Conflit en Chartreuse : "Un droit imprescriptible", le député écologiste Jérémie Iordanoff défend sa proposition de loi pour l'accès à la nature

La proposition de loi pour "un droit d'accès à la nature" pourrait être étudiée, ce jeudi 4 avril, par l'Assemblée nationale. Un texte porté notamment par le député isérois Jérémie Iordanoff à la suite d'un conflit d'usage dans les Hauts de Chartreuse, où une partie de la réserve naturelle a été interdite aux randonneurs par le propriétaire des terres.

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La proposition de loi "pour un droit d'accès à la nature" portée par Jérémie Iordanoff, député EELV de la 5e circonscription de l'Isère, et Lisa Belluco (EELV), parlementaire de la Vienne, a reçu un avis défavorable, fin mars, de la part de la commission des lois de l'Assemblée nationale. La proposition pourrait toujours être étudiée ce jeudi à l'hémicycle, à l'occasion de la niche parlementaire du groupe écologiste.

"Visiblement, je crois qu’il y a beaucoup de députés qui ne pratiquent pas la randonnée ou simplement la promenade du dimanche", a réagi Jérémie Iordanoff, lors d'une interview accordée à notre journal ce dimanche 31 mars, après l'avis défavorable de la commission. "Je crois qu’il y a eu dans le débat, on l’a vu en commission, une caricature sur la question du droit à la propriété et la non-prise en compte du droit d’aller et venir, qui est aussi un droit constitutionnel", a t-il poursuivi. 

Un cas d'école dans les Hauts de Chartreuse

Alors que des voix s'élèvent de plus en plus pour réclamer une liberté d'accès aux espaces naturels, l'objectif de cette proposition de loi est d'empêcher certains propriétaires privés d'interdire l'accès à leur terre. Le débat autour de cette question fait rage notamment dans les Hauts de Chartreuse, où une partie de la réserve naturelle a été interdite aux randonneurs par le propriétaire des terrains, le marquis Bruno de Quinsonnas. 

Pour le député isérois Jérémie Iordanoff, le conflit d'usage, qui a été à l'origine de vives polémiques chez les pratiquants de la montagne en Chartreuse, n'est pas un cas isolé et le phénomène pourrait s'étendre partout en France si rien n'est fait.

Si demain, des stations entières sont fermées à la randonnée, vous allez voir une pression très forte de nos concitoyens sur le terrain.

Jérémie Iordanoff, député de l'Isère, lors de son intervention devant la commission des lois.

"Ce qui arrive en Chartreuse est arrivé à Villeneuve-Loubet, est arrivé aujourd’hui dans les Vosges et cela va s’étendre au fur à mesure que le temps avance, sous la pression des assureurs, sous la pression des fédérations ou des chasses privées et sous diverses pressions. Ce sont 75 % des forêts françaises qui sont privées. Dans certaines régions, en Bretagne, c’est 90 %. Si demain, des stations entières sont fermées à la randonnée, vous allez voir une pression très forte de nos concitoyens sur le terrain", a fait entendre le député de 41 ans lors du débat devant la commission des lois.

Une loi appliquée "à des fins détournées"

Dans le viseur des députés : une loi, adoptée en février 2023, qui vise à limiter l'engrillagement des espaces naturels et à protéger la propriété privée". Celle-ci a fixé de nouvelles limites en instituant une contravention dont le montant de l'amende s'élève à 135 euros pour toute personne qui franchirait une propriété privée sans autorisation.

Selon Jérémie Iordanoff, la "loi de 2023 rompt l’équilibre entre propriété privée et droit d’aller et venir. Et donc, il faut enlever cette infraction pénale. Une infraction pénale, c’est pour réparer un dommage créé à la société. Ici, quand on se promène sur une propriété privée, et qu’on ne crée aucun dommage à la société, il n y a pas lieu d’avoir une infraction pénale".

Lors de son intervention Jérémie Iordanoff, a déploré le fait que cette loi sur l'engrillagement soit désormais appliquée par des proprietaires "à des fins détournées" : "On se retrouve sur des propriétés qui n’étaient pas engrillagées et qui deviennent infranchissables. Sur ma circonscription, en Chartreuse, ce sont 750 hectares qui, du jour au lendemain, se sont retrouvés fermés. Ce sont deux itinéraires de randonnée qui ont été détournés et interdits alors qu’ils étaient pratiqués depuis toujours. Et sans raison, ce n’est pas un endroit qui est surfréquenté, il n’y a pas de dégradation majeure, il n’y a pas d’explication logique", a-t-il regretté. 

La loi que nous proposons en réalité, elle est fort raisonnable. (...) Elle propose de revenir au droit antérieur, à la coutume qui est très longue en France, qui est historique, qui est qu’on peut, c’est une tolérance, se promener partout.

Jérémie Iordanoff.

Pour lui, la loi de février 2023 "a été mal appréciée dans la portée qu’elle allait produire sur le terrain. Et finalement ne produit pas les effets escomptés", a-t-il lancé avant de proposer  de "revenir au droit antérieur" qui consacre la liberté d'aller et venir : "La loi que nous proposons en réalité, elle est fort raisonnable. Qu’est-ce qu’elle propose ? Elle propose de revenir au droit antérieur, à la coutume qui est très longue en France, qui est historique, qui est qu’on peut, c’est une tolérance, se promener partout."

Au vu du nombre sans cesse croissant d'interdictions de passage sur leurs terres par des propriétaires, le député écologiste a fait savoir que "ce n'est qu'une question de temps" pour que cette loi soit adoptée. "Mon analyse, c’est que cette loi sera adoptée d’une manière ou d’une autre, soit cette fois-ci, soit l’année prochaine, soit l’année d’après. C’est inéluctable parce qu’on ne peut pas priver les Françaises et des Français d’aller simplement se promener. C’est un droit imprescriptible", a-t-il conclu. 

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