La grève contre la réforme des retraites affecte aussi le tout nouveau Léman Express. Le RER transfrontalier affiche encore un trafic perturbé ce jeudi. Les Suisses, versant peu dans la culture de la grève, peinent à comprendre les moyens d'action français.
Toutes les mains se lèvent en assemblée générale quand est posée la question : "Qui est pour la reconduction ?" Côté français, la grève contre la réforme des retraites mobilise toujours les syndicats, notamment dans le secteur des transports. Et le Léman Express, mis en service le 15 décembre, ne fait pas exception à la règle.
Depuis le lancement du RER transfrontalier, la grève est largement reconduite. Le personnel se dit attaché à cette nouvelle ligne reliant Annemasse (Haute-Savoie) à Genève, mais pris à la gorge par le projet de réforme des retraites porté par le gouvernement français.
Laury Chatelain, agent flux logistique au technicentre d'Annemasse, gagne 1 400 euros par mois. Un salaire faible en France, quasi-dérisoire en zone frontalière. Et avec le système universel des retraites voulu par l'exécutif, le technicien craint de se retrouver avec une pension insuffisante.
"Si on perd 300 euros, le compte est vite fait : ça fait 900 euros par mois, on ne peut pas vivre. J'ai pas les moyens d'être propriétaire donc d'ici la retraite, j'aurai certainement pas de maison, toujours un loyer à payer et ça, c'est pas possible", estime-t-il. Pour cette raison, Laury en est à son quatorzième jour de grève, soutenu par ses collègues qui reconnaissent que la situation est délicate pour les usagers.
La méthode suisse
"C'est compliqué, je le conçois, moi aussi je fais grève et je perd de l'argent, c'est pas pour le plaisir. Mais est-ce qu'il ne vaut pas mieux perdre 300 euros en un mois que sur toute une retraite ?", questionne Benoit Boué, syndicaliste SUD-SNCF à Annemasse. Alors que la grève contre la réforme des retraites tourne au bras de fer avec le gouvernement, les Suisses suivent les évolutions du mouvement sans trop comprendre. La RTS a d'ailleurs regretté que le lancement du Léman Express ait été "terni" par la grève.
Cette méthode de confrontation directe avec sa direction est bien loin des habitudes helvétiques qui préfèrent généralement la négociation à l'épreuve de force. "Nous, on se parle gentiment : « On voudrait savoir ça, on voudrait savoir comment vous voulez faire ça... ». Nos collègues français c'est : « On veut savoir ça ! ». Mais il faut bien voir qu'en face, quand on demande quelque chose, on nous le donne tandis que nos collègues français on leur dit : « Vous pouvez toujours venir le chercher »", résume Valérie Solano, membre du syndicat des transports SEV Genève.
Les cultures sont souvent bien différentes des deux côté de la frontière, surtout d'un point de vue syndical. Ce qui n'empêchera pas Valérie Solano de rendre visite à ces collègue français ce jeudi en empruntant le Léman Express entre Annemasse et Genève. Trois RER par heure sont attendus.