"Ca va être une catastrophe" : Adisseo envisage de supprimer 47 postes sur son site de l’Allier

Le producteur de compléments alimentaires animaliers Adisseo a annoncé la suppression possible de 47 postes sur son site de Commentry (Allier) ce mardi 23 janvier. Le site n’est, selon la société, "plus assez compétitif" dans le domaine de la production de méthionine, un acide aminé.

Adisseo, un des leaders mondiaux des compléments alimentaires pour la nutrition animale, a annoncé envisager la fermeture définitive de l’atelier de méthionine poudre (un acide aminé) de Commentry (Allier). A l’arrêt depuis octobre 2022 “en raison de conditions économiques dégradées”, il ne serait pas redémarré. Un plan de départs volontaires portant sur 47 postes devrait débuter au mois d’avril. “Ce projet a pour objectif de sauvegarder la compétitivité des activités de production de méthionine poudre d’Adisseo à l’échelle européenne.” Adisseo justifie cette annonce par le fait que l’atelier de production de méthionine poudre de Commentry a des coûts de production "structurellement plus élevés que ceux de la plateforme industrielle de Roches-Roussillon, de l’ordre de 15%”. Il est envisagé la suppression de 47 postes nets sur le site de Commentry, sur un effectif total de 335 postes. 

"Ils mettent le site en péril pour les années à venir"

Les salariés ont été choqués par cette annonce, selon Maxime Pampaloni, secrétaire de la CGT : “On a été ébahi. Tout le monde travaille, aujourd’hui. Certes, le service méthionine est à l'arrêt depuis un an et demi. La direction s’est déjà séparée de tous les précaires, tous les intérimaires, les alternants... Ce sont des CDI qui les ont remplacés. Aujourd'hui, l'annonce de la suppression de ces postes nous paraît énorme et pas du tout justifiée de la part de la direction. Ils mettent le site en péril pour les années à venir. On va se battre. La volonté c'est de garder un maximum de personnes et de replacer tout le monde. Tout le monde travaille, tout le monde a un poste de travail, personne ne fait rien, ça n’est pas compréhensible. Le tri, ils l'ont fait il y a un an. Ils ont laissé partir des gens, il y a eu des démissions, il y a eu des départs en retraite, il y a eu des licenciements, plus les intérimaires...” 

Une "décision difficile"

Pour lui, la décision de se séparer de 47 personnes n’est pas justifiée : “C'est une décision soi-disant économique. Économique ? Moi, je ne pense pas. C'est plus une question de rentabilité. On est peut-être un peu moins rentable qu'avant mais on gagne toujours de l’argent. Ils se permettent aujourd'hui, sur l'année 2023, de verser à peu près une centaine de milliers d'euros à l'actionnaire. Et derrière, ils nous annoncent un plan social avec des suppressions de postes. Ce n'est juste pas compréhensible, pas entendable.” Sébastien Ferard, directeur de l’usine de Commentry, explique qu’il s’agit d’une “décision difficile pour les salariés, très attachés à leur outil de production”. L’atelier, à l’arrêt depuis 2022, d’abord “en raison de la flambée des matières et de l’énergie”, devrait l’être définitivement. “Les conditions de marché se dégradent. De nouveaux compétiteurs font baisser les prix et l’activité n’est plus rentable. L'atelier de Commentry a une taille jusqu’à 10 fois plus petite que certaines unités concurrentes. C’est une décision subie”, insiste-t-il. L'unité de l'Isère est d’une taille 2 fois supérieure à celle de Commentry. 

Des postes menacés

Maxime Pampaloni conteste également le chiffre de 47 départs : "C'est 96 postes supprimés sur l'établissement de Commentry. Après eux, ils font un détail, mais la globalité du projet, c'est bien 96 postes de supprimés. Certainement, il y aura des reclassements mais ça va représenter plus d'une cinquantaine de licenciements. Ce n'est pas possible. Depuis octobre 2022, il y a des départs, des démissions, des licenciements, 96 personnes, ça comprend ces gens-là.” La direction maintient : “Si on regarde le nombre d’employés du site au 1er décembre 2023, à l’issue du projet, on aura 47 employés de moins. Le chiffre de 96 ne prend pas en compte les nouveaux postes créés”, affirme Sébastien Ferard. 

"C’est un séisme sur Commentry"

Les syndicats s’organisent déjà pour lutter contre cette réorganisation : "On va organiser une assemblée générale de tous les syndiqués de la CGT. Ensuite, on va faire face. On va essayer de faire des rassemblements avec les salariés pour leur expliquer, pour leur dire que rien n'est perdu. Aujourd'hui, tout le monde a un poste et il va avoir se battre pour maintenir ces postes. On va certainement aussi essayer de rencontrer les politiques parce que l'impact va être monstrueux économiquement. Ça va être une catastrophe.” Du côté des élus, on s’inquiète également de ce projet. Sylvain Bourdier, maire (DVG) de Commentry, alerte : “C’est un séisme sur Commentry parce que la synthèse de la méthionine a été inventée et développée à Commentry. La voir aujourd'hui développée ailleurs par le groupe provoque quand même un peu d'amertume à la fois chez les salariés actifs, les salariés retraités et une part de la population. Je rappelle aussi quand même que c'est cette méthionine qui causait une odeur qui n'était pas toujours agréable et qu'on a supportée. Aujourd'hui, la voir disparaître, c'est un peu dur.” 

Un site plein d'avantages

De nombreuses questions restent sans réponses pour cet élu, qui vante pourtant les avantages de ce site industriel : "Quid des salariés qui seront impactés ? Comment est-ce que ça va être géré ? Quel avenir pour le site industriel ? Il va falloir qu'on travaille. Ce matin, je me suis entretenu avec madame le préfet qui souhaite qu'on travaille main dans la main avec les services de l'État, pour essayer ensemble de trouver des solutions. C'est un site qui a d'énormes avantages. Il a du terrain, on a une desserte ferroviaire, on a de l'eau industrielle en quantité puisqu'on a 2 barrages qui servent uniquement à l'eau industrielle. Maintenant, on a de l'énergie disponible puisqu'on a l’une des plus grosses cogénérations d'Europe sur site. On a un savoir-faire dans la chimie reconnu et un site Seveso “seuil haut”.” 

"Maintenir une présence sur le territoire"

Il est prévu que le site concentre son activité sur la production de Smartamine, “produit à forte valeur ajoutée dont Commentry est le premier fabricant mondial et de Vitamine A, activité pour laquelle 2 millions d’euros ont récemment été investis.” Adisseo indique également avoir investi près de 30 millions d’euros à Commentry entre 2021 et 2023, et “envisage un investissement supplémentaire” de 20 millions d’euros en 2025. Sébastien Ferard développe : “Dans cette enveloppe, il y a un montant dédié à revitaliser la plateforme industrielle de Commentry pour maintenir une présence sur le territoire. On a 3 pistes pour maintenir cette présence : la croissance des volumes de produits de spécialités à haute valeur ajoutée, des investissements pour améliorer la compétitivité sur le site, ou un renforcement de l’attractivité du site en mettant à disposition des terrains et des savoir-faire pour attirer de nouvelles sociétés.” La société prévoit un plan de sauvegarde de l’emploi, qui comprend un plan de départs volontaires et des reclassements internes “pour tendre vers zéro départ forcé”, affirme Sébastien Ferard. 

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