Sur la planète Michelin, il est un département qui souffre d'un manque de reconnaissance, c'est le département de l'Ain. Reste 2 établissements une étoile et l'historique restaurant de Georges Blanc avec ses 3 étoiles. Pourtant, l'Ain a longtemps été la patrie des étoilés. Une route en témoigne.
La route nationale 83, aujourd'hui déclassée en route départementale 1083, a aussi subi un déclassement côté gastronomique. Des années 70 au milieu des années 80, c'était la route du pélerin qui aimait bien manger. L'autoroute A42 n'existait pas encore, et cet axe Lyon-Bourg-en-Bresse, qui irriguait la Dombes, offrait des haltes étoilées.
Exemple, en 1977 le village des Echets, -250 habitants-, comptait 7 restaurants dont 3 étoilés. Les cuisiniers s'en donnaient à coeur joie avec les produits de l'Ain, grenouilles et volailles comprises. La semaine, c'était repas d'affaires. Le week-end, le tout Lyon débarquait en voiture ou en train. Une économie culinaire reconnue.
C'est ainsi que Michelin distribuait ses étoiles sur 50km, chaque village avait au moins une toque récompensée.
Reportage Franck Grassaud et Didier Le Pape
Le guide fit notamment découvrir le cuisinier aux doigts de fée, Alain Chapel, 3 étoiles à Mionnay.
C'est comme si son départ brutal, -d'une crise cardiaque en 1990-, avait sonné le glas de cette époque bénie des Dieux pour la gastronomie aindinoise.
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Peu à peu, les établissements ont perdu leurs étoiles. La constellation n'a pas résisté à la concurrence de l'autoroute. Seuls les camions s'aventurent encore sur la RD83, mais ce n'est pas le public d'un restaurant qui met les petits plats dans les grands. Certaines affaires étaient convoitées par les promoteurs, ils ont aujourd'hui gagné.
Avec un pincement au coeur, mais sans regret, Christophe Marguin a ainsi vendu, -en 2017-, l'établissement familial aux Echets. Le cuisinier s'est installé à Lyon. Pour lui, les mesures prises au fil des ans pour limiter le taux d'alcool au volant, ont aussi stoppé net l'avenir gastronomique de cet axe.
En vidéo, interview réalisée par Yaëlle Marie et Arnaud Jacques
A 20km de la 83, dans son fief de Vonnas, Georges Blanc ajoute à l'analyse, évoquant les "successions qui ne sont pas forcément bien passées". "Etre marchands de bonheur, ce n'est pas donné à tout le monde", explique celui qui a repris le flambeau il y a presque 40 ans, s'employant à développer un établissement qui a reçu sa première étoile il y a 90 ans.