Trois projets d'installation d' éoliennes en Périgord vert sont sujet à débat. L 'un d'entre eux vise plusieurs sites dans la Double, de Parcoul à Echourgnac et Eygurande.
Tous ces projets sont initiés par des filiales de groupes privés qui sont assurées de pouvoir revendre leur production à EDF à un prix garanti. Les tenants du projet mettent en avant l'intêret de nouvelles recettes pour faire face aux contraintes budgétaires des communes rurales. Les propriétaires de terrains voient aussi d'un bon oeil les loyers qu’ils pourraient percevoir. Tous ces acteurs en tout cas mettent en avant l'argument du développement durable.
Mais leurs contradicteurs défendent l'option d'un territoire encore sauvegardé et s'en inquiètent. Ils craignent la brèche ouverte qui va conduire à une multitude de machines et défigurer ces paysages jusque sauvegardés. Ils redoutent les divers impacts environnementaux, en particulier sur la faune et sur la santé des voisins de ces éoliennes.
Le projet le plus avancé concerne le territoire de Champagne-Fontaine-La Rochebeaucourt avec 5 machines culminant à 160 mètres (mât + pale). Le second pourrait voir le jour entre Verteillac et Cherval près de La Guide. Le troisième vise plusieurs sites dans la Double, de Parcoul à Echourgnac et Eygurande.
Trois projets éoliens pourraient transformer profondément le Périgord vert à court terme.
Le plus avancé concerne le territoire de Champagne-Fontaine-La Rochebeaucourt avec 5 machines culminant à 160 mètres (mât + pale). Le second pourrait voir le jour entre Verteillac et Cherval près de La Guide. Le troisième vise plusieurs sites dans la Double, de Parcoul à Echourgnac et Eygurande.
Tous ces projets sont initiés par des filiales de groupes privés internationaux assurées de pouvoir revendre leur production à EDF à un prix garanti. Ces projets sont favorisés par certains élus locaux à la recherche de ressources nouvelles pour faire face à leurs contraintes budgétaires. Ils sont enfin facilités par des propriétaires de terrains intéressés par les loyers qu’ils pourraient percevoir. Tous ces acteurs brandissent la menace nucléaire et le développement durable pour défendre des intérêts très financiers. Mais les amoureux d’un territoire encore sauvegardé s’inquiètent. Ils craignent la brèche ouverte qui va conduire à une multitude de machines et défigurer nos paysages. Ils redoutent les divers impacts environnementaux, en particulier sur la faune et sur la santé des voisins de ces éoliennes. Ce dossier a pour but de dévoiler le dessous des cartes et d’analyser les différents enjeux économiques, touristiques et environnementaux de ces projets.
Les projets
Champagne-Fontaine / La Rochebeaucourt
Ce projet est développé par la société EOLE-RES basée à Avignon, et filiale du Groupe RES, l’un des leaders mondiaux de l’éolien dont le siège est en Grande Bretagne. Soutenu par quelques élus locaux, mais pas par tous, contesté par une partie des populations impactées, il a pour but de construire 5 éoliennes de 160 m de haut. Dominant Fontaine, proches de Goûts et de Cherval, elles seront visibles de Champagne, du plateau d’Argentine près de La Rochebeaucourt, et à plus de 15 km à la ronde. Leur fonctionnement est prévu pour 2016 – 2017, sous réserve des oppositions et recours qu’elles provoquent.
Cherval – Verteillac
Ce projet est porté par le groupe portugais EDP, 3ème acteur mondial de l’éolien. Son objectif est de construire 4 éoliennes de 150 m de haut. Leur emplacement définitif semble encore être soumis à discussions. Elles se dresseraient à proximité des Mouyaux, des Siguenies, de La Guide, et de Chanceau, certaines à moins de 600 m d’habitations. Le développement de ce projet est laborieux car la municipalité de Verteillac est partagée quant à son opportunité. Il suscite par ailleurs de fortes résistances au niveau des populations impactées. Malgré tout, les responsables d’EDP envisagent toujours un dépôt du permis de construire au second semestre 2014, pour une mise en fonctionnement à l’horizon 2018.
