Abd al Malik est nommé dans la catégorie du meilleur premier film au César 2015 pour son film "Qu’Allah bénisse la France". Les César seront décernés le 20 février à Paris.
Les nommés dans la catégorie meilleur premier film
- Les Combattants, Elle l’adore (Jeanne Herry)
- Fidelio, l’odyssée d’Alice (Lucie Borleteau)
- Party Girl (Marie Amachoukeli, Calire Burger, Samuel Theis)
- Qu’Allah bénisse la France (Abd Al Malik)
L'entretien avec Abd al Malik sur son film réalisée le 3 novembre
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L'avant-première du film d'Abd al Malik à Strasbourg le 3 novembre
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"Qu'Allah bénisse la France": le rappeur Abd al Malik déploie "sa" banlieue sur grand écran"
Il a grandi dans une banlieue dite "sensible", où il a été à la fois un élève brillant et un délinquant, puis une star du rap prônant un vivre ensemble pacifié: dans "Qu'Allah bénisse la France", le rappeur strasbourgeois Abd al Malik a adapté au cinéma le récit de son parcours. Dans cette chronique sociale et personnelle, Régis Fayette-Mikano, devenu Abd al Malik après sa conversion à l'islam, a filmé "sa" cité du Neuhof à Strasbourg, avec plusieurs comédiens amateurs et plus de 200 figurants recrutés localement.On y suit le cheminement initiatique du jeune Régis - campé par Marc Zinga, 30 ans, un acteur de théâtre qui a interprété Mobutu à la télévision et a donné la réplique à Benoît Poelvoorde au cinéma. Le jeune garçon, partagé entre l'amour des livres et la délinquance, entre la soif d'absolu et le prosélytisme religieux, saura trouver l'apaisement dans le mysticisme et l'amour.
Dans son film, rythmé notamment par le rap de son frère Bilal et l'électro de Laurent Garnier, l'écrivain, musicien et cinéaste de 39 ans donne à voir la misère sociale et la violence, mais entend aussi porter un message d'espoir et "donner un coup de pied aux stéréotypes et à la bêtise". L'idée était d'adopter "une démarche positive, mais sans faire le déni des problématiques sociales" et de "montrer que l'humanité ne s'arrête pas à la frontière des cités", résume Abd al Malik. Il revendique une "démarche politique, militante, mais aussi esthétique", car il a voulu montrer "la beauté des cités".
En noir et blanc, comme dans "La Haine"
"Quand on vit en France, aller normalement à l'école, vivre la mixité sociale, pouvoir grandir par le canal du savoir, ça devrait être normal !", souligne l'ancien étudiant en philosophie, qui dans son enfance a lui-même été "extrait" du Neuhof en raison de ses bons résultats scolaires, afin de poursuivre ses études dans des établissements catholiques. "Quand on vit dans des quartiers comme le Neuhof, on est victime d'une misère qui peut être sociale, mais aussi spirituelle, affective, et on n'a pas les outils permettant de transcender notre condition: ça, c'est gravissime !", dénonce-t-il.
Pour ce premier film très personnel, l'artiste d'origine congolaise, qui décrocha la Victoire de l'interprète masculin de l'année en 2008, a fait le choix de tourner en noir et blanc, comme Mathieu Kassovitz dans "La Haine" en 1995. Une référence qu'il revendique: "C'est un film qui a été important pour nous. Au Neuhof nous étions tous allés le voir, car il parlait de nous !", se souvient Abd al Malik. Comme son titre l'indique, "Qu'Allah bénisse la France" - adapté de son livre homonyme et autobiographique de 2004 - aborde aussi la quête spirituelle de l'auteur, passé d'une éducation catholique à un islam d'abord rigoriste et prosélyte, puis apaisé, mystique et pacifique. Une thématique que le film aborde toutefois de manière beaucoup plus éludée que dans le livre.
"Le cinéma est sans filtre, et je ne voulais pas tomber dans ce qui aurait pu apparaître comme une tentative de manipulation du spectateur, ou comme du prosélytisme. Ce qui m'intéresse c'est de poser des questions, pas de donner des réponses", explique le réalisateur. Le film met toutefois l'accent sur la nécessaire cohabitation pacifique des croyances, comme dans cette scène où le jeune Abd al Malik et ses frères,
tous convertis à l'islam, prient ensemble avec leur mère catholique. "Ce film se propose de refaire du lien, c'est un combat pour le vivre ensemble", assure le rappeur. Quant au titre, il est à prendre "au premier degré": "Je suis musulman et j'aime la France !".