Davantage qu'un chien, c'est un monument du patrimoine alpin. Le Saint-Bernard, ce colosse des montagnes, sauveur des victimes d'avalanches, comptait déjà deux cols alpins portant son nom. Il aura, à partir de l'été 2025, un parc de 25 000 mètres carrés qui lui sera entièrement consacré en Suisse, au pied du col du Grand-Saint-Bernard.
"Ce parc est un projet qui, indéniablement, a du chien", n'a pu s'empêcher de déclarer un édile suisse, fin janvier, lors de la pose de la première pierre du futur parc thématique Barryland de Martigny, dans le canton du Valais, entièrement consacré au Saint-Bernard.
Barry, comme le nom du Saint-Bernard le plus légendaire de l'histoire. Celui qui, après avoir sauvé 40 naufragés de la neige, aurait eu le malheur de secourir un déserteur de l'armée napoléonienne en 1814. Ce dernier l'aurait tué à son réveil, le prenant pour un loup.
Le plus ancien élevage au monde
Barry, c'est aussi le nom d'une fondation suisse. Outre Barryland, le musée vivant du chien national suisse qu'elle abrite, la fondation Barry du Grand Saint Bernard se targue d'abriter le plus ancien élevage de l'histoire de la race.
"La présence des chiens Saint-Bernard à l'hospice du col du Grand-Saint-Bernard [à la frontière italo-suisse, NDLR] est attestée par des documents datant de 1695", aime rappeler Jean-Maurice Torney, qui préside aux destinées de l'institution canine.
Présents dans certaines familles nobles des cantons suisses ou auprès des moines de l’hospice du Grand-Saint-Bernard, puis à celui du Petit Saint-Bernard, à la frontière franco-italienne, ces chiens furent d'abord utilisés pour protéger les ecclésiastiques présents sur les deux cols. Mais aussi, et de plus en plus au fil des siècles, pour accompagner les voyageurs, les retrouver et souvent sauver ceux qui s’étaient égarés dans la neige et le brouillard.
"Ce sont des chiens qui sont très proches des hommes et de leurs maîtres en particulier. Ils ont aussi leur petit caractère. S'ils n'ont pas envie de faire quelque chose, ils ne le feront pas. Mais les Saint-Bernard restent des chiens de famille et de compagnie hors pair", assure Joëlle Meillard, gardienne du musée vivant Barryland, à la télévision italienne RAI valle d'Aosta.
Une proximité avec l'homme qui en fait un chien mythique. En premier lieu chez nos voisins helvètes, où il est considéré comme le chien national depuis 1884.
La fondation et son Barryland
Ce n'est qu'en 2005, en revanche, que, forte de ce glorieux passé, la fondation a repris des mains des chanoines de l'hospice du Grand Saint Bernard, l'élevage des célèbres sauveteurs des neiges.
"Pour l'heure, nous avons une trentaine de chiens dans un chenil situé à deux pas du musée Barryland", explique encore Joëlle Meillard. "Ils sont dans des parcs où ils peuvent jouer, faire leur vie de chiens, en somme. On leur fait faire des promenades, des jeux, on les soigne aussi."
Ce jour-là, par exemple, c'est brossage de dents et coupe de griffes. Il s'agit de faire bonne figure devant les milliers de touristes que le Saint-Bernard fascine.
"Sur les 83 000 visiteurs de l'an dernier, on a 50 % de Suisses, et 50 % d'étrangers", confie avec fierté le président de la fondation. Alors, chaque jour, neuf chiens viennent au musée vivant pour passer la journée. Se faire admirer, cajoler et aussi, écouter les sempiternelles questions des adultes sur leur poids, leur taille ; les cris de joie, les exclamations de bonheur que suscite, chez les enfants, le légendaire cerbère des montagnes.
"Actuellement, tout se passe sur un espace d'environ 5 000 mètres carrés", explique Jean-Maurice Torney. "Avec la création du nouveau parc, on va en ajouter 17 000 autres qui nous permettront de présenter davantage de chiens et de façon plus régulière à nos visiteurs".
La griffe... et la patte du Saint-Bernard
"C'est fascinant de constater à quel point ce chien a pris une place particulière dans le cœur des gens", soulignait la présidente de la ville de Martigny devant les caméras de nos confrères suisses de la RTS, le jour de la pose de la première pierre du futur parc à thème.
Une fascination décuplée à chaque nouvelle naissance de chiots. La dernière en date, il y a un an (11 chiots en une seule portée), avait provoqué une hausse de fréquentation sans précédent, du musée comme du site internet de la fondation.
"L'actuel Barryland ne peut plus faire face au nombre croissant de visiteurs", constate Jean-Maurice Tornay. D'où l'agrandissement prévu qui jouxtera le bâtiment actuel et "aura la particularité d'avoir la forme d'une empreinte de patte de chien", a-t-il précisé, "les coussinets faisant office d'enclos pour les Saint-Bernard". Des animations s'y dérouleront : pour présenter comment on soigne, on toilette ou on éduque les chiens. L'un des enclos étant réservé aux chiots.
Quant à l'espace muséal, il sera composé de cinq salles. On y verra, on y vivra Saint-Bernard : son histoire, sa légende, son évolution... Aucun aspect de sa vie, et même de son anatomie ne sera laissé dans l'ombre pour les générations actuelles et futures.
La preuve, une "capsule temporelle" a été coulée dans le béton. Elle contient notamment des poils de Saint-Bernard et un journal du jour de la pose de la première pierre du futur parc thématique.