Les arrêtés anti-pesticides se multiplient en France. Contestés par l'Etat, tous ces textes devraient donner lieu à des recours en justice. Mais les maires frondeurs restent confiants. Grace à la médiatisation de ces actions, ils comptent bien peser dans le débat national.
Chaque jour, un maire prend un nouvel arrêté. D’après ce que je sais, on a dépassé la trentaine. Daniel Cueff, maire de Langouët
Daniel Cueff est le premier élu à avoir pris, en mai, un arrêté interdisant l'utilisation de produits phytopharmaceutiques à 150 mètres des habitations de sa commune. Un texte suspendu le 27 août dernier par le tribunal administratif de Rennes, après avoir été saisi par la préfète d’Ille-et-Vilaine. Décision très médiatisée, de nombreux maires se sont, depuis, ralliés à l’élu breton, dont le maire de Val-de-Reuil, dans l’Eure.
Je viens de signer l’arrêté interdisant @valdereuil_info l’utilisation de pesticides à moins de 150 mètres de toute activité humaine. Il s’agit de protéger la santé de tous, mais c’est aussi un marqueur : celui de la nécessité écologique, de l’impératif environnemental. pic.twitter.com/ffVBnOEnmp
— Marc-Antoine JAMET (@MA_Jamet) August 27, 2019
Le bras de fer entre les maires et l'Etat
Face à ces communes qui sont de plus en plus nombreuses à prendre des arrêtés, l’Etat contre-attaque avec la multiplication de recours devant les tribunaux administratifs. Dans le Doubs, à Boussières, le maire sans étiquette Bertrand Astric qui a décidé d’interdire le glyphosate sur l’ensemble de sa commune fait partie des élus qui devront s’expliquer devant la justice.
Les maires ne sont donc juridiquement pas compétents pour prendre des décisions sur l’utilisation des pesticides. Ce qui n’est pas une surprise pour ces élus dont le but est avant tout d’attirer l’attention. Le maire de Boussières ne s'avoue pas vaincu. Bien au contraire.Pour nous, le maire n’est pas en capacité de prendre un tel arrêté. La loi confie ce pouvoir au ministre de l’agriculture. S’il y a un risque avec un pesticide en particulier, il faut l’interdire sur tout le territoire. Un maire seul ne peut prendre ce genre de décision. Jean-Philippe Setbon, secrétaire général de la préfecture du Doubs
On se battra jusqu’au bout pour faire entendre notre voix. Je crois que c’est largement le cas et j’espère que ça fera progresser le dossier puisque que j’ai vu que même Monsieur le Président de la République y était, depuis quelque temps, sensible. On ne peut que s’en réjouir. Bertrand Astric, maire (SE) de Boussières
Contraindre l’Etat à prendre ses responsabilités
Même si les arrêtés sont suspendus les uns après les autres, ces maires hors-la-loi seront finalement arrivés à faire bouger les lignes. Le ministère de l’Agriculture a annoncé, début octobre, des consultations publiques dans toutes les préfectures réunissant préfet, agriculteurs, associations...Ces consultations doivent aboutir à un accord national, début janvier 2020, sur les règles d’épandage des cultures. Le plus difficile sera de mettre d’accord tous les acteurs sur la distance à respecter avec les habitations. En cas de conflits, l’Etat devrait imposer des zones de non traitement comprises entre 1 et 5 mètres.