Un phénomène de saison: beaucoup d'avalanches, et beaucoup de secours. Pour le capitaine Poirot, du PGHM d'Annecy, il faut sanctionner la prise de risque inconsidérée. Plus d'une fois, les autorités ont porté plainte contre des imprudents et ont eu gain de cause.
Des opérations comme celle-ci, les secours y font face presque tous les jours en ce moment. Le dimanche 1er février au soir, dans le massif du Parmelan, un couple de randonneurs à ski s'est engagé dans un itinéraire déconseillé, rapporte le Dauphiné Libéré. Ce, malgré les appels à la prudence des autorités et des services de secours de Haute-Savoie, toute la semaine.
Le PGHM d'Annecy a dû intervenir sur site, et chaque intervention présente une prise de risque pour l'équipe de secours. Le Capitaine Patrick Poirot, du PGHM d'Annecy, a accordé un entretien à France 3 Alpes, au sujet des poursuites judiciaires contre les skieurs imprudents.
Allez-vous porter plainte contre ce couple?
Je ne dis pas que je vais, moi, porter plainte. Je dis que je me réserve la possibilité d'engager des poursuites, en tant qu'officier de police judiciaire, et en accord avec les autorités judiciaires. Il est arrivé dans plusieurs cas que nous engagions des poursuites et qu'elles aboutissent.De quelles prises de risque parle-t-on?
Partout dans les Alpes, il y a des appels à la vigilance à cause de très forts risques d'avalanche [ndlr: risque 4 sur 5 ce mardi]. Les autorités font des recommandations, appellent les skieurs à ne pas aller en montagne, à ne pas faire de hors piste et à rester sur des secteurs sécurisés. A Annecy, cet appel n'est pas forcément très suivi. Un grand nombre d’accidents s'est produit, qui a fait je ne sais combien de victimes ce week-end et les quelques jours écoulés [ndlr: 18 décès en janvier 2015].Porter plainte, pour quelle utilité?
Si en dépit de tous ces appels à la vigilance par les autorités, qui ne sont quand même pas fait aux hasard, nous constatons que cela ne fonctionne pas, nous voulons montrer qu'il existe un "dispositif judiciaire" mis en oeuvre contre ces personnes qui n'écoutent pas ces conseils. Si malgré tout elles sortent des pistes, vont pratiquer dans un lieu où il n'est pas recommandé d'aller, et qu'il se passe quelque chose...les secours doivent intervenir.Bien sûr, il y a tous ces gens que nous n'avons pas eu à aller chercher, des gens qui s'en sortent seuls. Mais si fatalement, on fait appel aux services de secours, ces personnes doivent prendre leurs responsabilités. Quand les recommandations ne suffisent pas, il faut un dispositif judiciaire. Il faut que les gens sachent que les autorités ont la capacité d'engager des poursuites vis-à-vis de leur prise de risque inconsidérée, lorsque tous les éléments sont réunis.
A-t-on réellement conscience du danger de nos jours?
Je ne veux pas être pessimiste. Depuis des années, les services de secours, l'ANENA et les autres associations multiplient les campagnes de sensibilisation. L'équipement de sécurité (DVA ou ARVA, pelle, sonde...) est de plus en plus utilisé. J'ai la conviction que toute cette prévention, cette information mise en oeuvre dans la France entière et dans l'arc alpin a été utile.Néanmoins, il reste une frange de la population un peu sourde à ces appels à la prudence. Dans des cas particuliers caractérisés, il faut montrer la capacité gendarmes, de la police et des secours, en relation avec les autorités judiciaires, à engager des poursuites contre ces personnes imprudentes. Un certain nombre de poursuites a déjà été engagé, mais nous ne sommes pas forcément informés des suites de l'enquête.
Comment se déroule l'enquête?
L'enquête retrace les conditions précises de l'accident et détermine s'il y a eu prise de risque. On pense souvent qu'il faut qu'il y ait eu des conséquences, des blessures graves, un décès, un grand préjudice pour qu'une enquête soit ouverte, mais pas forcément. Même s'il n'y a pas d'infraction de la loi pénale, on engage le fait d'avoir fait prendre un risque inconsidéré à autrui.Reportage Jean-Christophe Solari et Dominique Bourget