturnes vers l'Atlas marocain.
Des acheteurs se greffent au réseau et même la 'Ndrangheta (mafia calabraise très présente sur la Côte d'Azur) marque son intérêt. La police détecte au moins trois passages vers la France de 450 kilos de cannabis.
Eric Jourdan et ses comparses tomberont les premiers. Portables, écoutes et indices conduiront à d'autres membres du réseau, dont un garagiste, un pilote d'hélicoptère ou des malfaiteurs notoires lourdement armés.