Le Fin Gras du Mézenc, une viande bovine d'exception produite sur le plateau entre la Haute-Loire et l'Ardèche, fait de plus en plus d'adeptes. La saison pendant laquelle il est possible de dénicher ce produit du terroir local débute en février et se poursuit jusqu'en juin.
C'est le produit d'un savoir-faire très apprécié des locaux et des connaisseurs. La saison du Fin Gras du Mézenc, une viande bovine labellisée AOC depuis 2006 et AOP depuis 2013, est sur le point d'être ouverte.
L'abattage de ces bêtes, élevées traditionnellement sur le plateau du Mont-Mézenc, entre la Haute-Loire et l'Ardèche, selon un cahier des charges bien précis, n'est en effet autorisé que du 1er février au 1er juin. La viande est ensuite disponible sur les étals à la mi-février.
"La bête doit être née sur la zone de l'AOP et être déclarée à l'association Fin Gras du Mézenc, explique Alison Salat, technicienne et animatrice de l'association. Les bêtes sont mises en estive l'été et rentrées en étable avant le 1er novembre. Elles passent 110 jours en étable, nourries au foin récolté sur la zone Fin Gras, avec un complément alimentaire spécialement choisi par l'AOP."
De plus en plus de clients
Ce produit du terroir local est de plus en plus demandé chaque année. En 2020, ce sont 150 boucheries qui commercialiseront de la viande labellisée Fin Gras du Mézenc, dans la région Auvergne-Rhône-Alpes mais aussi dans le Pas-de-Calais, l'Ille-et-Vilaine, l'Yonne ou encore les Alpes-Maritimes, contre 135 en 2019.
"Les gens attendent cette viande parce que depuis des années on leur parle de ce produit, qui est exceptionnel non pas grâce à une race spécifique mais du fait d'un terroir particulièrement riche, explique Gabriel Gauthier, boucher à Clermont-Ferrand. Les clients sont sensibles à l'aspect local, parce qu'il y a un côté sentimental et d'appartenance. Mais il y a aussi la qualité de cette viande, qui est reconnue par les plus grandes tables parisiennes, comme le restaurant d'Alain Ducasse."
Pour ce commerçant, né dans la région et dont le père était aussi boucher, mettre en valeur le Fin Gras était une évidence.
Quand on fait du Fin Gras, on se déplace dans les étables, on met les bottes dans le fumier, et on va voir les bêtes, on estime leur maturité, leur prix. C'est se reconnecter avec notre propre métier. On ne reçoit pas des muscles sous-vides. L'éleveur, je le connais, je connais sa famille, ses problèmes, c'est une chaîne qui ne faut pas briser. Ce n'est pas à la portée de n'importe qui, c'est de l'artisanat.
- Gabriel Gauthier, boucher à Clermont-Ferrand
Une tradition ancestrale
Cette année, une centaine d'éleveurs labellisés devraient fournir environ 1.250 bêtes sous l'appellation Fin Gras du Mézenc, contre 1.170 l'an dernier. Si le marché reste de niche, il a beaucoup évolué depuis la première appellation en 2006, qui n'avait produit que 370 bêtes.
Ces génisses et ces veaux doivent respecter le cahier des charges de l'AOP, qui préconise que les bovins soient élevés pendant au moins deux ans, mais certains atteignent jusqu'à 3 ans.
Florian Gibaud, producteur à Saint-Front, en Haute-Loire, proposera cette année 12 bêtes à la vente directe, soit le double de l'année passée. Pour lui, participer à cette filière redonne du sens à l'élevage.
Il s'agit d'une tradition ancestrale, contraire à l'agriculture rentable que l'on nous demande de faire aujourd'hui. C'est comme ça que faisaient les paysans à l'époque. On garde plus longtemps nos bêtes, mais finalement, c'est un investissement. Elles sont engraissées plus lentement, avec un foin fauché en altitude où la flore est riche de plus de 130 espèces de plantes, ce qui donne du "bon" gras et une viande dite "persillée".
- Florian Gibaud, producteur de Fin Gras
Ce type d'élevage se révèle en effet plus rentable sur la durée pour les producteurs. Une viande Fin Gras se vendra en moyenne 1€ de plus qu'une viande classique. La nourriture des bovins, issue de pâturages naturels, ne nécessite pas de faire des semis, ce qui est d'autant plus économique.
La reconnaissance de la filière au niveau national, et la volonté générale de privilégier la qualité sur le prix, aide aussi les acteurs de la filière à s'y retrouver. "Quand on parle de viande, la qualité est primordiale, car on parle de santé, de la santé de nos enfants", conclut Gabriel Gauthier.