La Double et ses environs
Les sociétés allemandes Abo Wind et WSB, et la société Soleil du Midi Développement, travaillent sur la création de 4 parcs éoliens à implanter dans 8 communes de la Double et des environs : St Aulaye (La Livardie) ; La Roche-Chalais et Eygurande-Gardedeuil ; Puymangou et Parcoul ; St Vincent-Jalmoutiers ; Servanches et Echourgnac. Poussés par le Conseiller Général et quelques maires du secteur, ces projets suscitent l’inquiétude croissante des amoureux de la Double et l’opposition de plusieurs maires concernés.
Une empreinte forte sur les paysages
Pour chaque éolienne de 150 à 160 m de haut (la moitié de la Tour Eiffel), il faut des fondations qui font 17 m de diamètre et 2,5 à 4,5 m de profondeur. Cela nécessite en moyenne 875 tonnes de béton et 47 tonnes de ferraillage. A cela s’ajoutent la construction de chemins de chantier de 5 m de large ainsi que des plateformes de montage et de câblage. Ces éoliennes occasionneront en outre des tranchées sur plusieurs dizaines de kms afin d’être reliées au réseau national d’électricité (RTE).
Le dessous des cartes
Une politique discutée
Le développement de parcs éoliens s’inscrit dans une politique nationale et européenne. Son but est que la consommation énergétique française repose sur 23% d’énergie renouvelable en 2020. Cette politique donne la priorité à l’éolien avec un objectif de 25 000 MW installés en 2020 (19 000 en terrestre + 6 000 en maritime), contre 7 450 MW installés aujourd’hui. Elle conduit la France à se couvrir d’éoliennes. A la fin 2013, on en comptait 4 500, pour une production de 15 millions de MWH, soit à peine 3% de la consommation française d’électricité en 2012. Pour atteindre 25 000 MW installés en 2020, il faut multiplier par plus de 2 le parc existant dans les 6 ans. Cet objectif a peu de chances d’être atteint car les résistances à l’implantation d’éoliennes sont de plus en plus fortes. On assiste à la multiplication des associations opposées à l’éolien. Les élus locaux sont de plus en plus divisés sur le sujet, certains d’entre eux étant même attaqués pour conflit d’intérêts. Plus grave, des jugements viennent d’être prononcés pour démanteler des éoliennes déjà installées. Le débat prend d’autant plus d’ampleur qu’avec 25 000 MW installés et plus de 10 000 éoliennes, la France ne couvrira au mieux que 10% de ses besoins en électricité. Seulement 10% au prix de paysages abîmés et de nuisances diverses ; sans parler des dommages collatéraux au niveau du marché touristique et du marché immobilier.
Des avantages payés au prix fort
En première approche, l’éolien a de quoi séduire. Le vent est en effet une remarquable source d’énergie renouvelable, propre de surcroît. Une éolienne de 2 MW produit l’équivalent de la consommation électrique de 2 000 personnes. Les éoliennes sont en outre sources de rentrées fiscales pour les collectivités locales et de loyers pour les propriétaires qui peuvent mettre à disposition leurs terrains. Mais ces avantages sont payés au prix fort. Suivant un dispositif instauré par l’Etat en 2008, EDF doit racheter l’électricité produite par les éoliennes à un prix garanti, supérieur à celui du marché. Il est aujourd’hui de 0,085 € pour le kwh éolien terrestre et de 0,13 € pour le kwh maritime. Cette subvention déguisée de l’éolien est payée par le consommateur à travers la CSPE (Contribution au Service Public d’Electricité) qui représente environ 10% de nos factures d’électricité. Ce dispositif rend la France très attractive pour les opérateurs internationaux de l’éolien. Il a été attaqué par des opposants à l’éolien. Il pourrait être prochainement annulé par la Cour de Justice de l’Union Européenne. Cela crée de l’incertitude dans le secteur.
