Des citoyens et leurs avocats toulousains lancent une action conjointe contre la création d'un fichier unique, qui doit regrouper les informations personnelles de 60 millions de français. Un site est ouvert pour regrouper les recours des citoyens contre ce fichier.
Une action collective, ouverte à tous les citoyens. C'est le nouveau combat du toulousain maître Christophe Léguevaques, avocat au barreau de Paris.
Ce mercredi, il lance une procédure de recours pour excès de pouvoir, pour obtenir l'annulation d'un décret qui prévoit la mise en place d'un fichier regroupant les données des cartes d'identité et passeports de 60 millions de Français. Les citoyens souhaitant se joindre à l'action pourront se déclarer sur internet, via une plateforme d'actions collectives, en échange de 60 euros de participation aux frais. Une nouvelle méthode d'action conjointe (voir encadré)
60 millions de français concernés
Louis-Georges Tin, président du conseil représentatif des associations noires de France, est l'un des premiers requérant. "Je suis extrêmement préoccupé par les libertés publiques qui reculent, dans cet état d'urgence indéfini." Selon lui, tous les français sont concernés. "Il y a potentiellement 60 millions de personnes fichées par cet outil". Son association le CRAN lutte contre les abus policiers des abus qui selon lui visent souvent les minorités ethniques."On se souvient que le Patriot Act aux Etats-Unis a plus servi à cibler les minorités et les associations de droit humain que les terroristes. C'est cela que nous redoutons en France.
Un fichier "monstre" de 60 millions de données
Ce décret "TES" (Titres Electroniques Sécurisés) autorise la création d'un fichier gigantesque, qui collectera l'ensemble des données personnelles et biométriques de 60 millions de Français. Ce fichier a déjà fait l'objet de vives critiques de citoyens et de réserves notamment de la part de la CNIL (Commission nationale de l'informatique et des libertés) et du Conseil national du numérique, notamment car « l’existence d’un tel fichier laisse la porte ouverte à des dérives aussi probables qu’inacceptables ». La CNIL soulignait également la crainte de "dérives" et de la création d'un fichier, qui pourrait devenir une cible d'une valeur inestimable pour d'éventuels hackers.Fort de l'émoi suscité, l'équipe d'avocats, composée notamment de Me Jean-Marc Fedida et de Me Christophe Léguevaques, a décidé de lancer un recours pour excès de pouvoir contre ce décret. Il s'agit d'une action déposée au Conseil d'Etat, afin de soumettre les actes de l'administration aux principes de légalité. Les avocats espèrent l'annulation pure et simple du décret.
Le reportage de Sandrine Mörch et Laurence Boffet
Internet : un outil pour appuyer les actions conjointes
Basé à Toulouse, mais inscrit au barreau de Paris, Christophe Léguevaques est de tous les combats. Avocat depuis 1992, le toulousain a défendu de nombreux dossiers de renom. Déjà avocat de la mairie de Toulouse lors des deux premiers procès AZF, Me Christophe Léguevaques s'est aussi attaqué à d'autres combats de taille : les irradiés de Rangueil, DEXIA, Spanghero, la privatisation de l'Aéroport de Toulouse-Blagnac, et plus récemment, l'attribution du nom "Les Républicains".Différente de l'action de groupe, autorisée depuis 2014 par la loi Hamon, l'action conjointe est une action menée par des citoyens, "ensemble, mais séparément". Pour Christophe Léguevaques, internet est un nouvel outil pour démocratiser la justice. "Aujourd'hui, l'objectif est de faciliter l'accès au droit et à la justice. Cette plateforme internet permet de rassembler des personnes qui sont réparties sur tout le territoire, qui sont seules face à de groupes puissants. C'est une sorte de cabinet virtuel qui va permettre de rétablir l'égalité des armes."