Le synchrotron de Grenoble s'apprête à rouvrir ses portes aux scientifiques du monde entier mardi, après deux ans de travaux. Le nouveau faisceau de lumière est cent fois plus brillant que le précédent. Il va permettre aux équipes d'apporter une aide précieuse à la recherche sur le Covid-19.
Dans le hall expérimental du synchrotron de Grenoble, tout est calme, du moins en apparence. Car en coulisses, les ingénieurs s'activent depuis des mois. Une machine de quatrième génération va entrer en service mardi 25 août, son faisceau de lumière est cent fois plus brillant que le précédent.
Il s'agit du premier accélérateur de particules à "haute énergie" de cette capacité inauguré à travers le monde, selon son exploitant, l'European Synchrotron Radiation Facility (ESRF). Et à la veille de son ouverture, tout fonctionne à la perfection.
"(Notre) équipe de géomètres a réussi cette prouesse, assez rapidement, de pouvoir aligner tous ces gros équipements qui pèsent plusieurs milliers de tonnes, avec la précision de la demi-épaisseur d'un cheveu, résume Laurent Hardy, ingénieur responsable de l'opération des accélérateurs à l'ESRF. C'est la preuve qu'il y a eu un travail d'équipe formidable qui a bien fonctionné."
#Grenoble : un synchrotron de quatrième génération va entrer en service fin aoûthttps://t.co/hBHxMpsRY7 pic.twitter.com/duBwWLIwO2
— France 3 Alpes (@f3Alpes) July 8, 2020
Explorer l'infiniment petit
Ce faisceau de lumière quatrième génération a été conçu et dessiné à Grenoble. Pour rappel, le synchrotron est une sorte de microscope géant. Comme un train rempli d'électrons circulant dans un anneau. Lancé à la vitesse de la lumière, il produit des rayons X, permettant d'explorer l'infiniment petit.
Selon son exploitant, cette nouvelle génération de synchrotron "ouvre une nouvelle ère pour la science", élargissant l'exploration de la matière à l'échelle du nanomètre. Et cette possibilité s'ouvre à de nombreux domaines tels que la santé, l’environnement, l’énergie, les nouveaux matériaux pour l’industrie, mais aussi la paléontologie.
"On est très très excités d'avoir cette nouvelle machine, s'enthousiasme Flora Yakhou, ingénieure de recherche responsable d'une ligne de lumière à l'ESRF. On pense qu'on va gagner énormément en stabilité sur notre expérience et ça, c'est crucial. On va pouvoir continuer à être les meilleurs au monde dans ce qu'on fait."
Des recherches sur le Covid-19
Cette nouvelle source de lumière va apporter une aide précieuse à la recherche, notamment sur le Covid-19. Elle va permettre d'observer la structure intime du virus pour développer des médicaments et des vaccins. Mais aussi de comprendre comment le coronavirus détruit les micro-alvéoles du poumon.
"Nous avons la capacité de faire des images tridimensionnelles et de naviguer à l'intérieur de cette image tridimensionnelle de manière analogue à ce qu'on peut faire avec un scanner médical, mais avec une bien meilleure résolution et une bien meilleure pénétration à l'intérieur de l'organe, et de pouvoir imager l'impact du Covid en terme de surinfection", explique Jean Susini, directeur de recherche à l'ESRF.
Ce synchrotron nouvelle génération a été financé par 22 pays pour un investissement total de 150 millions d'euros sur la période 2015-2022. Dès mardi, une centaine de scientifiques issus du monde entier vont pouvoir utiliser ces nouveaux instruments dans le cadre d'une douzaine de projets. Une technologie qui inspire déjà les synchrotrons de Chicago, Osaka ou Hambourg. Grenoble vient de prendre 10 ans d'avance.