"On la tue une deuxième fois" : la Cour de cassation retient la prescription du meurtre de Marie-Thérèse Bonfanti

La Cour de cassation a retenu, dans un arrêt rendu ce 28 novembre, le principe de prescription dans l'affaire du meurtre de Marie-Thérèse Bonfanti en 1986 à Pontcharra. La famille de la victime compte toutefois poursuivre les démarches dans l'espoir d'aboutir à un procès.

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L'espoir de la famille de Marie-Thérèse Bonfanti s'est heurté au mur de la prescription. La chambre criminelle de la Cour de cassation a rendu sa décision ce mardi 28 novembre, annulant l'arrêt de la chambre d'instruction de la cour d'appel de Grenoble qui ouvrait la voie à un procès dans ce cold case.

Yves Chatain, mis en examen et écroué pour le meurtre de la jeune femme, s'est pourvu devant la plus haute juridiction française pour faire valoir la prescription, qui était de dix ans à l'époque des faits. La Cour de cassation a confirmé que ce principe s'appliquait dans ce dossier.

Les magistrats ont notamment considéré dans leur arrêt que "ni l’absence de mobile résultant de la personnalité de la victime, ni la dissimulation du corps et de la scène du crime ne caractérisent un obstacle insurmontable à l'exercice des poursuites pouvant justifier la suspension de la prescription de l'action publique".

"Il faut qu'on rende justice à Marie-Thérèse"

Marie-Thérèse Bonfanti, 25 ans, a disparu le 22 mai 1986 alors qu'elle distribuait des journaux à Pontcharra, en Isère. L'enquête s'était soldée par un non-lieu l'année suivante et l'affaire est devenue l'un des plus vieux cold cases de France.

Yves Chatain, qui avait été soupçonné puis mis hors de cause à l'époque des faits, a avoué en mai 2022 avoir donné la mort à la jeune mère de famille dont le crâne a été découvert à quelques dizaines de mètres du lieu où le meurtrier présumé a dit avoir abandonné le corps.

Les proches de Marie-Thérèse Bonfanti, réunis autour de leur avocat ce mardi, ont dit leur immense déception de voir s'éloigner la possibilité d'un procès. "On la tue une deuxième fois et on nous tue, nous", dénonce Thierry Bonfanti, le mari de la victime.

"J'ai de la colère. Cela fait bientôt 38 ans qu'on se bat et on voit que la justice ne fait pas son travail. Sinon, elle se rendrait compte de l'importance du dossier", estime-t-il, tout en continuant d'espérer une issue à cette affaire. "Il faut qu'on rende justice à Marie-Thérèse qui était une femme exemplaire, une très bonne épouse. Cette justice est légitime."

Cet arrêt de la Cour de cassation donne la possibilité à Yves Chatain de demander sa remise en liberté, quelques mois après ses aveux. "Monsieur Chatain doit se dire qu’il a commis le crime parfait. C'est décevant. On est face à un scandale judiciaire", réagit le frère de Marie-Thérèse Bonfanti, Eugène Saia, se disant "amer".

La famille continue le combat

"Je me dis que notre histoire est sans fin. Il n’y pas d’issue, sauf pour (Yves Chatain). Il va pouvoir continuer de vivre sa vie", ajoute la fille de la victime, Erika Bonfanti, âgée de quatre ans à la disparition de sa mère. "Je me mets à la place des autres cold cases, ils mettent beaucoup d’énergie pour trouver la vérité mais on se demande si tout cela a un sens si, finalement, on ne peut pas obtenir justice. Ça n’envoie pas un signal d’espoir."

Malgré cette décision défavorable à la famille de la victime, Thierry Bonfanti promet de "ne pas en rester là." La chambre de l'instruction de la cour d'appel de Lyon a été désignée pour réexaminer le dossier. "Nous espérons qu'elle résiste à cette décision de la Cour de cassation et que cette affaire soit jugée à nouveau, cette fois par l'assemblée plénière de la Cour (de cassation)", analyse l'avocat des proches de Marie-Thérèse Bonfanti, Me Bernard Boulloud, qui déplore une décision basée sur des critères "d'un autre temps".

"Venir dire que la prescription est fondée sur l'oubli, qu'elle est fondée sur le dépérissement des preuves, c'est faux. Il faut remettre la justice dans son temps", déclare Me Boulloud. "On va continuer à se battre et on va se servir de cet échec pour devenir plus fort." Les proches de la victime et leur avocat maintiennent qu'ils se battront pour obtenir un procès et se réservent la possibilité d'aller jusque devant la Cour européenne des droits de l'homme si nécessaire.

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