"L'échassier" s'en est allé. L'ancien champion cycliste Roger Pingeon, vainqueur du Tour de France 1967, est mort dans la nuit de samedi à dimanche d'une crise cardiaque à l'âge de 77 ans. Il a travaillé 10 ans à l'office départemental des sports de l'Hérault, entre 1990 et 2000.
10 ans dans l'Hérault entre 1990 et 2000
Roger Pingeon s'est installé dans l'Hérault en 1990. Il y a travaillé pendant des années comme animateur auprès de l'office départemental des sports.Tous les ans, depuis 1996, à Gignac une course a lieu à son nom : la cyclosportive Roger Pingeon, Grand Prix du département de l'Hérault. La prochaine édition commencera le 31 mars prochain.
Décédé à son domicile dans l'Ain, c'est le troisième vainqueur de la Grande Boucle à s'éteindre cet hiver après le Suisse Ferdi Kübler (97 ans, vainqueur en 1950) le 30 décembre, puis Roger Walkowiak (89 ans, vainqueur en 1956) le 7 février. Vingt-trois vainqueurs du Tour sont encore en vie, dont le doyen est l'Espagnol Federico Bahamontes (88 ans, vainqueur en 1959).
Roger Pingeon "a été foudroyé ce dimanche vers 4h00 par une crise cardiaque", a indiqué à l'AFP le maire de Beaupont dans l'Ain, Georges Gouly, village de 700 habitants dans le centre-est de la France où l'ancien champion avait élu domicile dans les années 2000, à une centaine de kilomètres de sa ville natale de Hauteville-Lompnes.
"C'était quelqu'un d'une grande humilité, qui avait su très bien s'intégrer à la vie du village et notamment à la vie associative. Cette année, il fêtait le 50e anniversaire de sa victoire", a ajouté le maire, manifestement affecté.
Surnommé "l'échassier" à cause de ses longues jambes, Roger Pingeon est entré dans l'histoire du Tour grâce à son échappée solitaire du côté de... Jambes, en Belgique, dans le Tour 67. Ce pur-sang (1,82 m pour 72 kg) au nez en
coupe-vent s'assura un avantage définitif dès la cinquième étape et devint le leader de l'équipe de France au détriment de Raymond Poulidor qui finit par se ranger à son service.
Pingeon, à la carrière souvent jugée météorique, ne fut pas seulement l'homme d'une saison. Il remporta le Tour d'Espagne 1969, quelques semaines avant de prendre la deuxième place du Tour de France derrière l'imbattable Belge Eddy Merckx.
Coureur de grande classe au moral fragile, souvent accablé par le découragement mais doté d'une grande intelligence de course, Pingeon était né le 28 août 1940 aux confins du froid Jura. Il y avait pratiqué le ski de fond à l'adolescence avant de se découvrir une arythmie cardiaque à 17 ans.
Après deux ans passés en Algérie pour son service militaire, il entra dans la carrière tardivement (1965).
Fragile et attachant "Pinpin" !
En proie à des sautes d'humeur, il s'inquiétait facilement pour ses bronches, ses sinus, ses tendons. Il redoutait le mauvais temps et la fringale, aimait la chaleur. Mais, en 1967, ce fut dans le froid et sous la pluie qu'il garda son maillot jaune dans l'étape de la Chartreuse.Dans le Tour, il remporta quatre étapes et termina à trois reprises dans les cinq premiers (5e en 1968). Cette année-là, il mena une échappée victorieuse de... 193 kilomètres entre Font-Romeu et Albi.
"Le vélo romantique"
"Il incarnait le vélo romantique, par ses chevauchées et aussi ses défaillances", a commenté Christian Prudhomme, directeur du Tour de France. "Ce coureur de caractère fort, capable de coups de colère, au moral sans doute friable avait des qualités exceptionnelles", a-t-il également estimé.Capable de coups de tête, sujets aux états d'âme, il annonça plusieurs fois son retrait (Paris-Nice et Dauphiné 1966). Il alla jusqu'à jeter pendant la course son vélo dans le ravin au désespoir de Gaston Plaud, son directeur sportif de Peugeot, jurant de redevenir plombier-zingueur, son métier d'origine. Car cet homme secret et timide ne faisait rien comme les autres.
Le jour de repos du Tour, il restait en position allongée sans toucher au vélo.
Il modifiait son menu, renonçait aux sucres et aux viandes, et prenait le soir un bain chaud... et salé, complété de quelques litres de vinaigre. La combinaison de sel et de vinaigre, assurait-il, était un défatiguant.
Professionnel jusqu'en 1974, il a ensuite longtemps été consultant pour la Télévision suisse romande.