Pas facile d'être confiné, encore moins quand on tutoie les grandes profondeurs. Comment l'apnéiste niçois vit-il cette période ? Eléments de réponse.
Il ne dort pas beaucoup depuis le confinement le 17 mars dernier qu'il respecte chez lui, dans sa ville natale de Nice. Depuis cette date, Guillaume Néry, 38 ans en juillet, reste à la maison. L'apnéiste adepte du poids constant, c'est-à-dire à la descente à la seule force musculaire avec palmes, sans lest, ni gueuse, ressent, dit-il dans un entretien accordé à l'AFP, le manque d'eau comme jamais.
Ce matin, j'ai eu du mal à me réveiller, plein d'épisodes d'insomnie. Je sens que la privation de liberté au niveau du corps a vraiment un impact fort. Ce qui est fou c'est que ça se manifeste de manière inconsciente, j'ai l'impression que j'arrive à bien le gérer au quotidien, je n'ai pas l'impression d'en souffrir mais ça s'exprime d'une autre manière.
Le coeur serré à regarder la mer
Auteur de quatre records du monde, dont le dernier à 126 m en 2015, Guillaume retient son souffle coupé pendant près 4 minutes quand il descend au-delà des 100 mètres.
NEW FRENCH RECORD -126m! pic.twitter.com/QyV9eDabTQ
— Guillaume Néry (@guillaumenery) September 8, 2015
Il a le coeur serré quand il regarde par la fenêtre la mer, qu'il pourrait rejoindre en seulement 10 minutes.
Coupé de la mer mais aussi de la montagne du parc national du Mercantour, "les deux univers dans lesquels j'aime m'exprimer, où il n'y a pas vraiment de limite", dit-il.
Je suis privé de ces deux sources essentielles à mon équilibre
explique le plongeur, descendu pour la première fois à 87 m en 2002.
Renouer avec la nature
J'ai fait pas mal d'expérience de privation. L'apnée c'est une expérience de privation, on s'arrête de respirer et quand on re-respire pour la première fois même si dans le temps c'est très court, cette première inspiration a une saveur particulière.
Le Niçois se remémore alors ces six semaines qu'il avait passées l'année dernière sur un bateau en Antarctique, comme un entraînement par rapport à cette période si particulière.
Je me souviens des derniers jours avant de mettre pied à terre à Ushuaia (à la pointe sud de l'Argentine), il y avait une espèce de montée, d'impatience et d'attente. Je savourais tout, un oiseau qui faisait piou piou, le premier café que j'ai pu boire, le premier croissant, marcher sur une distance supérieure à la longueur du bateau. C'était extraordinaire. Je m'imagine que ce premier retour à la mer aura cette saveur-là. Je pense que ça va être assez fort.
Peut-être même plus que lorsqu'il a débuté l'apnée. "La première fois finalement c'est un peu une découverte, on ne sait pas, là je sais exactement. Il y a une attente et elle peut potentiellement décupler le plaisir".