"C'est comme le trafic de stups" : le trafic illégal de cigarettes s'intensifie dans le nord de la France

Pour obtenir un tabac à moindre prix, les fumeurs nordistes se tournaient vers les buralistes belges. Mais avec la hausse des prix, le tabac outre-Quiévrain n'est plus si intéressant, les poussant à consommer des cigarettes illicites. Le nord de la France est-il la nouvelle plaque tournante du trafic de cigarettes de contrefaçons ?

Société
De la vie quotidienne aux grands enjeux, découvrez les sujets qui font la société locale, comme la justice, l’éducation, la santé et la famille.
France Télévisions utilise votre adresse e-mail afin de vous envoyer la newsletter "Société". Vous pouvez vous désinscrire à tout moment via le lien en bas de cette newsletter. Notre politique de confidentialité

Le mercredi 11 décembre 2024, au tribunal judiciaire de Béthune, s'est tenu le procès d'un important trafic de cigarette. Les mis en cause, un homme et une femme qui vendaient des cigarettes contrefaites sur les réseaux sociaux. 

Pour Daniel Bruquel, du service prévention du commerce illicite chez Philip Morris France cela ne fait aucun doute : "cette affaire est symptomatique de l'évolution du trafic en France, et en particulier dans les Hauts-de-France."

Lui qui était présent au tribunal pour le procès, fait état d'un trafic de plusieurs milliers de cartouches que les mis en cause vendaient à une soixantaine de clients aux quatre coins du Nord et du Pas-de-Calais via les réseaux sociaux.

Le trafic illégal de cigarettes serait "un phénomène assez développé dans le Nord". On vous explique.

Un trafic en constante évolution

D'après les données partagées par le professionnel de Philip Morris, en 2019, 33% de la consommation de cigarettes ne sortait pas des bureaux de tabac, et 1% des cigarettes en circulation provenaient du marché de contrebande. En 2024, 44% des cigarettes n'étaient pas achetées chez le buraliste, et 14% provenaient de la contrefaçon. 

"Ces dix points d'augmentation montrent que les habitudes des consommateurs changent. Les taxes et les prix en France ont largement augmenté ces dernières années, les consommateurs sont sous une pression sociale pour arrêter de fumer, mais finalement, ils contournent le problème", relate Daniel Bruquel.

Le Nord et le Pas-de-Calais, territoires propices au trafic de cigarettes

Par leur proximité avec la Belgique, les habitants du Nord et du Pas-de-Calais ont longtemps acheté leur tabac, moins cher, en Belgique. Mais les cigarettes vendues outre-Quiévrain subissent aussi une hausse de leur prix, ce qui pousse les nordistes à se rabattre vers le marché noir.

"Dans le nord de la France, il y a un grand nombre de fumeurs par rapport au reste du pays. Il y a un fort potentiel de business illégal. Surtout que c'est un territoire à un jet de pierre des lignes de contrefaçons", détaille Daniel Bruquel. "Il y a une densité de population importante avec de faibles revenus."

Il y a un fort potentiel de business illégal

Daniel Bruquel à propos du nord de la France

Service prévention du commerce illicite chez Philip Morris France

Les cigarettes contrefaites sont majoritairement produites en Europe de l'Est et facilement trouvables en Belgique. Elles ressemblent à s'y méprendre aux cigarettes des marques conventionnelles. Les paquets sont vendus aux alentours de cinq euros, soit "deux à trois fois moins cher qu'un paquet identique chez un buraliste" d'après le spécialiste de la contrebande chez Philip Morris. C'est finalement le résultat d'un business criminel industrialisé, qui s'inspire de la contrefaçon de parfums, de cosmétiques, de la maroquinerie, mais aussi du trafic de stupéfiants.

Des méthodes similaires au trafic de stupéfiants

Pour se les procurer, les consommateurs peuvent se rapprocher de vendeurs à la sauvette ou de comptes sur les réseaux sociaux spécialisés dans ces ventes. La plupart du temps, elles arborent une marque "duty free" qui trompe le consommateur. Ils livrent un peu partout, ce qui diffuse les produits illicites partout sur le territoire même en ruralité.

"Il y a une normalisation de ce type d'achat, ça prospère de façon importante. En France, il y a 13 millions de fumeurs, soit cinq fois plus que les consommateurs de cannabis. En termes de business criminel, c'est intéressant. D'autant plus que les sanctions pénales sont faibles", poursuit Daniel Bruquel.

Mais alors quelles différences avec le trafic de stupéfiants ? "C'est comme le trafic de stups."  En décortiquant le mode opératoire des mis en cause à Béthune, Daniel Bruquel raconte : "dans leur convoi, ils sortaient du véhicule pour vérifier s'il n'y avait pas de contrôle de douane sur la route, ils transportaient le tout dans un véhicule de location et stockaient ça dans leur hangar." De même pour les vendeurs à la sauvette, "ils cachent les paquets dans le mobilier urbain. Les personnes bossent dans des laboratoires et les usines bougent régulièrement pour ne pas se faire identifier."

Un consommateur risque jusqu'à 135 euros d'amende en cas de consommation de tabac illicite. Pour le revendeur, le risque est plus gros. L'homme à la tête du trafic dans le Béthunois a quant à lui écopé de deux ans de prison avec un an de sursis probatoire, ainsi que d'une amende de plusieurs centaines de milliers d'euros qui représentent la quantité de marchandise saisie par la justice multipliée par le prix d'un paquet de cigarette.

Tous les jours, recevez l’actualité de votre région par newsletter.
Tous les jours, recevez l’actualité de votre région par newsletter.
Veuillez choisir une région
France Télévisions utilise votre adresse e-mail pour vous envoyer la newsletter de votre région. Vous pouvez vous désabonner à tout moment via le lien en bas de ces newsletters. Notre politique de confidentialité
Je veux en savoir plus sur
le sujet
Veuillez choisir une région
en region
Veuillez choisir une région
sélectionner une région ou un sujet pour confirmer
Toute l'information