Avec un score de 57,3% la liste portée par Renaud Muselier a su s'imposer face à celle de Thierry Mariani. Nous revenons avec la politologue Christelle Lagier en 5 points clés sur ce scrutin marqué par une très forte abstention.
Lassitude post-Covid, défiance généralisée, illisibilité des scrutins, un peu de tout ça à la fois ? Malgré les appels au vote répétés de la classe politique, le second tour des régionales et départementales a confirmé dimanche une abstention record. Retour sur cinq points qui ont marqué ces élections régionales en Paca
- Une absention "abyssale" de 65,7%
Dans la lancée du premier tour, près de deux Français sur trois ne se seront pas rendus aux urnes. Pour Christelle Lagier, "il faut replacer la politique au coeur des préoccupations quotidiennes des citoyens. On parle peu politique dans les familles, à l'école, dans les collectifs, dans les associations ... Il faudrait réassocier à la politique tout ce qui concerne le quotidien."
Pour elle, il y a un phénomène d'érosion de la base de votants."On a plus que des petits noyaux qui se mobilisent. Aujourd'hui, les élus se partagent un petit gâteau, de plus en plus petit". L'explication selon cette politologue serait la baisse des électeurs constants. "La règle aujourd'hui, c'est l'électeur intermittent, celui qui va voter de temps en temps."
Christelle Lagier souligne également le fait qu'il a une perte de confiance des électeurs. "Il faut dire qu'il y a une grosse défiance de la classe politique". Elle rappelle à ce titre que les votes blancs et nuls "étaient très présents".
- Le RN défait, "pas une si grosse suprise que ça"
Coup dur pour le Rassemblement national, qui loin de remporter le scrutin, n'aura récolté que 42,7% du suffrage. "Si on fait un peu de sociologie électorale, on se rend compte que, déjà en 2017, le Rassemblement national marquait le pas au niveau des élections présidentielles mais surtout au niveau des législatives."
Ce scrutin est donc, selon Christelle Lagier, une "confirmation" que le RN "n'arrive pas à rassembler un électorat de droite, partagé entre LREM et Les Républicains".
La politologue explique que pour se dédiaboliser, le RN a dû "aller chercher des personnalités politiques ailleurs". Et dans les autres partis. Elle rappelle qu'il est "difficile de trouver des personnes qui peuvent représenter des listes et être candidat. Finalement la stratégie Mariani n'était peut-être pas la bonne, pour un parti qui prétend se démarquer et être antisystème."
- Une droite, "très à droite"
"Depuis une vingtaine d'années il y a une porosité droite/extrême droite qui est très forte." Alors si cette année une partie des cartes sont rebattues, pour Christelle Lagier, "ça se rejoue à la faveur des Républicains".
Alors est-ce que Renaud Muselier doit sa victoire au front républicain ou est-ce qu'il la doit à une recomposition de la droite qui se fait en sa faveur ?
Pour cette politologue, "vu les pertes du RN, je ne suis pas sûr qu'il n'est pas allé chercher des électeurs aussi de ce côté là, davantage que du côté des électeurs de gauche." Selon elle, il est clair que Muselier a "reconquis une toute petite partie du RN".
- Un Thierry Mariani qui n'a pas convaincu
"Thierry Mariani devait déjà rattraper le retard qu'il avait sur Marine Le Pen." Si Christelle Lagier ne nie pas qu'une partie des votants aient voulu faire barrage, elle pense surtout que la défaite du RN vient d'un électorat qui ne s'est pas mobilisé. "Mariani n'a pas convaincu, il faut voir le sermon qu'il a fait à son électorat en leur disant qu'ils étaient des mauvais citoyens."
Si elle concède qu'il y a "sans doute des électeurs de gauche qui ont voté pour lui", cela reste dans des proportions "très légères". "Il faut bien regarder l'abstention. Quand on regarde les scores, en nombre d'inscrits, ils recapitalisent pas tout leur électorat, mais ils ont moins démobilisé que le RN".
- Il faut rester "très prudent" avec les sondages
Près de 41 % des voix. C'est le résultat qui devait donner la victoire au Rassemblement national au second tour selon plusieurs sondages. Plus loin encore de la réalité le second tour devait voir s'affronter trois listes dont une liste Printemps du Sud soutenue par EELV, le PS, le PCF et LFI.
La question se pose alors sur la fiabilité des sondages. Christelle Lagier est claire : "il faut être prudent avec les sondages. Quand on réalise des sondages à plusieurs mois des élections, on ne connait pas encore les candidats, ni l'offre politique."
Pour cette spécialiste il se développe des "professionnels de la réponse. On est dans une gratification de la réponse."
En résulte selon elle, que le public touché n'est pas représentatif de l'électorat. "On se retrouve avec des déformations. Il y a des catégories de la population qu'on atteint pas, par exemple les catégories populaires et les jeunes."