Améliorer le signalement et le traitement judiciaire des abus sexuels : c'est l'enjeu d'un protocole signé vendredi entre la cour d'appel de Grenoble et les trois diocèses sur son ressort Grenoble-Vienne, Valence et Gap-Embrun. C'est une première en province
Début septembre, le procureur et l'archevêque de Paris avaient initié le mouvement avec un document visant à systématiser les signalements. Cette démarche intervient alors que l'Eglise est frappée par plusieurs scandales récents, dont des cas de non dénonciation d'agressions pédophiles. Le cardinal Barbarin, jugé en appel à partir de jeudi 28 novembre à Lyon, en est l'exemple le plus retentissant.
"Une première en province"
Le document en huit articles engage donc le procureur général de la Cour d'appel et les cinq procureurs de son ressort (Grenoble, Vienne, Bourgoin-Jallieu, Valence et Gap) ainsi que les trois évêques. "C'est une première en province, qui a vocation à faire école", a déclaré Jacques Dallest, qui l'a fait remonter au ministère de la Justice.
"L'idée est d'avoir des relations claires, de les faciliter quand malheureusement il y a des signalements à faire d'abus sexuels sur des mineurs ou des personnes vulnérables", a expliqué Mgr Guy de Kerimel, évêque de Grenoble, précisant que les quelque 300 prêtres en exercice ou retraités des trois diocèses allaient en être informés par courrier.
"Aller vers la tolérance zéro"
Les évêques s'engagent "à signaler le plus rapidement possible" et les procureurs "s'engagent à nous faire un retour", a ajouté le prélat. Le procureur général a concédé que c'était un "reproche" souvent adressé à la justice, et il a "demandé à ce que les procureurs traitent directement avec les évêques".
"Ce protocole participe du travail de l'Eglise de France pour aller vers la tolérance zéro", a affirmé Mgr de Kerimel. "Il s'agit de faire de l'Eglise une maison sûre pour reprendre l'expression du pape François (...) et de retrouver la crédibilité de l'Eglise", a ajouté Mgr Pierre-Yves Michel, évêque de Valence.
Trois objectifs
"Cela concerne les prêtres, les diacres mais aussi toute personne travaillant dans l'Eglise. C'est aussi grave que des abus soient commis par un laïc, un catéchiste ou un organiste", a souligné Mgr Xavier Malle, évêque de Gap.
M. Dallest détaille trois objectifs visés par ce protocole :
- comment recueillir les dénonciations ou signalements, la parole des victimes ?
- Comment porter à la connaissance des autorités judiciaires cette parole ?
- Comment s'informer mutuellement des suites canonique et judiciaires ?
Bilan dans deux ans
"Il sera bon de faire le point dans deux ans", a conclu M. Dallest voulant inscrire cette démarche dans les pratiques, au-delà des signataires amenés à être mutés. Selon le procureur général, "quelques affaires sont en cours, moins de dix" sur son ressort. Quant à la question de la prévention auprès des auteurs d'abus, "l'Eglise de France travaille sur un lieu d'écoute mais ce n'est pas encore abouti", selon Mgr Malle.