C'est un phénomène qui inquiète les autorités de santé. De nombreuses pharmacies en zone rurale ou périurbaine ferment définitivement leurs portes. Victimes collatérales de la désertification médicale, elles ne trouvent pas de repreneur. Exemple dans la Drôme.
Vingt-neuf ans que Fabienne Alabéatrix est fidèle au poste, derrière le comptoir de sa pharmacie à Cornas, dans la Drôme. Six jours sur sept, du lundi au samedi. Elle est la seule pharmacienne de ce village de 2200 habitants, mais depuis un an, la pérennité de son commerce est menacée.
"Les deux médecins qui étaient installés tout à côté de la pharmacie, sont partis à la retraite l'an dernier, à deux mois d'intervalle. Or la pharmacie tournait essentiellement grâce à leurs ordonnances. Depuis leur départ, on a perdu pratiquement 50% de notre patientèle", soupire Fabienne.
Passer la main, mais à qui ?
Pourtant, la pharmacienne n'est pas du genre à se laisser abattre. Pour booster son activité, elle vient d'investir dans une borne de téléconsultation. "C'est ma dernière chance pour avoir quelques ordonnances. De toute façon, le principal, c'est de rendre service aux personnes qui ont de plus en plus de mal à obtenir un rendez-vous avec un médecin."
À 68 ans, Fabienne aimerait bien pouvoir passer la main. Elle a mis son commerce en vente il y a un an. Sans succès. Si elle ne trouve pas de repreneur, la seule pharmacie du village risque donc de fermer définitivement.
Pour ses patients, c'est une sombre perspective. "On avait l'habitude, depuis 13 ans que nous habitons là. Nous venons toujours dans cette pharmacie. Si elle disparaît, il faudra aller à Saint-Péray ou à Guilherand-Granges. Ça ne sera pas intéressant pour nous", déplore Marie-Jeanne, une fidèle cliente. "Cette pharmacie, on y vient souvent. Avant, ma maman y venait aussi."
Les jeunes pharmaciens boudent les officines
Cornas n'est pas le seul village de la Drôme où la pharmacie est en sursis. En 2022, en Auvergne Rhône-Alpes, 25 officines ont disparu. Une mauvaise tendance qui préoccupe l'Union régionale des professionnels de santé.
Pour Kevin Phalippon, son vice-président et lui-même pharmacien, "c'est un phénomène qui est à surveiller dans les prochaines années car il pose un problème de desserte des médicaments au niveau des territoires. Il est clair que sur ces officines, il existe un manque d'attractivité qui est problématique. Les jeunes notamment ne reprennent pas ces officines, qui sont donc obligées de restituer leur licence. Ça pose un gros problème de desserte des médicaments au niveau local."
L'URPS Auvergne Rhône-Alpes vient de lancer une vaste étude pour identifier précisément les pharmacies les plus fragiles. Ses résultats seront publiés d'ici début novembre.