Ce mardi 17 décembre, le PDG du groupe Indexia a été reconnu coupable de pratiques commerciales trompeuses. Il a été condamné à 2 ans de prison, dont 16 mois ferme et 300 000 euros d'amende, dans le cadre d'une vaste affaire d'escroquerie. Sa condamnation est en lien avec des milliers de demandes de résiliation et de remboursements de contrats d'assurance pour leurs appareils multimédia.
Le couperet est tombé pour Sadri Fegaier, le PDG drômois du groupe Indexia. Il a comparu fin septembre devant le tribunal correctionnel de Paris. La justice vient de le condamner ce 17 décembre à une peine de deux ans de prison, dont 16 mois de prison ferme. À l'issue du délibéré, Sadri Fegaier et ses avocats sont sortis de la salle d'audience sans faire de commentaire. Ce dernier dispose de 10 jours pour faire appel.
Le tribunal correctionnel de Paris a aussi condamné six sociétés du groupe à des amendes allant de 150 000 euros à 1,5 million d'euros.
Prison ferme
Le tribunal n'a cependant pas ordonné l'exécution provisoire de la peine de prison ferme comme l'avait requis le parquet lors de l'audience. La partie ferme n'est pas aménageable, et les huit mois de prison restants sont assortis du sursis probatoire pendant deux ans, au cours desquels Sadri Fegaier devra rembourser les victimes et le Trésor public, a précisé la présidente, qui a lu durant deux heures la décision. En plus de l'obligation d'indemniser les victimes, l'ex-PDG doit en effet plus de 14 millions d'euros à l'Urssaf.
L'homme d'affaires de 45 ans écope également de 300 000 euros d'amende et d'une interdiction de gérer une entreprise durant cinq ans. Le tribunal correctionnel de Paris a qualifié l'affaire d'"exceptionnelle", au vu des milliers de victimes dans ce dossier.
Réactions
"C'est vraiment une condamnation exemplaire", a estimé Me Emma Leoty, avocate de plusieurs victimes. "Ce n'est que le début, nous allons tenter de tout faire pour obtenir le remboursement des milliers d'euros prélevés sur leurs comptes", a-t-elle ajouté qualifiant cette condamnation de "première pierre à l'édifice".
"C'est une décision à la hauteur de la gravité des faits, qui a tenu compte de la détresse des consommateurs", a abondé Me Alexis Macchetto, avocat de l'association de consommateurs UFC-Que choisir.
"Ça concrétise la fin d'une aventure qui au final a occasionné quand même pas mal de dégâts chez les salariés puisqu’aujourd'hui, ils sont parfois en difficulté pour retrouver un travail du fait de la réputation de leur précédent employeur", a réagi auprès de l'AFP le délégué syndical CFDT d'Indexia, Nicolas Zeimetz.
La peine prononcée a tenu compte du fait que Sadri Fegaier n'a exprimé "aucune remise en question" ni "à aucun moment démontré une quelconque volonté d'amendement" lors du procès, a souligné la magistrate.
"Déloyauté des pratiques"
C'est l'une des plus vastes escroqueries jamais jugées en France. Durant près de dix ans, entre 2014 et 2023, Sadri Fegaier, avec les sociétés SARL SFK Group, SFAM Celside Insurance, Foriou, Cyrana, Hubside et Serena, sont soupçonnés d'avoir fait souscrire indûment à des milliers de consommateurs des contrats d'assurance pour leurs téléphones et ordinateurs.
Au moment de leurs achats, les consommateurs se voyaient proposer des assurances pour une quinzaine d'euros par mois. Des années plus tard, ils sont des centaines à avoir vu les prélèvements se multiplier, atteignant jusqu'à des dizaines de milliers d'euros au total, sans avoir signé d'avenant ou affirmant n'avoir même jamais signé de contrat d'assurance. Le montant des remboursements non satisfaits a été chiffré à près de 22 millions d'euros par la justice.
Le tribunal a considéré que le groupe avait poursuivi, pendant près de 10 ans, "ses pratiques délictuelles pour assurer le maintien de sa croissance et de son chiffre d'affaires". "La déloyauté des pratiques mises en évidence était la condition même de la survie de la société", a-t-il estimé.
Procédure complexe
L'homme d'affaires de 45 ans ainsi que les sociétés SARL SFK Group, SFAM Celside Insurance, Foriou, Cyrana, Hubside et Serena ont comparu fin septembre à Paris. Il leur était notamment reproché d'avoir élaboré une procédure complexe visant à les décourager dans leurs demandes de résiliation ou de remboursements.
Face au silence des entreprises concernées, des clients abusés avaient alerté UFC-Que choisir et transmis des signalements à la répression des fraudes, qui avait ouvert une enquête en 2018. Celle-ci s'était soldée en 2019 par une transaction pénale de 10 millions d'euros. Les réclamations avaient pourtant continué, de nombreux consommateurs dénonçant des demandes de résiliation et de remboursement jamais appliquées.
À l'audience, près de 2000 personnes se sont constituées parties civiles.
L'ampleur du dossier minimisé
Depuis l'ouverture du procès en septembre 2024, Sadri Fegaier a nié l'ampleur du préjudice. Il estime que l'affaire ne concerne qu'une infime minorité de clients. Pour les parties civiles, l'argument ne tient pas la route. "Il devait savoir. Certes, il n'était pas le formateur de chaque salarié. Par contre, Sadri Fegaier créait les offres avec son principal collaborateur, Olivier Cotte. C'est Sadri Fegaier qui avait la main sur toute l'organisation de l'entreprise. Il ne pouvait pas méconnaître les pratiques commerciales qu'il demandait à ses salariés d'exercer", explique Nicolas Zeimetz.
Cette condamnation n'est pas le dernier épisode de l'affaire Indexia. Plusieurs procédures au civil ont été lancées. Plusieurs des biens immobiliers du mis en cause ont été saisis.