Elle venait de sortir de prison après un premier infanticide en 2002. Une mère de 34 ans comparaît une nouvelle fois, à partir de ce vendredi 27 février, à Bourg-en-Bresse devant les assises de l'Ain pour deux autres meurtres de nouveau-nés, retrouvés dans son congélateur.
Mère par ailleurs d'un adolescent, elle est poursuivie pour "homicides volontaires sur mineurs de 15 ans" et encourt la réclusion à perpétuité, assortie d'une peine de sûreté de 22 ans.
Le 24 mars 2013, le petit ami de cette serveuse de restaurant découvre un petit corps dans le congélateur du modeste appartement où elle vit à Ambérieu (Ain). Il alerte les gendarmes, qui retrouvent sur place un deuxième corps congelé. Placée en garde à vue, Audrey Chabot, "très abattue" selon les enquêteurs, reconnaît avoir accouché à l'automne 2011 et 2012 à l'insu du père des enfants, qui ne vivait pas avec elle. Deux petits garçons, nés viables, qu'elle avoue avoir noyés dans le bac à douche. Une semaine après sa naissance pour le premier.
L'affaire prend un tour plus sordide lorsqu'il s'avère que cette jeune femme a déjà été condamnée, en 2005, par la cour d'assises de l'Ain, à 15 ans de réclusion criminelle pour l'assassinat d'un précédent nouveau-né. Un bébé, d'un autre père, dont elle avait accouché clandestinement dans les toilettes, le 28 mars 2002. Sa propre mère, qu'elle avait chargée de dissimuler le corps dans un sac abandonné dans une maison en ruines, s'était vu infliger 18 ans de réclusion criminelle.
- 'Pas le droit d'être mère' -
Audrey Chabot était restée huit ans, quatre mois et neuf jours, derrière les barreaux. De juillet 2002 à décembre 2010. Puis, conformément au jugement des assises et justifiant d'un emploi et d'une obligation de soins, elle avait bénéficié d'un aménagement de peine. "Elle a purgé toute sa peine", dira le procureur de la République de Bourg-en-Bresse, Denis Mondon, qui représentera le ministère public au procès.Selon les déclarations de l'accusée, elle est tombée enceinte quelques semaines après sa sortie de prison. Mais "elle s'est dit qu'elle n'avait pas le droit d'être mère, car elle avait tué son premier enfant et elle a caché sa grossesse au père du bébé parce qu'elle pensait que si elle le lui révélait, il la quitterait", a expliqué son avocat, Me Jean-François Canis, du barreau de Clermont-Ferrand. Le père des bébés, un technicien, s'est constitué partie civile.
Psychologues et psychiatres
Selon Me Canis, sa cliente "n'avait plus aucun contact avec sa mère" avec laquelle elle avait entretenu dans le passé une relation "compliquée". Ecrouée, sous anti-dépresseurs, à la maison d'arrêt de Lyon-Corbas, Audrey Chabot dit "regretter son geste" et "a l'intention de dire la vérité" aux jurés, selon son avocat.Pas moins de onze experts, dont six psychologues et psychiatres, ont été cités à comparaître par le ministère public. Des psychiatres qui la décrivent comme une femme "d'intelligence normale", présentant une "altération du discernement" mais "pas de maladie psychiatrique".
Lors de son premier procès, son avocate d'alors, Me Cécile Berton, avait plaidé le déni de grossesse. Mais, a-t-elle confié par la suite à l'AFP, "on était avant l'affaire Courjault (*), et un expert psychiatre m'avait expliqué qu'on ne pouvait pas invoquer le déni de grossesse pour une femme ayant déjà eu un enfant".
Le procès était prévu jusqu'au 6 mars mais le verdict pourrait être rendu dès la veille au soir.
(*) En juin 2009, Véronique Courjault fut condamnée à huit ans de prison pour avoir tué trois nouveau-nés retrouvés par son mari dans leur congélateur en Corée.