Le diabète, maladie auto-immune, touche de plus en plus d’enfants et d’adolescents, et contrairement aux idées reçues, elle n’est pas due à une mauvaise alimentation. Cyril Ruello, pédiatre au CHU Grenoble Alpes, répond aux questions de France 3 Alpes
Le diabète de type 1, dont le nombre de jeunes atteints augmente de 3 à 4% chaque année, est une maladie auto-immune qui bouleverse le quotidien des enfants touchés ainsi que de leur entourage. A l'hôpital d'Annecy, en Haute-Savoie, le nombre d'enfants diagnostiqués a été multiplié par trois en moins de dix ans. Cela provoque chez eux de lourdes conséquences. En effet, leurs pancréas ne fabriquent plus d’insuline, cette hormone qui permet aux cellules de l’organisme de réguler la quantité de sucres dans le sang.
Idées reçues, symptômes, prise en charge psychologique et progrès scientifiques… Le docteur Cyril Ruello, pédiatre au CHU Grenoble Alpes répond à nos questions.
Quelle est la différence entre le diabète de type 1 et celui de type 2 ?
Cyril Ruello : Dans le diabète de type 1, qui touche en majorité les enfants, le corps ne peut plus fabriquer suffisamment d’insuline, du fait d’un processus d’auto-immunité qui a enlevé la capacité de sécrétion d’insuline.
Le diabète de type 2, qui concerne 90% des personnes diabétique en France, est une résistance à l’insuline. Les personnes touchées fabriquent beaucoup d’insuline, mais elle est inefficace et cela induit une hyperglycémie.
Quels sont les symptômes du diabète infantile ?
Cyril Ruello : Les symptômes du diabète de type 1 sont divers : l’enfant boit et urine beaucoup. Si votre enfant se remet à faire pipi la nuit ou a des accidents réguliers, accompagnés d’une fatigue ou d’une perte de poids inhabituelle, il faut consulter rapidement.
Existe-t-il un accompagnement psychologique pour ces enfants ?
Cyril Ruello : Il est reconnu comme étant nécessaire. Il y a peu de moyens pour le suivi psychologique dans le cas de maladies chroniques actuellement. Mais toutes les équipes du CHU Grenoble Alpes font ce qu’elles peuvent. Nous avons une psychologue dans l’équipe qui a un temps très limité pour les enfants qui sont atteints de diabète type 1, et pourtant, elle prend beaucoup de temps pour eux.
Est-ce qu’on sait quelle est la part de génétique dans cette maladie ?
Cyril Ruello : On sait que le diabète type 1 est une maladie auto-immune, autrement dit, le corps se défend contre lui-même. Ici, le corps fabrique un processus d’immunité qui va détruire les cellules de l’insuline, du pancréas. Pourquoi l’auto-immunité ? Il y a beaucoup de pistes, mais pas une réponse seule. On sait qu’il y a une petite part de génétique, une part environnementale, et beaucoup de choses que l’on ne connaît pas.
Dans la hausse des cas de diabète type 1 chez les jeunes, certains spécialistes pointent du doigt le Covid. Qu’en dites-vous ?
Cyril Ruello : Sur le plan du diabète de l’enfant, nous ne sommes pas dans une augmentation liée au Covid. Nous, ce que nous avons surtout vu, c’est qu’à un moment, sur les premières vagues de l’épidémie, il y avait une crainte d'aller à l’hôpital et donc un retard de diagnostics. Nous avons eu toute un période avec très peu de diagnostics, puis beaucoup de diagnostics mais très tardifs. Quand on lisse cela sur l’année, il n’y a pas d’augmentation franche du nombre d’enfants touchés par la maladie en raison du Covid.
Cela dit, nous constatons une augmentation constante et continue depuis des années, mais je ne crois pas qu’il y ait un lien franc avec le Covid.
Dans ce cas, comment explique-t-on cette augmentation ?
Cyril Ruello : Cette augmentation est tellement rapide, à l’échelle de l’humanité, qu’on ne peut que penser à une part environnementale. Dans cette part environnementale, nous n’avons pas encore d’explication franche. Il y a la question des zones urbaines, de la pollution atmosphérique, du microbiote, en somme, des réponses multiples. Quand on imagine le diabète, on imagine souvent la malbouffe, le trop de sucres, trop de nourriture, mais cela n’a pas du tout de lien avec le diabète type 1.
Quand l’intelligence artificielle est au service des patients…
Depuis plus de trois ans, en Isère, le CHU Grenoble Alpes traite un tiers de ses patients avec un "circuit en boucle fermé" autrement appelé "pancréas artificiel". Ce dispositif, géré par l’intelligence artificielle, injecte de l’insuline en continu, toutes les cinq minutes et après les repas, selon ce que consomme l’enfant. "Les parents et les enfants ont toujours une grande action nécessaire" précise Cyriel Ruello, "à chaque repas, ils doivent compter combien de glucides ont été consommés et en informer la pompe". "Ils ont une meilleure qualité de vie avec ce traitement" conclut le spécialiste.