Nicolas d'Aragon (LR) a décidé de supprimer plusieurs aides municipales si l'un des membres d'une famille a été condamné pour des troubles à l'ordre public, s'il a fait l'objet d'un rappel à l'ordre, ou en cas de refus d'accompagnement de la part des parents.
Le conseil municipal de Valence a voté, le 14 décembre 2020, une mesure qui se veut dissuasive à l'égard des fauteurs de troubles : toute famille dont un des membres fait l'objet d'un rappel à l'ordre ou d'une condamnation pour trouble à l'ordre public se verra privée d'aides sociales de la ville.
Nicolas Daragon, le maire de Valence persiste et signe : "Je ne supporte plus qu'une minorité d'enfants bénéficient d'aides de la mairie alors qu'ils empêchent de vivre la majorité des habitants de leur quartier. On va taper là où ça fait mal!" a-t-il déclaré dès le lendemeain du vote au micro de nos confrères de France Bleu.
Les familles des #delinquants se voient supprimer leur accès aux aides municipales pour les services non obligatoires (CME, chèque sport et culture) et l’accès aux aides facultatives du CCAS #securite #valence #delinquance @Prefet26 @PoliceNat_26 #ConseilMunicipal pic.twitter.com/zKwL9r5aw2
— Valence (@VilledeValence) December 14, 2020
A la Toussaint, plusieurs nuits de violences urbaines avaient secoué différents quartiers de la ville. En mai 2020, les locaux de Valence Romans Agglo avaient été incendiés et en février, des caillassages de bus avaient poussé les chauffeurs à exercer leur droit de retrait. Une accumulation qui entretient un sentiment d'insécurité, même si le maire rappelle qu'il s'agit d'une minorité de délinquants. Une soixantaine de personnes sont identifiées par les services municipaux et pourraient voir les aides supprimées dans leurs familles.
En clair, plus de subvention pour la cantine, ni pour l'achat de tickets de transport ou des chèques Sport et Culture. Nicolas Daragon affirme également que des expulsions de logements gérés par le bailleur public local, peuvent être envisagées. Une soixantaine de familles ont déjà été expulsées cette année selon l'élu, dont une quarantaine seraient parties d'elles mêmes.
L'exemple de Rillieux-la-Pape
Cette décision de supprimer les aides de la ville avait déjà été prise par une autre mairie de droite de la région : Alexandre Vincendet, maire LR de Rillieux-la-Pape, avait en effet également soumis cette idée à son conseil municipal. Mise en place en 2018, cette mesure a abouti à la convocation d'une trentaine de jeunes en deux ans par les équipes de la municipalité. Sur ces trente cas, 3 familles se sont vues supprimer les aides pendant un an, après avoir refusé d'être accompagnées.
"On ne retient qu'une partie de cette mesure" regrette Alexandre Vincendet. "Mais nous proposons systématiquement un accompagnement parental. Demain je dois recevoir deux jeunes de 13 et 16 ans. Ils ont détérioré une caméra de vidéoprotection et dégradé un poste de police municipale. Il y a un souci quand à cet âge on se retrouve dans cette situation, pour moi c'est aussi une question de protection de l'enfance" explique-t-il.
Sollicitée, l'association La Sauvegarde de l'enfance, qui vient justement en aide aux jeunes en difficultés sociales et /ou judiciaires n'a pas souhaité répondre à nos questions. En 2019, cette structure avait tiré la sonnette d'alarme en suspendant temporairement ses activités pour dénoncer notamment le manque de moyens dans les tribunaux pour donner suite aux différents dossiers. 500 dossiers de mineurs étaient alors en attente au tribunal pour enfants de Valence.
Deux ans après la mise en place de cette mesure à Rillieux-la-Pape, une maison pour la famille et la parentalité a été installée, et prévoit des ateliers pour les parents et des solutions pour les jeunes décrocheurs. "Des stages de rupture leur sont proposés, c'est à dire qu'on les fait sortir de leur quartier."
Des enjeux locaux et un débat national
A Valence, cette mesure controversée est dénoncée par l'opposition, notamment la France Insoumise qui y voit "un échec des actions précédentes et des risques de délit de faciès". A noter également qu'un des premiers partis à avoir initié cette idée était le Rassemblement National, qui dans son dernier livre blanc pour la sécurité, sorte de pré-programme électoral de Marine Le Pen pour 2022, propose qu' en cas d'acte d'incivilité, "une sanction visera les parents, par suppression totale (par exemple en cas de récidive) ou partielle des allocations familiales et sociales, prononcée par le Parquet à titre provisoire et définitif par le juge."
Nul doute que la sécurité et ce type de décisions locales prises à Valence et Rillieux-la-Pape vont ré-émerger dans le débat national et probablement réapparaître dans les propositions de certains candidats en 2022.