"Un autre regard" sur les lunettes à Oyonnax (Ain)

"Un autre regard", c'est le titre clin d'oeil d'une exposition proposée à Oyonnax jusqu'au 7 mars. La cité de la plasturgie se penche sur son passé dans la lunetterie. Des années 50 aux années 80, les professionnels du cru fournissaient les plus grandes stars américaines. Zoom sur cette histoire. 

Le Centre Culturel Aragon propose actuellement une expo sur la lunetterie des origines à nos jours. 250 pièces sont présentées. Un travail réalisé avec les lunetiers du secteur qui ne sont plus qu'une vingtaine dans le bassin d'Oyonnax. 
 

Point "de vue" historique

Si durant l'Antiquité, l'homme a bien tenté de comprendre l'oeil et la vision, ce n'est qu'à partir du Moyen-Age qu'ont été inventés les premiers dispositifs d'aide visuelle. Les ancêtres de nos lunettes actuelles ont ensuite pris différentes formes : des binocles et face-à-main maintenus devant les yeux, aux lunettes à tempes, monocles et pince-nez...

Au 18e siècle, les fameuses lunettes-fils sont fabriquées à Morez (Jura), à 60km d'Oyonnax. Lorsqu'ils vont commencer à travailler le celluloïd, les Oyonnaxiens seront invités à décorer ces lunettes moréziennes avec l'ancêtre du plastique. Un complément d'activité à une époque où le peigne et les ornements de coiffure faisaient vivre le Haut-Bugey. 

L'émergence de la nouvelle mode des cheveux courts, à la sortie de la Première Guerre mondiale, va contraindre les fabricants de peignes à se tourner vers la lunetterie.

Les premières entreprises se développent. Des lunettes à branches aux modèles protégeant les yeux des motocyclistes, les artisans mettent leur savoir-faire et leur maîtrise du plastique dans cette nouvelle industrie.

La Seconde Guerre mondiale n'a qu'un moindre effet sur cette jeune activité. Les fabricants s'adaptent aux pénuries de matières premières et Oyonnax, en zone libre, devient terre d'asile pour de nombreuses entreprises jurassiennes.

L'essor, à partir des années 1950, du marché européen et américain de la lunette marque le début d'une longue période de prospérité malgré une forte concurrence. Beaucoup d'entrepreneurs d'outre-Atlantique sollicitent alors les lunettiers oyonnaxiens pour produire des lunettes en acétate de cellulose dans des quantités extraordinaires.

Reportage Franck Grassaud et Maryne Zammit
©France 3
 

Voir et être vu

L'avènement d'une nouvelle génération de designers nourris par les fantaisies pop de la fin des années 50 et des années 60, apporte une créativité sans limite et casse les codes de la lunette. Désormais, elles ne servent plus seulement à mieux voir, mais elles deviennent de véritables accessoires de mode.

Oyonnax voit alors émerger de grands noms tels que Paulette Guinet et Marcelle Landry qui marqueront l'histoire de cette industrie par leur talent et leur créativité.

En parallèle, le duel acharné que se livrent sur les pistes les skieurs Karl Schranz et Jean-Claude Killy confirme la suprématie d'un autre grand nom oyonnaxien dans le domaine de la lunette sportive : Bollé.

En raison de cette incroyable créativité, c'est tout naturellement qu'est créé en 1967, à Oyonnax, le premier salon international de la lunetterie : le SILMO qui se tient encore chaque année à Paris.

Les décennies 1970 et 1980 seront quant à elles marquées par le phénomène des griffes et des licences. Les lunetiers du cru produisent au nom grandes marques de luxe et de mode comme Azzaro, Yves Saint-Laurent, Emmanuelle Khanh... 
 
 

Et aujourd'hui ?

Le territoire compte actuellement plus de 20 entreprises qui poursuivent la grande histoire de la lunetterie. Héritière d'un savoir-faire unique, leur production haut de gamme affiche fièrement le label "Origine France Garantie" et s'exporte dans le monde entier.

"Aujourd'hui, les lunettes ne sont plus seulement une aide visuelle ou un support à grandes marques, c'est un produit technique et inventif. En matériaux naturels recyclés, en plastique ou en métal, elles peuvent permettre d'améliorer la vue des enfants dyslexiques ou des sportifs, elles s'adaptent à chaque visage, chaque regard et chaque nez tout en étant tournées vers les nouvelles technologies", explique Virginie Kollmann-Caillet, conservatrice du patrimoine. 
 
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