Dans le Var, l'agglomération de Draguignan s'est lancée dans une démarche vertueuse : elle transforme les déchets verts en broyat. Ce broyat est ensuite livré gratuitement aux viticulteurs ou aux arboriculteurs du secteur, qui l'utilisent pour enrichir leurs sols ou les protéger de la sécheresse.
Dans le champ de Vincent Galliano, viticulteur et président de la Cave coopérative de Taradeau (Var), l'énorme broyeur s'est mis en marche. En quelques minutes, il transforme les déchets verts présents sur place (arbustes, feuilles sèches, petits bois issus de la taille...) en broyat.
Un substrat 100% végétal qu'il utilise pour enrichir le sol de ses vignes, et surtout de ses plantations maraîchères. Cela permet de réduire de six fois le volume initial des déchets. Et, surtout, de les réutiliser.
Je me suis fait livrer une centaine de camions, soit environ 3.000 m3 de broyat. On a des terrains qu'on prépare pour la culture de la vigne, on va sûrement encore en utiliser pour enrichir la terre.
Vincent Galliano, viticulteur
Un broyat qu'il stocke pour l'instant à l'arrière de son exploitation et qu'il laisse lentement se transformer en compost avec le temps.
Fabrication 100% locale
Autour de lui, d'autres agriculteurs (viticulteurs, oléiculteurs, maraîchers) l'écoutent avec attention. Tous ont été invités par Dracénie Provence Verdon Agglomération (DPVA). Objectif : les inciter à tester ce nouveau produit, fabriqué dans les déchetteries, et notamment dans celle des Arcs-sur-Argens.
Jusqu'en 2022, les déchets verts étaient broyés, puis emmenés par camions sur la plateforme de compostage du groupe Pizzorno à Cabasse, dans le centre Var.
Mais depuis cette année, les déchets verts sont gérés directement en régie par l'agglomération. En se passant des services d'un prestataire, cela lui a permis d'économiser 1,2 millions d'euros et d'acheter un broyeur mobile, un camion de livraison de 26 tonnes, et de constituer une équipe locale de 6 personnes, dédiée à cette nouvelle activité de valorisation des déchets.
Très utile contre la sécheresse
Désormais, l'agglomération produit donc environ 1.000 tonnes de broyat par mois. "Un chiffre qui ne faiblit pas", selon Camille Leau, responsable d'exploitation au Service de prévention et de valorisation des déchets de DPVA.
Ces investissements nous ont permis d'obtenir un broyat de qualité que l'on broie deux fois pour qu'il soit plus fin et plus facile à utiliser. Il est aussi analysé et a décroché la norme NFU 44051, qui permet son utilisation par les agriculteurs, même ceux classés en bio ou en Haute valeur environnementale (HVE).
Camille Leau, responsable d'exploitation DPVA
Objectif : que la matière soit collectée, transformée et surtout réutilisée sur le même territoire. Une démarche vertueuse, à condition désormais que les agriculteurs s'en emparent.
Pour l'instant, 15 à 20 d'entre eux commandent régulièrement du broyat. Ils l'utilisent pour enrichir leur sol, mais aussi pour lutter contre la sécheresse. C'est le cas de Rémy Rouvier, viticulteur et oléiculteur au Domaine de Lamanois, une exploitation de 45 hectares située près du col de l'Ange, à Draguignan.
Lui l'utilise surtout en paillage, pour garder l'humidité du sol et se protéger contre la sécheresse et le manque d'eau, criant dans le Var.
J'en dépose environ une couche de 20cm dans les vignes, et ça marche bien. Cela évite la pousse des mauvaises herbes et, surtout, ça permet de garder l'humidité. Dès qu'on a une pluie, l'eau s'infiltre et la vigne en profite plus longtemps
Rémy Rouvier, viticulteur et oléiculteur
Fort de ces premiers succès, l'agglomération et la chambre d'agriculture du Var espèrent désormais convaincre plus largement les agriculteurs. En Dracénie, 70 domaines viticoles pourraient à terme être intéressés, sans compter tous les arboriculteurs, oléiculteurs et maraîchers de ce territoire, entre ville et campagne.
Les particuliers peuvent aussi en profiter
Mais ils ne sont pas les seuls concernés. Car le broyat est aussi accessible aux particuliers.
Ils peuvent ainsi en récupérer directement dans les déchetteries, notamment celle des Arcs sur Argens et de Callas. Et des livraisons à domicile sont même possibles, mais uniquement à condition qu'ils en commandent en grande quantité (minimum un camion entier de 19 tonnes).
À l'avenir, d'autres échanges entre les services de DPVA, les agriculteurs et le grand public sont prévus, pour "démocratiser" la pratique, et toucher à terme un maximum de public.
"L'idée, c'est de faire se rencontrer l'offre et la demande", explique Nelly Joubert, responsable du service environnement à la Chambre d'Agriculture du Var.
La distribution de composteurs se poursuit
Une politique volontariste, qui se veut un complément à celle qui vise à développer le compostage en Dracénie. La distribution très active de composteurs à destination des habitants de l'agglomération, qui vise là aussi à la réduction globale des déchets.
Initiée il y a quelques mois, notamment à La Motte, la campagne de distribution des composteurs (moyennant 10 euros) se poursuit à un rythme soutenu au sein des 28 villages de l'agglomération.