"C'était ça mon combat, que ça n'arrive pas à d'autres parents". Treize ans après la mort de sa fille dans un incendie, Josiane Bosycot a obtenu que les détecteurs de fumée deviennent obligatoires dans les logements. Vous avez jusqu'au 8 mars prochain pour vous équiper.
C'était le 20 avril 2002. Cette nuit-là, Julia, 17 ans, dort chez des amis à Saint-Nom-la-Bretèche (78). Au rez-de-chaussée, des bougies allumées ont été oubliées, le pavillon s'embrase rapidement. A l'étage, la jeune fille se réveille mais elle est la seule à ne pas s'échapper à temps. "S'il y avait eu un détecteur de fumée, ma fille aurait eu les quelques minutes nécessaires pour quitter le pavillon", assure-t-elle d'une voix résolue.Les années qui suivent sont "très compliquées", raconte cette quinquagénaire coquette et menue. Son mari perd pied, sa famille se déchire, elle cesse de travailler mais Josiane Bosycot veut surtout comprendre. Elle se renseigne sur la réglementation en matière de prévention des risques incendie en France et à l'étranger, et découvre avec stupéfaction que "nous sommes vraiment très en retard".
En 2006, la mère de famille prend donc son bâton de pèlerin et contacte les pompiers et les députés des Yvelines, où elle réside. L'un d'eux, Pierre Morange (UMP), se joint "immédiatement" à son combat et commence à rédiger une proposition de loi qu'il appellera "la loi Josiane Bosycot". Leur objectif commun : que la France s'équipe enfin de détecteurs, comme l'ont fait de nombreux pays, dont la Grande-Bretagne, depuis une vingtaine d'années.
"Je ne pensais plus qu'à ça"
Comme Julia, 80% des 800 personnes qui périssent chaque année en France dans un incendie meurent intoxiquées par la fumée, 70% d'entre elles la nuit. Pour Josiane Bosycot, le vote de la mesure devient une ligne de survie. "Je ne pensais plus qu'à ça. Du matin au soir, je ne faisais que ça, écrire aux politiques, aux médias", se souvient-elle. "Il fallait que ce décès aide les autres". A commencer par sa seconde fille, Gladys : "je me suis retrouvée avec cette petite qui avait 13 ans, je me suis dit "il faut que je me batte pour elle et qu'elle comprenne que même après la chose la plus compliquée, perdre un enfant, on peut toujours se relever".Mais le combat s'éternise. Le duo qu'elle forme avec Pierre Morange se heurte à d'importantes résistances au Parlement, notamment sur le coût d'une telle mesure pour les ménages les moins aisés ainsi que les bailleurs sociaux. La loi sur les risques incendie est finalement adoptée début 2010, au prix d'un certain nombre de renoncements. L'idée de rendre également obligatoires les détecteurs de monoxyde de carbone est abandonnée, un délai de cinq ans est accordé pour l'installation des détecteurs de fumée, et ceux qui choisiront de ne pas le faire ne seront pas sanctionnés.
A partir du 8 mars 2015, tous les logements doivent en être équipés mais entre 60 et 65% ne le seront pas, selon une projection de la Fédération française des métiers de l'incendie (FFMI). "Maintenant il faut bien communiquer", recommande Josiane Bosycot, "il y a encore beaucoup de gens qui ne savent pas à quel point c'est peu cher et facile à installer" : une quinzaine d'euros et quelques vis ou du scotch double face.