La gendarmerie a déjà tiré la sonnette d'alarme concernant le "Blue Whale Challenge", une série de défis sur internet conduisant les adolescents au suicide. A Saint-Omer, le drame a été évité de justesse : une jeune fille, arrivée au dernier défi a été secourue alors qu'elle tentait de se pendre.
Informer, pour mieux prévenir. Sur internet, plusieurs groupes d'action contre le "Blue Whale Challenge" ont été créés, pour avertir les parents et signaler les comportements dangereux. Ce nouveau phénomène, qui touche les adolescents via les réseaux sociaux, consiste en une série de défis de plus en plus extrêmes, passant par de multiples scarifications et allant jusqu'au suicide. Un challenge extrêmement dangereux venu de Russie et qui touche aujourd'hui plusieurs jeunes de la région.
A Saint-Omer, plusieurs cas ont été signalés et le Parquet a été saisi. Deux collégiennes ont ainsi été signalées alors qu'elles prenaient part au challenge et avaient atteint les niveaux 25 et 45 (sur une échelle de 50). Pire encore, au centre d'accueil pour mineurs Anne Frank situé lui aussi à Saint-Omer. Là, une adolescente a été sauvée in extremis alors qu'elle avait atteint le dernier défi et tentait de se pendre. "Il y a de vraies inquiétudes, surtout quand on voit qu'une gamine peut aller aussi loin", affirme Patrick Leleu, Procureur de Saint-Omer.
Qui derrière le jeu ?
Si plusieurs cas ont été signalés à Saint-Omer, le phénomène ne se restreint néanmoins pas à ce territoire. Les maîtres de ce jeu morbides se cachent derrière des comptes en ligne anonymes et attirent dans leurs filets des jeunes de toute la France. Difficile donc de mener l'enquête et de les trouver. "Aujourd'hui la question se pose de savoir à qui on confie ce genre d'enquêtes", explique Patrick Leleu. "Pour le moment elle est confiée au commissariat de Saint-Omer, mais il faut qu'on trouve un service régionalisé, avec plus de compétences. Peut-être même un office national", glisse le Procureur. Le Procureur de Boulogne-sur-mer, M. Marconville, confirme : "Je suis en lien avec le Parquet de Saint-Omer pour mieux appréhender les situations comme celle-là." "C'est une situation très inquiétante", a-t-il ajouté.Car derrière cette série de défis se cachent des "maîtres du jeu", pour l'instant non-identifiés. Sur internet, les participants les appellent les "parrains" ou "tuteurs". Ce sont eux qui donnent les instructions au jour le jour, en menaçant de venir tuer les participants s'ils n'obéissent pas. Pour participer au "jeu", la plupart des adolescents français passent par le réseau social russe "Vkontakte", un équivalent de Facebook. Un endroit, où tout va très vite.
Quelques clics
Nous avons voulu vérifier comment les "parrains" contactaient leurs victimes. Après une rapide inscription sur Vkontakte, il suffit de taper "Blue Whale" pour tomber sur des dizaines de profils... de prétendants.Sur Vkontakte, des groupes spécifiques sont consacrés au "jeu", là où Facebook les a supprimés. Pour se retrouver, les adeptes du challenge utilisent également plusieurs mots-clés, sur Vkontakte et Twitter : #f57, #f58, #wakemeupat420 (référence au cannabis)... En effectuant des recherches à partir de ces mots-clés, on tombe rapidement sur des photos de participants, à des étapes plus ou moins avancées du jeu. Première étape : inscrire "F57" sur sa main. Puis, les choses dégénèrent rapidement. Ici, une jeune fille montre les nombreuses blessures qu'elle s'est infligée aux bras et aux jambes. Sur Instagram, des vidéos montrant des jeunes filles russes se jeter du toit d'un immeuble circulent toujours.
En continuant sur le site, nous sommes tombés sur l'annonce d'un homme, qui prétend faire partie des "tuteurs". Après nous avoir demandé notre âge, notre sexe et notre lieu d'habitation (ce à quoi nous avons répondu "fille, 17 ans, France"), il nous a répondu qu'il pouvait nous guider dans le jeu... à condition d'envoyer une photo et des vidéos de nous.
Véritable "maître du jeu" ou profiteur à l'affût de jeunes filles en détresse, nous n'en saurons pas plus. Mais la facilité de cette prise de contact justifie d'autant plus les différentes actions de prévention menées sur internet ou via les gendarmeries locales.
D'après nos confrères du Journal Du Dimanche, une mère de famille originaire de Picardie, Sandra, a constaté que son fils avait participé au "Blue Whale Challenge". Son message de prévention, publié sur Facebook, a été partagé plus de 12 000 fois.