Ce mardi 3 mai, deux caricaturistes ont remporté le Prix International du dessin de presse, décerné à Genève pour la troisième fois. Le Kenyan Gado et le Malaisien Zunar, mis au pilori par leur gouvernement respectif, espèrent que ce prix aidera la presse de leur pays à être plus libre.
C'est en janvier 2015, que le dessinateur kenyan Gado, de son vrai nom Godfrey Mwampembwa, a signé la caricature à l'origine de son licenciement. Depuis plus de 23 ans, il officiait dans le même journal, quand il a décidé de mettre en scène sur papier, le président de la Tanzanie Jakaya Kikwete, allongé tel un empereur romain entouré de femmes prenant soin de lui. Leur nom est indiqué sur leur tunique: "Copinage, Incompétence et Corruption". Un trait d'humour qui a déplu.
Gado ne regrette pas sa publication. S'il dessine, c'est pour "soulever des questions, susciter la réflexion chez les gens". Le caricaturiste espère que le prix reçu hier à Genève, permettra de "mettre en lumière la censure qui s’exerce non seulement au Kenya, mais aussi ailleurs en Afrique".
Reportage Ingrid Pernet-Duparc, Christian Mathieu et Laëtitia Di Bin
En Malaisie, les médias seraient contrôlés par le parti dirigeant depuis une soixantaine d’années. Zunar use donc d'internet, où il publie régulièrement de nouveaux dessins satiriques. Il oppose, par exemple Donald Trump, le milliardaire voulant devenir président, à Najib Razak, le premier ministre rêvant d’être milliardaire.
Le procès du caricaturiste s'ouvrira le 14 juillet prochain. Conscient qu'il risque de perdre son procès, il espère que le prix reçu à Genève ce mardi lui permettra d'être soutenu par les grands médias à travers le monde.C’est impossible de rester neutre. Un artiste doit pousser les gens à aller au-delà de leurs peurs."
Les risques de condamnation n'effrayent pas Zunar, qui continuera de dénoncer corruption et abus de pouvoir: "En tant que dessinateur et Malaisien, je ne peux pas échapper à mes responsabilités. C’est impossible de rester neutre. Un artiste doit pousser les gens à aller au-delà de leurs peurs."