La population de Saint-Nazaire-le-Désert a pratiquement doublé depuis le 11 mars dernier. La petite commune drômoise accueille une trentaine d'adolescents venus d'Ukraine. Ce lundi 21 mars, c'était un jour particulier : leur premier cours de français.
"Je m'appelle"... tout commence avec les présentations. Nikita, Appolinaria, Denis ou encore Nastya ont assisté à leur tout premier cours de français ce lundi matin, dans la salle des fêtes de St-Nazaire-le-Désert. Une salle de classe improvisée. C'est Fanny Thery-Gohier, qui dispense cette initiation à la langue de Molière. De son côté, pour se faire comprendre, elle utilise ses notions de langue russe. Ancienne enseignante, elle n'a pas hésité à apporter son aide. "C'était une évidence. J'ai des ados, dans une situation comme cela, j'aimerais qu'ils se retrouvent dans un village comme celui-ci et que des gens acceptent de les aider", explique-t-elle.
Cet apprentissage de la langue française est aujourd'hui devenu indispensable pour ces adolescents arrivés dans la petite commune drômoise le 11 mars dernier après avoir quitté leur Ukraine natale, en proie aux bombardements. Il y avait peu d'appréhension chez ces jeunes ce matin qui se connaissent. "On forme comme une grande famille," assure Ana, 16 ans. Malgré les circonstances, il y a de larges sourires sur les visages de ces jeunes ukrainiens, assidus dans l'apprentissage.
"C'est cool mais un peu difficile parce que la langue française est compliquée, d'autant que notre enseignante ne parle pas très bien Russe", reconnaît Nastya, en souriant. Mais pour l'adolescente, c'est une étape importante car elle envisage peut-être de vivre en France.
D'autres sont plus partagés. "Ici c'est super mais je préfèrerais être en Ukraine", explique Nicolia. Le français, c'est une langue qu'il souhaitait apprendre mais les circonstances tragiques ont précipité les choses.
Un accueil dans la Drôme
Ces adolescents ukrainiens, 35 au total, ont trouvé refuge à Saint-Nazaire-le-Désert. Ils sont arrivés dans la Drôme le 11 mars dernier, en compagnie de quelques adultes, dont Esther. Cette Ukrainienne de 47 ans est une amie de Patrick Schambel. Les adolescents sont logés chez ce dernier, sur les hauteurs du village. C'est le Drômois qui a organisé un convoi de mini bus qui les a conduits en France depuis la frontière polonaise. Tout s'est fait en une semaine.
Pourquoi avoir accueilli tout ce petit monde ? Patrick Schambel a beaucoup de connaissances en Ukraine, des amis, des membres de sa famille. "Esther connaissait la maison et a sollicité mon ex-épouse pour savoir si je pouvais accueillir des Ukrainiens", résume le Saint-Nazairais. Esther venait régulièrement passer des vacances dans cette grande maison, la résidence secondaire de Patrick Schambel.
Tout le monde est logé, tout le monde a un toit, tout le monde a un lit, c'est le principal.
Patrick Schambel, hôte des réfugiés ukrainiens
"Je ne me serais pas imaginé refuser. Aujourd'hui, la maison est bien remplie", assure-t-il. La bâtisse peut accueillir en temps normal dix personnes, ils sont aujourd'hui le double. Un peu plus loin, une dizaine d'autres jeunes sont hébergés dans une ferme voisine.
Depuis leur arrivée, les habitants de la commune ont multiplié les gestes de solidarité. Les Saint-Nazairais sont heureux car ces jeunes apportent "de la vie" dans le village isolé. La population a presque doublé d'un coup. "Les habitants sont très accueillants. Mais une des difficultés pour ces jeunes, c'est qu'ils ne savent pas pour combien de temps ils sont là. Ils sont séparés de leurs parents et ils sont inquiets. Mais ils sont contents d'être ensemble", assure Patrick Schambel.
Ces jeunes devraient rejoindre une structure un peu mieux adaptée d'ici un mois. Mais leur seul souhait : y rester le moins longtemps possible.
On dénombre 10 millions d'Ukrainiens déplacés depuis l'invasion russe. Soit plus d'un quart de la population du pays. Près de 3,5 millions de personnes ont fui l'Ukraine depuis le 24 février, selon le décompte de l'ONU publié ce lundi 21 mars. Quelque 90% d'entre eux sont des femmes et des enfants. La Pologne accueille à elle seule plus de la moitié de tous les réfugiés.