Des effets pervers
L’Allemagne est la championne de l’éolien avec plus de 20 000 machines installées. Elle a annoncé son intention de se retirer du nucléaire, et ne produit plus que 16% de son électricité grâce à l’atome. Ses lourds investissements dans les énergies nouvelles permettent aujourd’hui au pays de produire 22% d’électricité renouvelable. Mais cette électricité est produite de façon intermittente. Quand le vent est insuffisant, l’Allemagne doit faire appel à ses voisins et à ses autres sources d’énergie. C’est ainsi que la plus grande part de l’électricité allemande est produite à partir des combustibles fossiles, dont 44,8% grâce au charbon (2012), générant d’importantes émissions de CO2 dans l’atmosphère. Cela fait du pays l’un des plus grands pollueurs d’Europe. La production d’électricité française est au contraire largement « décarbonnée » grâce à un mix dominé par le nucléaire (75%) et le renouvelable (16%). Le fossile sert principalement à ajuster la production à la demande, lors des pics de consommation. Le mix français est par ailleurs plus compétitif, puisque l’électricité est facturée aux Allemands quasiment deux fois plus chère qu’aux Français.
Les effets pervers ne s’arrêtent pas là. Par nature, l’électricité n’est pas stockable. L’électricité climatique allemande, excessive par intermittence, doit être déversée en priorité sur les réseaux. Cela a deux effets : 1) les prix s’effondrent et par contagion affaiblissent les prix dans les pays limitrophes interconnectés qui importent les surplus ; 2) cela fragilise les usines électriques conventionnelles (gaz, charbon) qui sont elles mêmes conduites à fonctionner par intermittence. Résultat : les usines les plus fragiles mais aussi les plus réactives (notamment celles fonctionnant au gaz) disparaissent. Cela conduit l’Allemagne à les remplacer par des usines électriques au charbon, c'est-à-dire à polluer encore plus, et en outre à renchérir le coût de gestion de la production d’électricité.
Du fait de ces effets pervers, dont la France n’est pas à l’abri, il y a en Allemagne une opposition croissante à l’électricité climatique.
L’éolien est-il bien opportun en Dordogne ?
Soyons clairs ; malgré les problèmes qu’il soulève, l’éolien a sa place dans le mix énergétique français, mais pas à n’importe quelles conditions. Le développement des énergies renouvelables, et notamment celui des énergies climatiques (éolien, solaire), doivent tenir compte des spécificités de chaque territoire. Certains sont régulièrement ventés. C’est le cas du Nord Ouest de la France, du pays nantais au Nord/Pas-de-Calais, mais aussi de la vallée du Rhône et du pourtour méditerranéen. Ces régions ont une vocation naturelle au développement de l’éolien. Par contre, et de l’aveu même des industriels de l’éolien, la Dordogne est très irrégulièrement ventée. C’est pourquoi ils envisagent d’y installer des machines gigantesques et aberrantes par rapport à la douceur de ses paysages. La Dordogne n’a pas vocation à développer l’éolien. Elle a par contre de remarquables atouts en matière d’énergies renouvelables. Cela est décrit magistralement par une étude du Cabinet lyonnais Axène, réalisée à la demande du Conseil Général de la Dordogne*. Cette étude très sérieuse met en avant tout le potentiel que le Département peut tirer du bois-énergie (la Dordogne est le 3ème département le plus boisé de France), de l’hydroélectricité (la Dordogne dispose de 4 800 kms de cours d’eau), du solaire et du photovoltaïque (un atout incontestable pour notre région). Toujours selon cette étude, à la fin 2012, sans éolienne, la production totale d’énergie renouvelable de la Dordogne est de 1 389 GWH/an dont 219 GWH pour la production d’électricité. C’est déjà 2 fois plus que ce que pourrait produire l’ensemble des programmes éoliens envisagés pour l’ouest du département.
Il est temps que le bons sens s’affirme. Le programme de développement des énergies renouvelables en Dordogne doit être orienté en fonction des vrais atouts de notre territoire.
*Etude sur les consommations énergétiques et le potentiel de production d’énergies renouvelables pour le département de la Dordogne