Témoignages. "Depuis bientôt un an, je ne prends aucun risque", les personnes obèses dans la peur du Covid

Ce 4 mars a lieu la journée mondiale de lutte contre l'obésité. Selon une étude du CHRU de Lille, 47% des patients qui entrent en réanimation à cause du Covid sont en situation d’obésité. Une situation angoissante pour ces malades. Témoignages.

"Depuis bientôt un an, je ne prends aucun risque. Je ne sors que pour quelques courses, c’est très angoissant !"

Catherine Fabre est la présidente de l’association Histoire de Poids installée à Lançon-de-Provence (Bouches-du-Rhône). En 2013 on lui a retiré une grande partie de l’estomac pour former un tube. Cela s’appelle une Sleeve gastrectomie. Elle pesait alors 130 kg.

Le parcours du combattant n’est pas fini pour autant et elle crée alors son association pour accompagner les personnes obèses, qu’elles aient été opérées ou non. Aujourd’hui, à 54 ans, Catherine est toujours en situation d’obésité, elle pèse une centaine de kilos. Son combat continue malgré la pandémie.

Le télétravail en geste barrière

Avec le coronavirus son association est en sommeil. Forcément. Terminées les balades en forêt qui rassemblaient une douzaine de marcheurs le week-end. Ces rendez-vous conviviaux et familiaux se sont arrêtés.

Mais Catherine Fabre continue à répondre aux appels. "Je reste à disposition, j'organise des visio, car il faut tenir". Surpoids et obésité augmentent les risques pour la santé des personnes positives au Covid-19. (vous pouvez la joindre aussi par mail : histoiredepoids13680@gmail.com)

"Au bout d’un an, c’est très dur de tenir sur la durée. Parfois je réalise que je suis en train de me frotter la joue et je ne devrai pas. Pourtant quand je dois aller dans un magasin je me mets du gel, à l’entrée et en sortant, j’en mets partout, sur la barre du caddie. Une fois chez moi je passe tout sous l’eau, j’attends une heure avant de mettre les produits au frigo". Des gestes barrière préconisés pour tous, mais plus encore lorsqu’on est situation de surpoids.

Malgré cette angoisse du quotidien, Catherine Fabre se considère comme une privilégiée. Fonctionnaire, elle est en télétravail depuis le premier confinement et limite ses contacts avec l’extérieur. Une prise en compte de sa situation à risque qui n’est pas possible pour toute la population.

Plus 3 kilos en quatre semaines

Autre lieu, même histoire. À Sarrian (Vaucluse), Jean-Laurent Picard est aide-soignant dans une unité de dialyse. Il n’a jamais cessé de travailler. Le 13 janvier dernier, les premiers symptômes apparaissent. Il se rend aux urgences Covid de Carpentras où le résultat de son test antigénique est positif. À 32 ans il pèse 113 kg pour 1m76. Son indice de masse corporelle (IMC) est de 36.5 : il est donc considéré en obésité sévère. (Pour calculer son IMC voir plus bas)

Son obésité est favorisée par un traitement à la cortisone contre un cancer des glandes surrénales. Avec le coronavirus et malgré une fatigue intense, une toux importante et des poumons atteints, Jean-Laurent ne sera pas hospitalisé. Suivi à domicile il va alors prendre trois kilos en quatre semaines. "Les gens en surpoids doivent être très vigilants".

Aujourd’hui l’ancien malade du Covid a repris son activité professionnelle comme avant. Il se fera vacciner d’ici deux ou trois mois. Et reste très positif. "Je n’avais pas plus peur que ça, et cela est toujours vrai".

Un phénomène majeur

Marc Léone est chef du service d’anesthésie-réanimation à l’hôpital Nord de Marseille. Il l’a constaté très vite : "Dès le début de la pandémie, la place des personnes obèses en réanimation est devenue un phénomène majeur". 

Et pas forcément celles dont le poids relève de l’obésité morbide ou extrême. "Un dépassement léger du poids de forme, autour de 28 – 30 d’IMC suffit à voir se développer les formes les plus graves du Covid, peu importe l’âge des patients".

Les témoignages se multiplient. Depuis des mois les associations qui viennent en aide aux personnes en surpoids ou obèses reçoivent des appels de détresse. C’est le cas de Catherine Fabre. Avec son association elle est membre de la Ligue contre l’obésité qui rassemble 9000 bénévoles.

Ce matin elle avait encore en ligne une personne de la région de Salon-de-Provence. Toute la famille a été touchée par le Covid, heureusement sans aucune gravité. Sauf pour le père âgé de soixante ans et obèse. Hospitalisé dans un premier temps à Salon puis transféré en urgence à Marseille, il a été placé dans le coma pendant trois semaines. Il en est sorti il y a deux jours à peine.

  • Aller plus loin : calculez votre IMC

 Pour calculer votre indice de masse corporelle, vous devrez renseigner votre sexe, âge, taille et poids. L'Organisation mondiale de la santé (OMS) a défini cet indice comme le standard permettant d'identifier les problèmes de poids.

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Le cri d’alarme des associations

Le 4 mars est consacré journée mondiale contre l’obésité. Les associations se mobilisent plus que jamais et lancent même un cri d’alarme. Selon le Collectif National des Associations d’Obèses (CNAO) qui rassemble une cinquantaine de structures en France, 40 % des personnes décédées des suites du Covid étaient obèses.

Une étude du CHRU de Lille réalisée lors du premier confinement précise : "Plus de 47 % des patients infectés entrant en réanimation sont en situation d’obésité et la forme sévère (à savoir un IMC supérieur à 35) augmente significativement le risque d’être placé sous respiration mécanique invasive, indépendamment de l’âge, de l’hypertension artérielle et du diabète."

Pour la Présidente du CNAO, Anne-Sophie Joly "l’obésité doit d’abord être reconnue en France comme une maladie chronique" comme la définit l’OMS (Organisation Mondiale de la Santé). Pourtant aux yeux de l’assurance maladie, ce n’est pas une affection de longue durée.

Selon Anne-Sophie Joly, le constat est alarmant et sans appel : "si elle avait fait le choix d'une véritable prise en charge de l'obésité en tant que maladie chronique, comme notre collectif le réclame depuis des années, la France n'afficherait pas aujourd'hui le chiffre funeste de 86.000 morts du Covid-19."

O pour Obésité

La journée mondiale contre l’obésité est l’occasion de se mobiliser encore une fois. Avec la pandémie, elle est devenue un enjeu majeur de santé publique. Les manifestations vont se multiplier partout en France. Parmi les nombreuses initiatives, le challenge connecté "Kilomètre contre l’obésité" de la Ligue.  Marchez, courez, nagez, pédalez... et enregistrez votre effort !

Sept millions de Français adultes, soit 15 % de la population sont atteints d’obésité (source étude épidémiologique ObEpi-Roche 2012). Pour changer le regard sur cette pathologie et combattre la discrimination, Catherine Fabre et sa famille invitent le maximum de personnes à se prendre en photo en arborant le signe O pour Obésité.

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