Des individus armés se sont présentés devant une école du quartier du Plan à Valence lundi 05 juin, et ont menacé de venir à la sortie des cours pour "tuer tout le monde". Les équipes éducatives de trois écoles ont décidé d'exercer leur droit de retrait.
Un groupe de six individus armés s'est rendu à proximité de l'école Jules Vallès de Valence dans le quartier du Plan vers 13 h 30 ce lundi. Une rixe a éclaté avec un autre groupe du quartier de Fontbarlettes en présence de parents et d'enfants.
"J'étais avec ma fille, de retour du déjeuner et j'ai vu des jeunes se taper dessus, ça criait, raconte une mère de famille en larmes. Après, une voiture est arrivée avec des armes qu'on voyait sorties par la fenêtre. Et ils ont crié : Enfants, pas enfants, on va tous vous tuer ce soir. Plusieurs personnes de l'école sont venues nous aider à entrer à l'intérieur et ont rassemblé les enfants à l'abri".
Deux heures après les faits, des parents étaient toujours dans l'école, en état de choc. "J'ai peur pour la suite, je ne sais pas ce qui va se passer" explique un parent d'élève.
Le téléphone d'un des directeurs des trois écoles n'arrête pas de sonner. "Ça me fait peur d'amener mes enfants à l'école demain", explique un père de famille. "Je ne veux pas qu'il arrive quelque chose et que je le regrette toute ma vie, donc tant que ça se passe comme ça, mes enfants n'iront plus à l'école".
"On a décidé de s'arrêter pour que les autorités prennent en compte cet état de terreur", lui répond l'enseignant. "On le regrette, mais c'est devenu trop dangereux pour tout le monde".
Climat de guérilla
Des parents et des élèves ont été directement menacés, selon plusieurs témoins.
Des menaces à replacer dans le climat de violence et de guérilla urbaine qui agite deux quartiers de Valence depuis plusieurs mois. En dix jours, quatre hommes ont été tués par balle.
Entre vengeances personnelles et règlements de compte liés au trafic de drogue, la situation a atteint un paroxysme de violence au cours du mois de mai 2023. Mais jamais les écoles n'avaient été le théâtre de ces affrontements. Plusieurs collectifs de parents avaient cependant alerté quant aux conditions d'insécurité dans lesquelles grandissent leurs enfants.
Plusieurs cellules psychologiques déployées dans les établissements ont permis de constater de nombreux cas de syndromes post-traumatiques chez les élèves comme chez leurs parents du fait des nombreux tirs à l'arme lourde dans le quartier.
"Il y a une guerre"
"On a l'impression que c'est devenu normal. Mais non ! Personne ne devrait vivre dans cette peur. On se sent abandonnés depuis 20 ans, mais là, c'est plus que de l'abandon" estime une personne qui a grandi à Fontbarlettes. "Il y a une guerre", dit-elle.
Les témoignages se suivent et se ressemblent. Mais toujours anonymes, car la peur, voire la psychose, ont gagné les esprits. Il règne dans ces deux quartiers de Valence, une ville moyenne du sud-est de la France, un climat de conflit armé avec des réflexes de survie.
Il y a, par exemple, ce père de famille, qui ne laisse plus son fils de neuf ans aller au foot tout seul le mercredi, "car c'est trop dangereux". Des habitants qui se cachent sous leur table quand ils entendent une détonation ou sursautent dans la rue quand les enfants jouent à cache-cache.
Au moins deux familles, selon nos sources, ont choisi de fuir le quartier, car elles avaient été directement menacées.
Présence policière à la sortie de l'école
La préfète de la Drôme, le maire de Valence et le directeur académique ont condamné dans un communiqué commun "les agissements qui ont pour seul but d’entretenir un climat anxiogène dans des quartiers déjà fragilisés par la délinquance".
"Des équipages de police, municipale et nationale, seront présents pour sécuriser les abords des écoles et dès jeudi, des cellules d’écoute seront mises en place dans les deux écoles par l’Éducation nationale", précise le communiqué officiel.