Introduire des espèces d’arbres non endémiques sur la Côte d'Azur : bonne ou mauvaise idée ?

Les travaux sur la Promenade des Bains à Saint-Raphaël, s'étendant sur 4 km entre Santa Lucia et Port Fréjus, vont transformer le littoral varois. Le projet prévoit la plantation de 1.000 arbres, dont une partie non-négligeable d'espèces exotiques. On vous explique les raisons de ce choix.

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Une partie du littoral varois s’apprête à se transformer avec un ambitieux projet de requalification paysagère sur la Promenade des Bains. Sur une bande de 4 kilomètres entre Fréjus et Saint-Raphaël, une végétalisation massive est prévue, avec un peu plus de 1 000 arbres plantés.

Le projet prévoit la plantation de 50 essences différentes, choisies notamment pour leur adaptation au climat méditerranéen et leur résistance à la sécheresse. Parmi elles, le Chorisia insignis, un arbre sud-américain à l’apparence spectaculaire, aussi appelé "arbre bouteille". Celui-ci vient d'être planté en grande pompe à Saint-Raphaël.

Si ce choix s’inscrit dans une longue tradition d’introduction de plantes exotiques sur la Côte d’Azur, il peut susciter des interrogations sur son impact écologique et son intégration dans l’écosystème local. L’architecte-paysagiste derrière ce projet nous répond.

Un projet écologique ou un pari risqué ?

Selon Vincent Guillermin, paysagiste en charge du projet, cette requalification est exceptionnelle par son ampleur et son ambition : "Il y aura bien 1 000 arbres, et même un petit peu plus. C’est un projet exceptionnel, car c’est le seul projet qui relie trois ports."

Cette transformation paysagère s’accompagne d’une forte volonté de créer un espace agréable (zones ombragées, modes de mobilité douce) capable de s’intégrer dans son environnement. "On va multiplier la biodiversité de manière considérable. (…) L’eau de pluie n’ira plus dans les tuyaux mais dans les sols. Toutes les eaux pluviales venant des zones piétonnes vont profiter aux végétaux."

Le choix d’introduire des arbres comme le Chorisia insignis répond aussi à une logique d’adaptation au réchauffement climatique. Son tronc, capable de stocker l’eau, lui permet de résister aux sécheresses.

Malheureusement, notre climat va vers la chaleur et le manque d’eau, et ces arbres exotiques tiennent bien à la sécheresse. Donc oui, ils seront de plus en plus adaptés à notre climat.

Vincent Guillermin, paysagiste en charge du projet

à France 3 Côte d'Azur

L’arbre-bouteille (Ceiba insignis) est aussi dénommé Chorisia jaune ou kapokier. Son tronc est couvert d'épines. © Maxime Meuneveaux FTV

Dans le cadre de ce projet, l’intégration d’arbres exotiques s’inscrit également dans une réinterprétation contemporaine de l’histoire botanique locale. "On s’est inspiré de la Belle Époque, à la fin du 19ᵉ siècle, quand les Anglais ont implanté des arbres exotiques sur la Côte d’Azur. Dans les vieux jardins Belle Époque de Saint-Raphaël, vous retrouvez des essences végétales exceptionnelles."

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Ce n’est ainsi pas un hasard si le Chorisia insignis a été choisi, nous explique-t-il. À Menton par exemple, un spécimen planté il y a plusieurs années est devenu "la mascotte du projet", faisant la preuve de sa capacité d’adaptation. Toutefois, la réussite de cette implantation dépendra des conditions spécifiques du littoral varois.

Vincent Guillermin se veut rassurant : "On essaye de redonner de la vie... On désartificialise en réalité !"

Les travaux d'aménagement auront lieu jusqu'en décembre 2025. © Maxime Meuneveaux/FTV

Le risque des espèces envahissantes : menace réelle ?

Le projet insiste Vincent Guillermin, ne se limite pas aux espèces exotiques : "La végétation méditerranéenne est conservée, mais on y ajoute de la végétation exotique, insiste le paysagiste. La moitié des 1 000 arbres plantés seront exotiques."

Ce choix pourrait faire débat parmi les défenseurs de la flore endémique varoise, qui craignent que certaines espèces prennent trop de place et concurrencent les chênes verts, pins d’Alep ou oliviers. Historiquement, certaines espèces introduites sur la Côte d’Azur ont fini par déséquilibrer les écosystèmes locaux.

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Si le Chorisia insignis ne présente pas encore de risque avéré d’invasion, sa croissance rapide et sa résistance pourraient à terme poser des questions sur son impact.

"Chaque arbre est un individu. (…) Quand vous plantez 1000 arbres sur 4 kilomètres et qu’un nouveau cordon végétal se crée, c’est très bon pour les corridors écologiques. Cela crée un biotope, pour les oiseaux ou les vers par exemple."

L’introduction de ces arbres insiste le paysagiste, ne se fait pas sans précautions. "Pas un seul végétal n’a pas son passeport phytosanitaire." Par ailleurs, l’irrigation de ces arbres sera temporaire : "Les végétaux seront arrosés pendant 3 ans le temps qu’ils se mettent en place, puis on coupera l’arrosage. Ce n’est pas un jardin sur 4 km de long, ça ne va pas nécessiter énormément d’eau pendant plusieurs années."

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Cette végétalisation de la Promenade des Bains marque une réinvention du paysage urbain de Saint-Raphaël.

"C’est un projet de 18 hectares. Le seul projet qui s’approche de cette requalification, c’est celui de la Croisette à Cannes."

Ces travaux de réaménagement seront terminés d'ici la fin de l'année 2025.

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