Les fouilles archéologiques débutées en octobre dernier à Lavau, près de Troyes, ont révélé des trésors exceptionnels. Des sépultures, parures, poteries, datant pour les plus anciennes de près de 3.000 ans. La plus prestigieuse est une tombe princière du 5e siècle avant notre ère.
Un grand chaudron à vin, un riche pichet, une passoire, des récipients pour recevoir le précieux breuvage. Tout semble prêt pour un banquet. Mais un banquet au fond d'une tombe, celle d'un prince celte du Ve siècle avant notre ère, découverte dans l'Aube.
Il s'agit d'une trouvaille "exceptionnelle", a estimé mercredi l'Inrap (Institut national de recherches archéologiques préventives) qui fouille ce site depuis octobre à la demande de l'Etat. La tombe, qui date de la fin du Premier âge du Fer (période du Hallstatt), est située dans la zone artisanale et commerciale de la petite commune de Lavau, à quelques kilomètres de Troyes.
Au centre d'un tumulus (monticule au-dessus d'une sépulture) de 40 mètres de diamètre, le défunt - dont les restes n'ont pas encore été dégagés - repose avec son char au coeur d'une chambre funéraire de 14 mètres carrés.
"Il s'agissait probablement d'un "prince" celte local", souligne Dominique Garcia, président de l'Inrap. Les archéologues ont retrouvé dans la tombe un grand couteau dans son fourreau, laissant penser qu'il s'agit d'un homme.
La fouille se poursuit - on voit déjà affleurer des parties du squelette -, ce qui devrait permettre d'en savoir plus sur ce personnage.
Dans une autre tombe proche, se trouve le squelette d'une femme. "On sait que cette sépulture a été construite avant celle du Prince. Mais il est tout à fait possible qu'il y ait des liens de parenté entre ces deux personnages", estime Bastien Dubuis, responsable du chantier.
Le plus spectaculaire pour le moment réside dans le raffinement des objets d'origine grecque et pour certains sans doute étrusque disposés dans la tombe et liés au service du vin.
Le bord du chaudron est décoré de têtes de félins et pourrait avoir été réalisé par des artisans étrusques, indique l'archéologue Emilie Millet.
Il contient un pichet à vin (oenochoé) en céramique attique à figures noires, fabriqué par des Grecs. Une scène représente Dionysos face à un personnage féminin.
Des cadeaux diplomatiques
Remarquablement conservée, cette cruche a été rehaussée d'or au niveau de son embouchure et de son pied, ce que ne faisaient pas les Grecs pour eux-mêmes. "Elle a été "customisée" avec de l'or pour plaire aux Barbares", analyse M. Garcia.Au pied du chaudron se trouve une passoire en argent doré. Et des récipients, prêts à recevoir le vin, précieux liquide qui se buvait mélangé à de l'eau.
Ce mobilier "atteste des échanges qui existaient entre la Méditerranée et les Celtes", souligne M. Garcia.
La fin du VIe siècle et le début du Ve siècle av. J.-C. ont été marqués par le développement économique des cités-Etats étrusques et grecques d'Occident, Marseille notamment. A la recherche d'esclaves, de métaux et de biens précieux (étain, ambre...), les commerçants méditerranéens sont entrés en contact avec les communautés celtiques continentales.
Des objets remarquables ont ainsi été retrouvés dans des tombes monumentales, comme à Hochdorf (Allemagne) et à Vix (Bourgogne) notamment. Lavau vient s'ajouter à la liste.
Les fouilles de l'Inrap doivent s'achever fin mars. Les objets découverts appartiennent pour moitié à l'Etat et pour moitié à Lavau. "Ce serait bien que ces objets soient pris en charge par le musée de Troyes", estime Yves Dauvet, Premier adjoint au maire de Lavau.