Deux suicides survenus ces derniers jours dans la région ont fortement ébranlé le monde agricole, déjà fragilisé par la crise. Cette profession est l'une des plus touchée par ces gestes de désespoir. Des associations tentent de mener un travail de prévention.
Le 11 octobre 2015, 600 croix ont été érigées sur le parvis de la basilique de Sainte-Anne-d'Auray, dans le Morbihan. Autant de croix que d'agriculteurs ayant mis fin à leur jour ou tenté de le faire chaque année, selon le maraîcher breton à l'initiative de cette action choc. Longtemps tabou, le suicide des agriculteurs n'est plus passé sous silence. La première étude sur ce douloureux sujet date de 2013. L'Institut de Veille Sanitaire y révélait "qu'un agriculteur se suicide tous les deux jours en France", en indiquant qu'entre 2007 et 2009, 417 hommes et 68 femmes étaient passés à l'acte.
Avec la crise que traverse depuis plusieurs mois le monde agricole, ces gestes de désespoir ne tendent pas à disparaître, bien au contraire. Deux suicides survenus ces derniers jours dans la région (à Saint-Loup et dans le secteur de Brécey) ont particulièrement ébranlé cette profession et alimenté sa colère. Et si certaines manifestations peuvent faire office d'exutoire dans l'instant, elles ne réussissent pas pour autant à évacuer les idées noires selon les structures tentant de prévenir le suicide.
Car le monde agricole, conscient du problème, s'organise depuis quelques temps. En octobre 2014, la Mutualité Sociale Agricole a mis en place un numéro d'écoute téléphonique, ainsi qu'une cellule de suivi qui a déjà traité 70 dossiers dans la Manche et le Calvados. "Nous proposons un accompagnement pluridisciplinaire. Médical: les médecins orientent soit vers le médecin traitant soit vers le centre médico psychologique. Mais aussi social: les travailleurs sociaux se mettent à disposition des personnes qui ont été signalées à la cellule", explique Estelle Maillard, responsable-adjoint action sanitaire et sociale MSA.
Les bénévoles de l'association Solidarité Paysan viennent rencontrer, en duo, les personnes en détresse dés le signalement donné. "On va voir la personne le plus rapidement possible et on essaye de déceler dans quel état de santé elle est, parce que bien souvent on est les derniers appelés, puisqu'elle a vu déjà pas mal d'organismes et on arrive bien souvent trop tard", déplore Pierre Sauques, bénévole de l'association Solidarité Paysans. Celle-ci assure environs 180 accompagnements par an dans la Manche, l'Orne et le Calvados.
Les numéros à appeler:
- Solidarité Paysans: 02 31 47 22 13
- MSA - Agri Ecoute: 09 69 39 29 19
Reportage de Jérôme Raguenau et Suzana Nevenkic
Intervenants:
- Pierre Sauques, bénévole Solidarité Paysans
- docteur Olivier Le Gal, médecin-conseil MSA Côtes Normandes
- Estelle Maillard, responsable-adjoint action sanitaire et sociale MSA
- Jean-Luc Fouillé, président Solidarité Paysans (Orne, Manche, Calvados)