C'est une première européenne ! Depuis trois ans, les randonneurs du refuge du Col du Palet (Savoie) bénéficient d'une électricité d'origine renouvelable, quelles que soient les conditions météo, et ce grâce au stockage d'énergie par hydrogène. Le dispositif est amené à s'exporter.
Jusqu'ici, Nicolas Vernon avait les yeux rivés sur la météo. Pas de soleil, pas de machine de linge, pas de douche parfois. Les panneaux solaires du refuge du Col du Palet dont il est le gardien, ne produisaient pas suffisamment d'énergie les jours de grisaille, l'unique solution restant le groupe électrogène du bâtiment - situé à 2600 mètres d'altitude au beau milieu du parc de la Vanoise, au-dessus de Tignes.
Pourtant, les jours d'ensoleillement ne manquent pas sur ce secteur de haute-montagne. Le problème : le soleil n'est pas une énergie que l'on met de côté pour plus tard, il ne se stocke pas. Le refuge perdait plus 50% de l'énergie produite sur une année. Mais les choses ont changé.
Depuis trois ans, un prototype de pile à hydrogène permet d'emmagasiner cette énergie gaspillée : le Col du Palet est devenu auto-suffisant en électricité. Comment le dispositif fonctionne-t-il ? "Les éléments qui permettent de fabriquer l'hydrogène en premier lieu sont les capteurs photovoltaïques qui sont en façade du refuge", explique Emmanuel Ballot, dirigeant chez Gest'Hydrogène. "Ces capteurs permettent de faire l'électrolyse de l'eau. Cet hydrogène va être stockée dans des réservoirs puis, quand on a besoin, on recombine cet hydrogène dans une pile à combustible pour produire de l'électricité." Au Col du Palet, sur la commune de Pesey-Nancroix (Savoie), les réserves ainsi stockées permettent de tenir une dizaine de jours. En trois années d'utilisation de ce système, Nicolas Vernon n'a presque plus utilisé son groupe électrogène.
Une première en Europe, une première en montagne, réalisée par un consortium de 5 entreprises auxquelles le parc national de la Vanoise a fait appel. Le projet a coûté 200 000 euros environ, une somme co-financée par le mécenat d'entreprise et par l'Union europénne, via le Fonds européen de développement économique et régional (FEDER) dans le cadre de son programme opérationnel interrégional du massif des Alpes.
Dans cette région de haute-montagne, il n'est pas rare d'enregistrer des vents à 200km/heure, et le manteau neigeux peut atteindre les trois mètres de hauteur. C'est pour cette raison que le coeur du réacteur - écologique ici -, un petit local en bois de 9m2, a été spécialement isolé pour éviter que l'hydrogène ne gèle l'hiver venu.
Le bâtiment n'est pas entièrement autonome, il s'approvisionne encore en gaz et en bois. En revanche, il est propre : selon le gardien des lieux, aucune émission de gaz à effet de serre depuis l'arrivée du nouveau système.
Pour l'instant le dispositif est assez puissant pour alimenter un chalet de haute montagne de 47 lits. Mais il s'agit là d'un test : le système a vocation à s'exporter à plus grande échelle et dans d'autres régions d'Europe voire du monde entier.
Le reportage de Nathalie RAPUC et Grégory LESPINASSE, avec Philippe CAILLAT.