Un projet d’arrêté préfectoral, émanant des communes de Saint-Gervais-les-Bains, Chamonix et les Houches est actuellement soumis à la consultation publique. Il vise entre autres à chasser « les hurluberlus » qui tentent de gravir le Mont-Blanc dans des conditions inadaptées.
C’est un projet de longue date qui se concrétise en ce moment-même. Le texte a été revu 17 fois avant d’être soumis à la consultation publique : un arrêté préfectoral portant sur la "création d’une zone de protection d’habitats naturels du Mont-Blanc" devrait bientôt être signé par la préfecture de Haute-Savoie. Le projet, annoncé par Emmanuel Macron lors de sa visite à la Mer de Glace le 13 février, vise à protéger le Massif du Mont-Blanc mais aussi à bannir les conduites irresponsables.
Il n’est pas rare que le PGHM intervienne pour porter secours à des personnes mal préparées, peu ou pas renseignées ou qui font sciemment fi des us et coutumes de l’alpinisme : ceux que le maire de Saint-Gervais-les-Bains appelle les « hurluberlus ». Le projet d’arrêté, incluant les cartes des territoires concernés (3 175 hectares au total), est accessible en ligne sur le site de la préfecture.
Dans un tweet, le maire de Saint-Gervais affirme qu'il "reste encore des hurluberlus sur les pentes du Mont-Blanc" :
#saintgervais #montblanc #hurluberlus pic.twitter.com/qiCtod3t5a
— Jean-Marc PEILLEX (@PEILLEX) September 1, 2020
"Souvent, on est à la limite d’en venir aux mains"
Cet été encore, ces "hurluberlus" ont sévi. Parmi les récits les plus notables, un homme a tenté de gravir le Mont-Blanc avec son pitbull - chien classé catégorie 1 – sans muselière. Mais l’animal, en déviant du sentier, a fait tomber des pierres sur des guides de haute-montagne. Un autre était parti pour réaliser l’ascension avec des baskets… et des crampons fixés à l’envers. D’autres étaient à cinq ou six par cordée, etc.Christophe Delachat, guide de Haute-Montagne et membre de la brigade blanche, note en particulier "un gros problème avec les traileurs" qui montent en short et en baskets. "Avec le matériel qu’ils ont, ils n’ont même pas de quoi tenir deux heures", s’inquiète-t-il.
Souvent, on est à la limite d’en venir aux mains. Ils [les traileurs] sont très virulents. Ils nous narguent, ils savent très bien qu’on ne peut pas les verbaliser
D’autant plus que les traileurs effectuent souvent l’ascension la nuit, les membres de la brigade blanche ne les croisent donc qu’au retour. Souvent, ces personnes ne se rendent pas compte des risques qu’elles encourent. Même si les traileurs mettent des crampons sous leurs baskets, ces derniers ne sont pas adaptés à certains types de glace. "Si les crampons n’accrochent pas, ils [les traileurs] peuvent glisser et faire tomber les autres de cordée."
Pas plus de trois par cordée
Interdiction de laisser pénétrer des animaux domestiques, de camper en dehors du camp de base de Tête Rousse, de progresser en cordées de plus de trois personnes, etc. La liste des règles est longue mais nécessaire pour le maire de Saint-Gervais-les-Bains. "Soit on continue à médiocriser et à tuer notre patrimoine, déclare-t-il, en faisant notamment référence au tourisme de masse. Soit on fixe des règles qui vont permettre de conserver un espace de qualité."
Malgré tout, il admet que la montagne a déjà "retrouvé son calme" récemment depuis la mise en place des brigades blanches en 2019 et des patrouilles du PGHM depuis quelques années. Mais pour lui, cet arrêté représenterait une étape supplémentaire, notamment en matière de verbalisation. Il permettrait notamment la mise en place d’une brigade verte. "Il y aura du bleu, du blanc et du vert", se réjouit l’élu.
Un arrêté pour pallier l’existence d’une loi
Contrairement à d’autres sports, l’alpinisme n’est pas soumis à une réglementation écrite mais à "des us et coutumes", explique le maire de Saint-Gervais-les-Bains. "C’est [l’arrêté] ce qu’on a trouvé de plus rapide", explique-t-il. D’après l’élu, il existait "peu d’outils réglementaires" et "en créer prend du temps". "Bien sûr, ce n’est pas parfait. Bien sûr qu’on peut mieux faire. Mais ce n’est pas parce qu’on peut mieux faire qu’il ne faut rien faire". Il y a plus d’une vingtaine d’années, un projet de création d’un parc national avait été en pourparlers mais à l’époque, le maire de Chamonix Michel Charlet, avait refusé par peur d’une mainmise de l’état. Aujourd'hui, Jean-Marc Peillex n'exlut pas cette possibilité.
En attendant la signature de la préfecture qui devrait survenir à l’issue de la consultation publique, le maire de Saint-Gervais-les-Bains a demandé "à ce qu’il y ait une application morale" du texte.