Cet été, il est devenu le premier français à endosser le maillot arc-en-ciel, celui des champions du monde, dans sa discipline: le VTT 4X. Depuis son enfance, Quentin Derbier en rêvait, de ce titre : à force d'abnégation et de constance, entre les entraînements et la vie civile, il y est parvenu.
Que se passe-t-il une fois qu'on a réalisé ses rêves d'enfance ? À 33 ans, c'est ce qui est arrivé à Quentin Derbier. Le 7 juillet 2018, cet isérois originaire de Lyon, est monté sur la première marche du podium des Championnats du monde de VTT 4X à Val di Sole, en Italie. Il a enfilé ce jour-là son premier maillot arc-en-ciel, celui que l'on reçoit lorsqu'on est sur le toit du monde en VTT. Un aboutissement derrière lequel se cache une vie d'efforts.
Quentin Verbier a grandi avec les vélos. À part la route, il aura goûté à presque toutes les disciplines : VTT descente, cross-country, le BMX.. un jour, il découvre l'art dont il deviendra le maître : le VTT 4X - prononcer "four-cross" - un mélange de VTT et de BMX, dont les compétitions s'effectuent à quatre de front. "C'est un sport de contact. on est en opposition directe avec l'adversaire, souligne le champion. Il faut montrer les muscles, comme on dit."
Depuis, l'enfant qui dévalait les pentes est devenu un rider, qui n'a plus rien lâché, jusqu'au titre suprême. La victoire de cet habitant du Sappey-en-Chartreuse (Isère) a d'autant plus de valeur qu'elle a été acquise devant la légende de la discipline, le Tchèque Tomas Slavik, double champion du monde (2010 et 2014). Elle a d'autant plus de saveur, aussi, que les championnats du monde lui échappaient depuis trop longtemps : le français avait terminé sur la seconde marche du podium en 2017.
Le sportif se souvient du chemin parcouru. "Je n'ai pas eu une trajectoire fulgurante dans le sport que je pratique. J'ai toujours progressé par étapes, mais assez régulièrement, je n'ai pas eu de gros creux dans ma carrière, se souvient-il. Cela a été une construction. Auparavant, je n'étais sûrement pas prêt de toute façon pour l'avoir, même si je suis pas passé loin."
Pour devenir le premier, Quentin a toujours dû mener plusieurs vies de front. Rider le week-end, vendeur au rayon cycles de Decathlon une partie de la semaine, où les clients lui parlent pompes à amortisseurs et suspensions, souvent sans savoir à qui ils s'adressent.
Car VTT 4X est le parent pauvre de la discipline, et un titre de champion du monde n'y change rien. Le jeune sportif vit sa passion, sans vivre de son sport :"Je connaissais les règles dès le départ. Mon but, c'est mon épanouissement personnel. Je m'y retrouvait dans les résultats. Je savais que j'allais pas gagner des millions a priori. Mais c'est vrai que [le VTT 4X] pourrait être un peu plus primé, pour arrondir les fins de mois".
Et maintenant ? Il continue à rider au plus haut niveau. L'euphorie des victoires est toujours aussi grisante. L'adrénaline des courses au taquet, toujours aussi présente. Mais toutes ces années sans aucun temps morts.. au bout d'un moment, cela peut user.
Aujourd'hui, le français a fait le tour de son sport. Après avoir accroché un maillot arc en ciel à son palmarès, il a décidé de raccrocher, mettre un terme à sa carrière sportive : "Je préfère m'arrêter là-dessus plutôt que de refaire une saison pour les mauvaises raisons, explique-t-il. Porter le maillot sans être à 100% dans les courses, cela ne me correspond pas."
Quentin Derbier dit adieu à la course mais pas au vélo. Il continuera à autre rythme, pour éviter d'avoir en permanence la tête dans le guidon. Il sort par la grande porte.
Le reportage de Frédéric Lefrançois, Grégory Lespinasse et Frédéric Cathelain, avec Philippe Caillat.
