L'hôpital d'Annecy site pilote en France pour le prélèvement d'organes "à coeur arrêté"

C'est une première en France. Le Centre Hospitalier d'Annecy est autorisé à prélever des organes sur une personne décédée par "arrêt du cœur contrôlé", c'est-à-dire après limitation ou arrêt des traitements. De nouvelles possibilités de greffe qui posent plusieurs questions éthiques. 

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Ce type de prélèvement, "à coeur arrêté" ou coeur non battant", n'était pas pratiqué jusqu'à présent en France, contrairement à de nombreux autres pays comme les Etats-Unis, les Pays-Bas, la Belgique, le Royaume Uni ou l'Espagne. Cette nouvelle possibilité pourrait augmenter le nombre d'organes disponibles pour la greffe dans notre pays. Mais elle pose aussi des questions éthiques. Il s'agit de prélever des organes après un arrêt cardiaque "consécutif à une décision d'arrêt programmé des traitements en raison de leur pronostic". 

Reportage Bernard Portugal et Frédéric Pasquette
Intervenant : Didier Dorez Médecin coordinateur des prélèvements d'organes et de tissus Centre Hospitalier Annecy Genevois

Pour encadrer cette nouvelle possibilité, et pour éviter toute crainte d'une "euthanasie utilitaire", l'Agence de la Biomédecine précise, dans son protocole, qu'il ne doit y avoir aucun lien entre l'équipe de réanimation qui décide de stopper les traitements, et celle qui s'occupera du prélèvement d'organes. Un sas étanche. De plus, la démarche auprès des proches est réalisée avec un délai entre l'information sur la décision d'arrêt programmé et celle du don d'organes. "Le processus de prélèvement n'accélère en rien le décès", souligne l'Agence de Biomédecine. 

En France, le taux de refus des familles augmente"






Aujourd'hui en France les délais d'attente pour une greffe restent longs. En moyenne, l'attente pour une greffe de rein est de 3 ans. Plus globalement, en 2013, 5.123 greffes d'organes ont été réalisées, alors que 18 976 personnes ont eu besoin d'une greffe. Le second Plan Greffe 2012-2016 affiche des objectifs ambitieux: +5% de greffes chaque année. C'est dans ce cadre que s'inscrit désormais le prélèvement après "arrêt contrôlé". Mais la Fédération Nationale d'Aide aux Insuffisants Rénaux prévient: "En France, le taux de refus des familles augmente." Il faudra donc informer encore mieux les familles. 
 
Dès 1995, constatant l’insuffisance du nombre d’organes à transplanter, des chirurgiens de l’hôpital universitaire de Maastricht, aux Pays-Bas, avaient publié des résultats des greffes réalisées à partir des organes prélevés sur des sujets décédés par arrêt cardiaque devenu irréversible. Depuis, de nombreux autres hôpitaux étrangers s'y sont mis. Ce type de prélèvement a permis, selon l'Agence de Biomédecine, d'augmenter de 10 à 40% le nombre de greffons disponibles. Aux Pays-Bas, il représente environ 51% des prélèvements et 38% au Royaume-Uni.

Les 7 recommandations du Comité Consultatif National d'Ethique
1) Diffuser bien plus largement l’information sur les conditions légales du prélèvement post mortem et inciter les gens à parler de leur position à leurs proches pour que ces derniers puissent mieux témoigner de la volonté du défunt auprès du personnel de la coordination hospitalière responsable du
prélèvement.

2) Maintenir une séparation nette entre les équipes de la réanimation -dont l’objectif ne doit être que l’intérêt du patient- et les équipes du prélèvement qui interviennent de façon seconde, après constat de la mort et qui doivent, en fin d’intervention de prélèvement d’organes, veiller à la meilleure restitution tégumentaire possible du corps.

3) Améliorer l’information intra et inter hospitalière sur les circonstances de la mort susceptibles de donner lieu à des prélèvements d’organes post mortem.

4) Insister sur le lien que suppose le don d’organes. Le don se fait dans le cadre de liens sociaux réels. Les responsables de la coordination de la transplantation,
trop peu nombreux en France, doivent assurer le suivi des donneurs vivants bien après le don. La chaîne du don est une chaîne de liens.

5) Préciser le vocabulaire change la perception de la réalité. Aussi serait-il préférable de substituer à l’inexactitude de l’expression « don cadavérique » celle
plus conforme à la réalité de « prélèvement d’organes post mortem ». Par ailleurs, le maintien du vocabulaire économique de la « pénurie » semble préjudiciable au
principe éthique de non patrimonialité du corps et de gratuité du don.

6) Redoubler de prudence dans l’éventuel débat éthique relatif à la catégorie III de Maastricht : la loi du 22 avril 2005 dite loi Leonetti sur la limitation et les arrêts de traitement tant attendue n’équivaut pas à une autorisation de prélèvement dans cette situation. Seule une compréhension en profondeur de cette loi peut retirer toute suspicion à son égard.

7) Renforcer la confiance de l’ensemble de la société dans le dialogue mené par le personnel de la coordination hospitalière responsable du prélèvement. Ce dialogue demande une grande compétence ; il ne doit jamais apparaître comme une intrusion dans la vie intime des proches du défunt, mais comme un accompagnement dans le deuil, que le prélèvement ait lieu ou non.

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