L'émission de France 2, "Cash investigation" revient mardi soir sur les affaires de pédophilie qui ont ébranlé l'Eglise de France, notamment le diocèse de Lyon. Le reportage d'Elise Lucet a été réalisé avec 3 journalistes indépendants qui ont enquêté sur "les agresseurs couverts par l'Eglise"
L'émission de France 2 diffuse à 20h55 un film documentaire de Mathieu Boudot intitulé "Pédophilie dans l'Eglise : le poids du silence". On y voit notamment Elise Lucet interpeller en chemin le cardinal Barbarin sur les affaires de pédophilie qui ont secoué le diocèse de Lyon et qui lui ont valu d'être entendu par la police. Le dossier a été classé sans suite par la justice.
"Cash investigation" révéle pourtant que dans le diocèse de Lyon, "des prêtres condamnés pour des actes pédophiles sont toujours en poste. Comme père Didier, reconnu coupbale d'agressions sexuelles sur dix victimes"
Elise Lucet s'adresse également au pape François, qu'elle apostrophe lors d'une audience générale place St Pierre à Rome. Dans ce reportage, l'équipe d'Élise Lucet évoque un "système" d' "exfiltrations internationales" de prêtres ou religieux pour éviter le scandale. Même si elle dit n'avoir pas eu "accès à toutes les données", elle a établi une cartographie faisant état de 95 mutations depuis 1990, à l'échelle mondiale, de clercs pour lesquels 802 victimes ont été recensées.
"Cash Investigation" n'épargne pas le pape, pourtant réputé pour sa politique de "tolérance zéro" à l'égard de la pédophilie.Avec des conditionnels, l'émission glisse que Jorge Bergoglio, alors archevêque de Buenos Aires, "aurait tenté de faire innocenter un prêtre jugé pour pédophilie", le père Julio César Grassi, en transmettant à la justice une contre-enquête à décharge avant son procès en appel en 2010.
VIDEO. "Cash Investigation". Pédophilie : Elise Lucet à la rencontre du pape
Un vrai "Spotlight" français
L'enquête a eté conduite pendant un an par quatre journalistes indépendants Daphné Gastaldi, Mathieu Martinière, Mathieu Périsse et Donathien Huet, dont le travail a été publié par ailleurs par Mediapart dans son édition du lundi 20 mars 2017. Ils estiment que l'Eglise de France a "méthodiquement couvert 32 auteurs d'abus sexuels qui ont laissé derrière eux 339 victimes présumées . Un vrai "Spotligt" français. Et il cite 25 évêques, dont 5 toujours en poste, qui auraient protégé leurs agissements. Mgr Barbarin, archevêque de Lyon, figure dans cette liste.
VIDEO. "Cash Investigation". Les exfiltrations internationales de prêtres accusés de pédophilie
S'agissant de la prescription présumée des faits, souvent invoquée par l'Eglise de France pour justifier son silence, "l'enquête démontre qu'il n'en est rien": "Sur les 32 cas d'agressions sexuelles couverts par l'Eglise de France, la moitié d'entre eux concernent des faits établis après 2000, date charnière avec l'affaire Pican , premier évêque francais condamné pour non-dénonciation" .
Ces révélations donnent lieu à la publication d'un livre intitulé "Eglise, la mécanique du silence" publié aux éditions Lattes.
Sévérement mise en cause dans ce reportage, l'Eglise de France a refusé d'envoyer l'un de ses représentants en plateau pour réagir à sa diffusion, estimant "inutile de légitimer une telle mascarade journalistique".C'est le Figaro qui l'explique. L'épiscopat francais dénonce "la mécanique du scandale vendeur" et met en cause personnellement les "outrances et les mensonges d'Elise Lucet". "Des méthodes douteuses" faites selon lui "pour créer le trouble coupable de l'interlocuteur".
Des arguments rejetés par l'équipe de "Cash Investigation" qui explique qu' "elle a toujours été animée de la volonté de faire exister le débat contradictoire mais que plusieurs responsables de l'Eglise se sont opposés à ces interviews."
Le reportage de S. Valsechhi