Neuf mois de prison avec sursis ont été requis ce lundi devant le tribunal correctionnel de Marseille contre l'ancien médecin-chef de l'école des plongeurs-démineurs de la Marine nationale à Saint-Mandrier (Var). La décision a été mise en délibéré au 16 novembre.
Le médecin major Pierre Louge, 51 ans, décrit comme "le pape de la plongée sous-marine militaire", était jugé pour "blessures involontaires" après le grave accident de désaturation d'un élève plongeur survenu le 25 octobre 2007 dans la rade de Toulon.
Le procureur, Max Gazan, a également réclamé une interdiction d'exercer toute activité médicale en lien avec la plongée durant six mois contre ce médecin auquel il est reproché d'avoir tardé à établir le diagnostic d'accident de décompression et de ne pas avoir immédiatement placé la victime dans le caisson hyperbare d'une vedette de la marine présente sur le site de l'exercice.
La victime, un enseigne de vaisseau aujourd'hui âgé de 38 ans, participait comme chef de palanquée à une plongée en eau profonde à moins 60 mètres. Victime d'un accident de désaturation affectant la moëlle épinière, il a subi une incapacité totale de travail durant dix-sept mois et il est aujourd'hui pensionné à 100 % par le ministère de la Défense.
La douleur c'est dans la tête
Avant de plonger, la victime avait consulté le Dr Louge, ayant reçu environ une heure plus tôt un violent coup au thorax lors d'un entraînement de judo.
En dépit d'une douleur alléguée lors d'une auscultation rapide, le jeune militaire avait été déclaré apte à plonger, s'entendant répondre par Pierre Louge : "La douleur c'est dans la tête".
A l'apparition des premiers symptômes neurologiques, le médecin chef avait préféré rentrer à l'école de plongée située à 2. 600 mètres du "chantier" pour une prise en charge "plus confortable" que dans le caisson sur place. Selon les experts judiciaires, ce retard a conduit à l'aggravation des lésions.
Les instructions de la Marine nationale prescrivent "le délai le plus court possible" pour procéder à une recompression, préconisant même 3 mn.
Présent à l'audience, la victime, en uniforme, a rapporté une confidence que Pierre Louge aurait faite le lendemain à un infirmier hyperbariste : "J'ai fait une grosse connerie et je vais ramasser".
Quatre experts en médecine hyperbare ont contredit cette notion d'urgence. Ce dogme de la recompresion la plus rapide possible serait uniquement "pédagogique", en l'absence de médecin.
Tous ont été unanimes à soutenir que ces dix à quinze minutes de retard n'ont pas eu d'impact sur l'évolution gravissime de cet accident de plongée.
"Je ne crois pas que la victime ait perdu une chance, a estimé un expert cité par le parquet. Cela n'a rien changé, l'état de la victime se serait aggravé pareillement".
Mais pour Me José Allegrini, défenseur du militaire invalide, "si Pierre Louge avait respecté les prescriptions médicales qu'il enseignait la semaine précédant l'accident, la victime ne serait peut-être pas ce qu'elle est, un vieillard qui n'a pas 40 ans".
De son côté, la défense a plaidé la relaxe du médecin-chef. - avec AFP -