Et si le placenta gardait "la mémoire" de l'exposition au tabac ? C'est ce que semble démontrer une étude dirigée par une chercheuse de l'Inserm de Grenoble. Ainsi le placenta serait affecté même si les futures mamans arrêtent de fumer.
La consommation de tabac, même lorsqu'elle est stoppée avant la grossesse, peut avoir des conséquences sur le placenta de la femme enceinte, montre une étude française publiée mercredi 6 octobre.
Des chercheurs de l'Inserm, du CNRS et de l'Université de Grenoble Alpes (UGA) ont étudié l'ADN placentaire de 568 femmes réparties en trois catégories : non-fumeuses, ayant arrêté de fumer dans les trois mois précédant la grossesse ou ayant continué à fumer avant et pendant leur grossesse.
Chez les fumeuses, les scientifiques ont observé des altérations dites "épigénétiques" dans 178 régions du génome placentaire (la séquence d'ADN n'est pas modifiée, mais la façon dont les gènes s'expriment peut être affectée). Chez les anciennes fumeuses, ces altérations sont bien moins nombreuses mais ont malgré tout été retrouvées dans 26 régions, montre leur article publié dans la revue BMC Medicine.
Le placenta conserverait donc la "mémoire" de l'exposition au tabac des femmes avant leur grossesse, expliquent l'Inserm, le CNRS et l'UGA dans un communiqué accompagnant l'étude. Il a été montré que la consommation de tabac pendant la grossesse avait de nombreuses conséquences néfastes sur la santé de la mère et de l'enfant, mais "les mécanismes en jeu sont encore mal connus".
On sait par ailleurs que le placenta, vulnérable à de nombreux composés chimiques, joue un rôle crucial dans le développement du foetus. Dans l'étude, les chercheurs ont constaté que les régions altérées correspondaient le plus souvent à des zones qui contrôlent à distance l'activation ou la répression de gènes. De plus, une partie d'entre elles étaient situées sur des gènes connus pour avoir un rôle important dans le développement du foetus.
Aussi, Johanna Lepeule, chercheuse à l'Inserm qui a dirigé ces travaux, fait l'hypothèse que les modifications épigénétiques observées sur le placenta de mères fumeuses ou ex-fumeuses "pourraient en partie expliquer les effets du tabagisme observés sur le foetus et la santé ultérieure de l'enfant". "On fait l’hypothèse que ces altérations placentaires pourraient expliquer les effets du tabac qu’on observe chez l’enfant, notamment sur le poids de naissance mais aussi sur son développement, sur sa santé respiratoire ou sur son neurodévelopement par exemple", explique-t-elle dans une interview donnée à France 3 Alpes.