De plus en plus gros, luxueux, et nombreux à jeter l'ancre en Méditerranée: les bateaux de plaisance nuisent gravement à l'écosystème en labourant les fonds marins, poussant les autorités à encadrer leur mouillage.
Un constat qui résume tout le problème explique Pierre Boissery, de l'Agence de l'eau à Marseille."Une fois détruit, l'herbier ne se reconstitue pas"
De son côté Marc Verlaque , chercheur à l'Institut méditerranéen d'océanologie d'Aix-Marseille s'insurge et rajoute :
En jetant l'ancre dans les herbiers de posidonie, les yachts ravagent ce milieu naturel unique qui tapisse les fonds de Méditerranée, entre la surface et 40 mètres de profondeur."La posidonie c'est la forêt de la Méditerranée, et le mouillage des yachts, c'est comme passer des bulldozers au milieu, Les plaisanciers veulent mouiller dans les plus beaux coins du monde. C'est très joli à la surface, mais en-dessous, c'est une catastrophe"
Abritant une pléiade d'espèces, ces plantes endémiques aux longues feuilles vertes sont un trésor écologique, comparable selon les scientifiques aux récifs coralliens ou aux forêts tropicales. La plante aquatique, espèce protégée, ne pousse que de quelques centimètres par an et ne fleurit que quelques fois par décennies, mais rend de nombreux services. La "natte" qu'elle forme sur plusieurs mètres de profondeur offre un abri aux bébés poissons, capture le carbone, produit de l'oxygène, ses feuilles limitent l'érosion due aux vagues.
Une situation de plus en plus alarmante
Festival de Cannes, Grand Prix de Monaco, criques en Corse, chaque année des centaines de bateaux de luxe écument ces rendez-vous estivaux méditerranéens, renforçant la pression locale. Florian Houlon, d'Andromède Océanologie décrit une triste réalité :
"Outre l'impact de l'ancre, la chaîne d'un yacht, qui peut faire 200 mètres de long, laboure les fonds en fonction des vents et des mouvements du navire. C'est une catastrophe écologique honteuse en Méditerranée. Comme sous l'eau, que ça ne se voit pas, pendant longtemps personne n'a pris le sujet au sérieux. Tout le monde prend ça comme une pelouse"
Un an de prison et 150 000 euros d'amende
Face à cette situation les autorités préfectorales ont décidés de réagir et s'apprêtent à encadrer le mouillage des bateaux de plus de 24 mètres. Après une "phase de pédagogie", des zones d'interdiction de mouillage vont être déterminées département par département, et devraient entrer en vigueur à l'été 2020. Pour faire respecter l'interdiction par les skippeurs, et leurs donneurs d'ordre souvent très fortunés, une peine pouvant aller jusqu'à un maximum d'un an de prison et 150.000 euros d'amende est prévue.